Et si on se parlait? (bouteille à la mer on sait jamais)

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Citation :J'ai l'impression que c'est bien pire si on regarde les forces dont dispose la Russie et celle de l'Europe. Poutine semble avoir réellement la capacité militaire de marcher sur l'Europe. Il s'est préparé à cette guerre, pas nous.

Avec d'énormes pincettes considérant comme tu le soulignais la difficulté d'avoir des infos fiables.

Mais même hors propagande, l'armée russe semble vraiment patiner et en chier en Ukraine. Pas sûr que ça donne envie à Poutine de réitérer l'expérience tout de suite. Et je ne suis vraiment pas sûr que Poutine veuille aller jusque là. Il ne fait rien d'autre en Ukraine que ce qu'il a déjà fait en Tchétchénie, en Georgie, sauf que là ça coince et que l'Ukraine est un bien plus gros morceau. Il faudrait une escalade persistante avec les pays de l'OTAN pour que ça tourne à la cata... ce qui n'est pas impossible.

En revanche sur le long terme, oui, je suis assez d'accord. D'autant que les sanctions économiques ont coupé la Russie de beaucoup de liens avec l'Europe: à l'avenir, il y aura donc moins de garde fous à ce niveau là. Cependant on ne mesure pas encore si le coût de la guerre va pouvoir être supporté par la Russie. C'est ça qui va être déterminant. C'est bien beau d'avoir une grande et puissante armée, mais s'il n'y a plus les moyens de l'entretenir... Le rôle de la Chine va être déterminant, ainsi que la tournue des évènements. Si ça s'envenime encore, la Russie sera certainement tentée de mettre en place une économie de guerre qui pourra la faire tourner elle et son armée au moins pendant un temps (rappelons nous l'état de l'armée rouge fin 41, que tout le monde pensait finie, et son état 3 ans plus tard: un rouleau compresseur que rien ne pouvait arrêter).

Outre les questions économiques, il y a également les facteurs humains. Le moral ne semble déjà pas bien élevé dans l'armée russe, dont certains soldats ne semblent pas du tout avoir envie d'aller risquer leur peau pour les délires de Poutine. Il y a aussi une contestation en interne, dans la société russe (même si elle est extrêmement difficile à quantifier). On se lance pas dans une guerre à grande échelle si les mecs ont même pas envie de se battre. Et plus le nombre de victimes s'accroit, plus l'opinion publique russe risque de se retourner contre Poutine. On peut imaginer que l'Ukraine soit le Viet Nam des Russes: que ça fasse naître une contestation et des revendications sociales et politique en Russie. Mais seul l'avenir le dira.

En revanche, l'effet pervers d'isoler la Russie, de pointer du doigt les russes dans leur globalité et de leur faire supporter le poids des sanctions économiques, c'est qu'ils peuvent se sentir menacés dans leur intégrité en tant que peuple et en tant que nation (et le régime joue à fond là dessus... le fait que la Russie se soit mangé pas mal d'invasions en règles venues de l'Ouest laisse également un terrain propice à ce discours), et s'unir et retrouver une combativité derrière un leader. Même si ce n'est pas Poutine, on ne sait pas qui ou quoi peut sortir derrière sur le long terme. Quand des membres de ta famille ont été tués dans une guerre par des armes occidentales, guerre sur laquelle tu es très mal informé, que le monde entier te dit que tu es une merde juste parce que tu appartiens à un peuple, et qu'en plus t'as plus rien à bouffer et plus une tune, à cause de sanctions elles aussi occidentales (et que la propagande de ton propre régime monte en épingle) tu deviens extrêmement malléable pour tout discours radical et eschatologique.

Le pire des scénarios serait que les Etats Unis réélisent Trump ou un autre mec du genre dans 4 ans et qu'il nous dise "bon, l'Europe, vous êtes gentils, mais maintenant démmerdez vous"). Là oui, ce serait méga tendu pour nous. Parce que même si l'Europe met en place un plan de défense et réarme (ce que franchement je ne souhaite pas, parce que qui veut la paix ne prépare pas la guerre... parce qu'on est pas à l'abri nous aussi qu'un jour un taré se retrouve aux commandes), ça ne sera pas effectif avant un long moment (une dizaine d'années d'après ce que j'ai pu lire). Et bon, ce qui nous attend resterait quand même une guerre, et j'espère sincèrement du fond du coeur que ça n'arrivera pas.

Franchement la situation n'est pas simple pour concilier soutien évident à l'Ukraine tout en pensant au long terme et au risque pour la sécurité de l'Europe.

Mon avis (qui ne vaut pas grand chose) est que l'OTAN aurait du disparaître en même temps que le pacte de Varsovie et l'URSS. On aurait du se rapprocher de la Russie, l'aider à se sortir de la merde dans les années 90 (parce que ça a été vraiment la merde pour la Russie dans les années 90, d'où cette peur des russes, leur sentiment d'être menacés, et leur soutien à un type comme Poutine), l'intégrer peu à peu dans l'Europe et on aurait pu avoir une alliance européenne allant de Brest à Vladivostok, non alignée ni sur la Chine, ni sur les Etat Unis, et qui aurait fait sortir de le monde de la bipolarité qui menace de le faire partir en sucette tous les 36 du mois.

C'est un peu tard pour ça. Là l'invasion de l'Ukraine est intolérable, et la Russie est redevenue une menace (et franchement ça fait chier...). Mais sur le long terme, il me semble que c'est ce qu'on devrait viser. En tous cas arrêter avec le processus qui transforme toutes les fins de conflit en nouveaux à venir.

M'enfin mon analyse de la question vaut pas mieux que celle de n'importe quel quidam random que l'on voit partout en ce moment. J'en garderais que c'est une situation complexe et que l'on ne doit pas moralement faire l'économie de la nuance.

Du coup, on cause d'avantage de la guerre que de notre façon d'échanger... après, ça m'intéresse grandement même si c'était pas le but à la base.
(Modification du message : 18-03-2022, 17:08 par Egill.)
Il apparaît que depuis 2015 l Ukraine se prépare à cette invasion avec l aide US.
Je me demande à quel point cette attaque "arrange " les usa qui voit ainsi un adversaire se consumer dans une guerre d usure dont il ne peut sortir vainqueur in fine.
Malgré les déclarations de Biden, je ne crois pas que la Russie était considérée par les gouvernements américains successifs comme un ennemis sur le temps long. Plutôt un concurrent dans certains domaines mais un partenaire dans d'autres (par exemple le spatiale) qui pouvait être bien utile pour gérer la Chine. Et je crois au contraire que les dernières actions de Poutine, qui mets la Russie infréquentable pour les nations occidentales, et la pousse de facto dans le camp chinois embête beaucoup les américains qui auraient bien voulu pouvoir se concentrer sur la Chine.

Bien sûr, maintenant que le sort en est jeté, les américains n'ont pas d'autre choix que d'aider l'Ukraine, ne serait-ce que pour montrer à la Chine que le camp occidental ne reste pas inactif quand une nation plutôt démocratique (au sens contemporain du terme cad élection, état de droit, libertés individuels garanties) et favorable au camp occidentale est attaqué. L'Ukraine pourrait faire jurisprudence pour Taiwan.

Et puis même si on est plus au centre du jeu, les états unis doivent rassurer leurs alliés Européen.
Sinon je suis en train de me demander si on assiste pas à un l émergence d un nouveau paradigme au niveau opérationnel dans le sens où l émergence de trois facteurs que je vais symboliser par trous systèmes d armes : le javelin antichar, le singer antiaerien et le drone baryatkar tb2 antitout ont complètement rebattu les cartes tactiquement. Les groupements tactiques interarmes russes sont contrés et contre attaqués par les forces ukrainiennes qui sont bien plus resilientes et efficientes que celles russes.

Je ne peux m empêcher de faire le parallèle avec l impasse de l automne 14 sur tous les fronts où il avait fallu s enterrer faute de ne pouvoir percer/envelopper l adversaire...

Je pense tout haut hein Wink
Citation :Malgré les déclarations de Biden, je ne crois pas que la Russie était considérée par les gouvernements américains successifs comme un ennemis sur le temps long. Plutôt un concurrent dans certains domaines mais un partenaire dans d'autres (par exemple le spatiale) qui pouvait être bien utile pour gérer la Chine.

Et il est à noter que Poutine n'a pas tant changé que ça au niveau de l'idéologie qui le sous tend. La Tchétchénie, dès son accession au pouvoir, a posé le personnage. Ca fait un peu 20 ans qu'en Occident, on nie certaines réalités. Le régime de Kadyrov, c'est juste une espèce de carricature de dictature sanguinaire qui ne cherche même pas à sauver les apparences, et il a été installé et maintenu par le régime russe pendant tout ce temps (ceci dit, on pourrait là aussi trouver des exemples de tels régimes installés et maintenus par l'Occident en Asie, en Afrique ou en Amérique du Sud).

C'est dans les années 90 que ça s'est joué. Une fois Poutine au pouvoir, c'était mal engagé. Il a bien tenté un rapprochement avec l'Occident, mais je me demande si c'était pas juste pour gagner du temps, et il y avait le contexte post 11 Septembre qui a joué sur les relations internationales: le prétexte de la guerre contre le terrorisme lui a servi pour la Tchétchénie.

Mais idéologiquement, il s'est toujours posé dans un espèce de nationalisme pan slave teinté de nostalgie pour l'empire russe (et l'URSS, mais plus pour ce qu'il représentait politiquement qu'idéologiquement).

Reste le fait que l'OTAN a perduré est s'est étendu dans les années 90 et 2000 alors que sa raison d'être était de faire face au bloc de l'Est pendant la guerre froide était censée être caduque. Il y a bien eu un rapport de force et une défiance qui ont donc été maintenus des deux côtés.

La grande question que je me pose, c'est: n'y a-t-il pas vraiment moyen de prévenir ce genre de situation? Parce qu'effectivement, en l'état actuel des choses, on va peut-être être "contents" de trouver l'OTAN. Sans ce dernier, l'Europe est quasiment à poil militairement parlant. Mais peut-on espérer une paix durable en se pointant des missiles les uns sur les autres ad vitam eternam?

Citation :Bien sûr, maintenant que le sort en est jeté, les américains n'ont pas d'autre choix que d'aider l'Ukraine, ne serait-ce que pour montrer à la Chine que le camp occidental ne reste pas inactif quand une nation plutôt démocratique (au sens contemporain du terme cad élection, état de droit, libertés individuels garanties) et favorable au camp occidentale est attaqué. L'Ukraine pourrait faire jurisprudence pour Taiwan.

C'est aussi un risque pour l'avenir en effet. Si les régimes comme celui de Poutine se sentent les mains libres, ce genre de crises risque de se multiplier.
(18-03-2022, 14:55)Egill a écrit : Et qu'on peut à mon avis légitimement s'étonner du pourquoi du comment on s'est si peu émus de ce qu'il se passe en Syrie, en Afghanistan (qui est un pays et des cultures qui m'ont vraiment fasciné quand je m'y étais intéressé, loin des clichés que l'on a sur lui... depuis que j'ai lu les bouquins et que j'ai vu les reportages de C De Ponfilly par exemple, j'ai mal pour les Afghans qui ne méritaient pas plus que d'autres ce qui leur arrive depuis 40 putain d'années!), au Yémen, en Irak, au Congo, au Darfour...etc

Dans tous ces pays (et d'autres, la liste est longue), il y a des agresseurs et des agressés. Il y a de nombreuses victimes civiles qui n'avaient rien demandé d'autre que de vivre leur vie le plus tranquillement possible.

Et comment se fait-il qu'on ne se soit jamais émus à ce point pour les Tchétchènes? Les guerres de Tchétchénie il y a 15 /20 ans ont été une monstruosité sans nom, à gerber.

D'où des interrogations à mon avis légitimes sur une émotivité à plusieurs vitesse, ce qui encore une fois n'enlève absolument rien au caractère intolérable de ce qu'il se passe en Ukraine et au fait qu'il faut aider les ukrainiens au moins humanitairement (pour les aider militairement, il faut avoir conscience de ce que l'on fait. On ne prépare pas la paix en livrant des armes. Donc livrer des armes, c'est toujours un peu faire la guerre... donc il faut pouvoir en assumer les conséquences et honnêtement, je pense que nos sociétés (nous je veux dire, les simples quidams) sont loin de se rendre compte de ce que ces conséquences veulent vraiment dire).

Ce qui fait que la guerre en Ukraine nous perturbe tant, à mon avis, c'est que l'agresseur n'est ni un allié (dont à priori nous n'aurions rien à craindre), ni un petit pays lointain. C'est la première puissance nucléaire (en termes de nombre d'ogives) et la deuxième (ou troisième, peu importe) armée du monde, et ce sur le même continent. Et à mon avis c'est ça qui nous perturbe: on se sent ce coup ci vulnérables par rapport à la Russie et il y a un phénomène de "bloc" autour de l'Ukraine.

Alors sur ce point là (et celui-là seulement), je me permet d'intervenir car c'est un point de psycho-sociologie (donc mon pré carré) assez clairement établi depuis longtemps. Ce n'est pas tant la nature de l'agresseur que la nature de l'agressé qui ici choque l'opinion occidentale.

L'agressé, l'ukrainien moyen est blanc, chrétien, se comporte globalement comme nous, vit dans des villes assez similaires aux nôtres, consomme plus ou moins les mêmes produits que nous et vit sur le même continent que nous. Ajoutons que l'on a rarement (jamais ?) entendu d'histoire de terroristes ukrainiens par le passé. Bref, un peuple qui a tous les égards est vu comme "civilisé" car quasi identique à nous (qui nous percevons bien entendu comme civilisés).

Toutes les conditions sont réunies pour que le citoyen occidental moyen voit dans les ukrainiens des semblables. Ce n'est pas le cas des autres pays que tu cites ni même de ceux que tu ne cites pas. Le plus proche géographiquement c'est la Tchétchénie à 4000 km d'ici (contre 2000 pour l'Ukraine). Qui plus est une région largement musulmane et à qui la Russie à attribué de nombreux attentats par le passé (attribution à prendre avec toutes les précautions d'usage). Bref, un paquet de différences, quelles soient réelles ou simplement perçues comme telles.

Ajoutons que l'Ukraine est un état souverain, reconnu depuis un bon moment par la communauté internationale. Un pays "normal" dans la perception de nos concitoyens pour le dire autrement. Contrairement à ces pays perçus (encore une fois à tort ou à raison) comme "barbares", toujours en guerre (civile ou autre) à l'instar de la Syrie, du Congo ou de l'Afghanistan.

Ces trop grandes différences avec ces pays et ces peuples font que leur sort n'est absolument pas perçu de la même manière, fut il identique ou pire en termes d'horreur. On parle bien ici de perception, d'émotion et non de véracité factuelle.

Ajoutons que les médias mettent ici en avant une situation parfaitement binaire : agressé et agresseur sont clairement définis comme étant deux états souverains. On est très loin des guerres civiles (Syrie, etc) ou même du conflit israelo-palestien où un état affronte une multitude de groupes plus ou moins officiels, plus ou moins reconnus. Ici, c'est une guerre dans sa forme la plus simple et claire : deux états souverains opposés. Et l'un a clairement déclenché les hostilités armées, même si des deux côtés il y a eu des hostilités politiques de longue date. Ce conflit fait résonner les deux guerres mondiales dans la mémoire européenne car le parrallèle, bien que grossier pour l'historien, est flagrant pour le citoyen lambda : un méchant tyran attaque les gentils qui se défendent.

Bref, des gens qui nous ressemblent, qui sont géographiquement assez proches, un scénario de guerre qui fait écho aux grandes guerres du XXème siècle telles que mémorisées en Europe, tous les ingrédients sont rassemblés pour que l'occident , citoyens comme politiques d'ailleurs, réagissent comme jamais auparavant.
@"Alias" : Je tenais à te remercier pour ton analyse que je partage. Je l'ai montré à un ami qui s'interrogeait et souffrait de cette différence de traitement entre Ukrainien et ressortissant d'Afrique. Il souffrait de ne pas comprendre ce hyatus et ton éclairage l'a apaisé quelques peu après que je lui ai fait lire.
(19-03-2022, 08:40)Lucius Forge a écrit : @"Alias" : Je tenais à te remercier pour ton analyse que je partage. Je l'ai montré à un ami qui s'interrogeait et souffrait de cette différence de traitement entre Ukrainien et ressortissant d'Afrique. Il souffrait de ne pas comprendre ce hyatus et ton éclairage l'a apaisé quelques peu après que je lui ai fait lire.

Merci.

Depuis quelques années je me suis spécialisé dans les dynamiques de groupe et en particulier la question du harcèlement des jeunes. Je prendrai d'ailleurs le mois prochain la direction du premier Centre de Référence & d'Intervention Harcèlement de Belgique, un projet-pilote pour lequel je bataille depuis un an auprès des politiques pour avoir les moyens de le créer. C'est chose faite cette année.

Le parrallèle entre mon boulot et cette analyse est assez simple : j'ai beaucoup étudié ces cinq dernières années la question de l'agression et des facteurs qui déclenchent les agressions dans les groupes humains. Ainsi bien sûr que ce qui peut protéger un membre du groupe des agressions. Le constat est assez clair pour moi : plus l'autre nous ressemble, plus nous sommes capables d'empathie à son égard, par projection simple de type "je pourrais être lui et inversément". Les enfants ayant le moins de risque d'être harcelés sont ceux qui sont au plus proche des normes (au sens sociologique) du groupe. Chaque élément qui va différencier l'enfant des normes sera ce que nous appelons un facteur de vulnérabilité. Il ne sera pas automatiquement harcelé mais plus enfant cumule ce type de facteur, plus le risque augmente qu'il soit pris pour cible. Ces normes varient bien sûr d'un groupe à l'autre, un gamin de la cité dans une classe bourgeoise sera tout autant hors normes qu'un fils de notaire dans une classe composée de gamins de la cité.

La même dynamique est selon moi à l'œuvre à l'échelle de l'émotion que peuvent susciter des réfugiés. Plus ils sembleront proches de nous, de nos normes (sociales, religieuses, économiques, etc), plus nous aurons de l'empathie pour eux. A contrario, plus un peuple sera différent de nous, moins nous serons enclin à lui venir en aide.

Améliorer les capacités d'empathie, de préoccupation de l'autre passe donc par la mise en avant des points communs pour créer du lien, une perception de similarité entre les individus. Malheureusement, dans le cas qui nous occupe, notre société a généralement tendance à mettre en avant les différences entre les réfugiés africains ou asiatiques et nous, ce qui alimente le phénomène de rejet ou tout au moins de faible préoccupation pour ces peuples. La situation en Ukraine est par contre unique à ce jour dans son traitement médiatique et politique. Zelensky a bâti son discours politique sur cet axe d'ailleurs : mettre en avant toutes les ressemblances entre l'Ukraine et l'Europe pour susciter une empathie encore jamais vue concernant des réfugiés et un pays en guerre.

Je terminerai en précisant que ce post et le précédent peuvent sembler assez froids, voire même émotionnellement détachés des horreurs qui se déroulent au moment où j'écris ces lignes. Ne croyez pas que je sois une machine froide qui analyse tout cela sous le seul angle des sciences humaines pour faire de la théorie pontifiante. Mon boulot m'amène à côtoyer des gamines de 14 ans qui se mettent sur les rails du train suite à du revenge-porn, des parents endeuillés et des enfants qui s'auto-mutilent. Sans une certaine prise de distance par rapport aux horreurs de certains comportements humains, je ne pourrais que m'effondrer et pleurer, ce qui ne serait d'aucune aide pour les victimes.
Merci Alias pour ton éclairage. Et non, personnellement, je ne te prends pas pour une machine, bien au contraire. Faut avoir une sacrée paire de couilles (ou d'ovaires d'ailleurs histoire de pas trop faire dans le cliché), un moral en béton armé et une empathie extraordinaire pour faire ton job. On ne peut que respecter cela de mon point de vue.

Et sans surprise vu ce que l'on a lu au-dessus : https://www.sudouest.fr/international/ec...212183.php
(Modification du message : 19-03-2022, 13:45 par Cyrus33.)
Merci Alias pour ces précisions.

Ce déterminisme culturel (j'hésitais à écrire "racial") est quand même assez triste. Même si je comprend que ce sont des mécanismes psychologiques largement inconscients. Changer les mentalités les plus profondément ancrées et un travail de titan. Tu sembles faire un boulot extraordinaire, merci (et ça vient de quelqu'un qui a eu une adolescence assez difficile dans son rapport avec les autres...même si loin des cas déchirants dont tu parles) et chapeau.

Citation : Les enfants ayant le moins de risque d'être harcelés sont ceux qui sont au plus proche des normes (au sens sociologique) du groupe.

Parce qu'au fond, l'anticonformisme serait perçu comme un facteur d'affaiblissement du groupe?

Je pense à des choses que j'ai lu sur les sociétés premières. Les structures tribales sont à la fois très solides (parce que basées sur des liens familiaux) et très fragiles (parce que la moindre catastrophe peut mettre en péril l'avenir du groupe). D'où un grand nombre de rites, de tabous, bref, de normes, qui permettent d'assurer la cohésion du groupe (et son fonctionnement particulier dans le cas d'une société de chasseurs cueilleurs nomades reposant sur une organisation sociale non ou très peu hiérarchisée). Violer ces tabous ou contrevenir à ces rites expose le fautif à des sanctions sociales implicites qui peuvent aller jusqu'à une mise au ban, voir au meurtre dans certains cas.

Citation :Je terminerai en précisant que ce post et le précédent peuvent sembler assez froids, voire même émotionnellement détachés des horreurs qui se déroulent au moment où j'écris ces lignes. Ne croyez pas que je sois une machine froide qui analyse tout cela sous le seul angle des sciences humaines pour faire de la théorie pontifiante.

Dans ce genre de situation, garder la tête froide me semble essentiel. Surtout quand elles s'accompagnent d'analyses pertinentes et savantes. Et même dans le cas de la guerre en Ukraine, réfléchir de façon posée sur la question est la meilleure manière de limiter les risques de guerre (le problème étant que nous sommes des centaines de millions en Europe et qu'il faudrait qu'une part significative de cette population ait ce genre de réflexion pour que ça ait un effet tangible).

Citation :Mon boulot m'amène à côtoyer des gamines de 14 ans qui se mettent sur les rails du train suite à du revenge-porn, des parents endeuillés et des enfants qui s'auto-mutilent.

Putain de monde...