[golgo Island] L'oeil Du Crocodile

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D'un coup rageur de sa batte, Martine enfonça la cage thoracique du dernier tigre à dents de sabre; L'animal s'effondra dans un râle de souffrance et Martine fut seule.


Seule dans l'arène de métal du duc de Golgoville. Ses adversaires, membres des autres groupes d'aventuriers qui avaient fui la menace du hamster géant zombie et les innombrables dangers et pièges de la crypte qui s'étendait sous les égouts de la cité avant d'être capturés pour la distraction du duc, étaient tous morts. De même que ses compagnons et les fauves qu'on avait lâché sur eux pour ajouter au spectacle. Les cadavres jonchaient le sol de l'arène.


Martine essuya son front ruisselant de sang et de sueur et ramassa sa casquette rose. Elle était épuisée par le combat qu'elle venait de mener. Tout son corps lui faisait mal. Elle était couverte de plaies et de bosses et ses vêtements avaient été déchirés par les griffes des tigres. Elle revint au centre de l'arène pour lever le regard vers le duc.


Le colosse de trois mètres de haut à la crête iroquoise, bardé de plaques d'armures, la toisait d'un air amusé. La foule sur les gradins s'étaient tue, attendant la décision du maître des lieux.


- Impressionnant jeune fille. Tu tues bien. Je t'offre la faveur de ta liberté pour le divertissement que tu m'as procuré.


Martine resta impassible. Lentement, elle leva la main droite, index et auriculaire brandis dans la direction du monstre. Il fronça les sourcils.


- Cherches-tu à me défier gamine ? Profites de la chance que je t'accorde, elle est précieuse.


- Je n'ai que faire d'une faveur offerte par une brute de ton espèce. Je gagnerai ma liberté moi-même.


Elle brandit sa batte.


- Avec ça s'il le faut ! Envoie encore des fauves.


Les yeux du duc semblaient s'être contractés sous la fureur. Perdant soudain toute contenance, il rugit :


- Très bien, petite impertinente. Mais je ne gaspillerai pas plus de mes animaux de compagnie. J'en finirai moi-même avec toi !


D'un bond puissant, il s'élança et retomba dans l'arène dont les parois d'acier vibrèrent sous l'impact des deux cent cinquante kilos de muscles.




[Image: martine.jpg]

- Meurs sale gamine !


Le poing du duc s'abattit sur Martine qui plongea au sol pour esquiver le coup. Le duc s'était déjà redressé et tenta de l'écraser sous sa botte. Vive comme l'éclair, elle roula sur le côté et bondit sur ses pieds avant de briser les orteils du monstre d'un puissant coup de batte qui lui arracha un cri de douleur.


- Sale petite pute !


La main gigantesque s'abattit à nouveau. Cette fois, Martine échoua à esquiver l'attaque qui l'envoya valdinguer jusqu'à l'autre bout de l'arène où elle heurta violemment un pilier d'acier avant de tomber au sol inconsciente.


Tout était noir. Elle avait les yeux bandés. Elle était au centre de la clairière, sa batte à la main. Elle entendait le bruissement du petit ruisseau et sentait les rayons du soleil qui traversaient la voûte de verdure pour caresser doucement sa peau. Elle se souvenait. La jungle. Devant elle, elle savait la présence d'un piquet de bois au sommet duquel était délicatement posée une balle de baseball. A quelques mètres de là, se tenait le roi-crocodile, assis dans la position du lotus étudiant attentivement l'attitude de celle dont il avait fait sa disciple, ayant finalement perçu en elle le fantastique potentiel qui lui permettrait un jour de l'égaler et même de le surpasser.


- Martine, la batte n'est pas outil que tient ta main. Elle est l'extension de ta main, elle est ta main. Elle est toi et tu es la batte. Tes yeux ne te sont d'aucune utilité. Tu dois projeter ton esprit sur ta cible, la percevoir par delà le voile des apparences trompeuses pour savoir exactement où frapper, avec quelle vitesse, sous quel angle.


- Mais c'est trop difficile maître, pleurnichait Martine.


- Quelle certitude as-tu. Ne te fies pas à ce que tes sens transmettent à ton esprit. Utilise le Concept.


- Le Concept ?


- Le Concept est une énergie qui nous entoure. Il est ici. Là. Entre la roche et le ruisseau, dans les arbres, sous la racine du brin d'herbe, partout. Oui, il est même... entre ta batte et la balle. Tu dois t'imprégner du Concept, tu dois... <i>sentir </i>le Concept te traverser. Apprendre à l'utiliser. Alors tu auras atteint l'ultime niveau de conscience et trouvé ce qui manque à ta formation : la rage de gagner, la niaque. Cette étincelle de hargne dans ton œil que j'avais autrefois. Tu dois trouver... l'Oeil du Crocodile. Avec ça cocotte, t'auras trop la win.


- C'est vrai maître ?


- Non, c'est juste du blabla pour faire cool. C'est la coutume,on m'a appris ça quand j'étais petit. Contente-toi de cogner aussi fort que tu peux, boum. Boum-boum.


Dans un cri de terreur étranglé, Martine revint à elle pour éviter de justesse le pied monstrueux du duc qui s'apprêtait une fois de plus à l'écraser. Ramassant sa batte et se redressant, elle asséna un tel coup sur la jambe du géant que le tibia craqua dans un bruit sinistre. Le duc mugit de douleur mais n'eut pas le temps de tomber à genoux avant que Martine ne détruise le second tibia et ne parachève cette oeuvre de destruction par un coup titanesque dans les parties génitales. Un <i>Ooooooh </i>de douleur compatissant parcourut la foule tandis que le duc, devenu blême, s'effondrait sur le sol.


Martine fit le tour du corps allongé que de faibles soubresauts agitaient encore et abattit sa batte sur la tempe du duc mettant un terme définitif au règne sanglant qui écrasait Golgoville. Les gradins étaient plongés dans un silence respectueux et craintif.


La porte de l'arène s'ouvrit. Tranquillement, sans se presser, Martine prit le temps de saluer le public avant de la franchir.


C'est exactement comme ça que ça s'est passé.


Je remarque cependant qu'il n'est que très vaguement fait mention des malheureux gangstas noirs qui étaient dans l'arène; à croire que les hommes africains n'ont pas marqué ton histoire.