Voilà la bête, soyez indulgents, il y a encore surement des fautes à corriger: mais ce sera sympa de me les signaler. : )
Le récit se passe dans la région de Marienburg, à une époque indéterminée après l'avènement de Sigmar, mais au moins après la prise d'indépendance du Wasteland. Ca parle de magie...entre autre.
Conseil: SI la longueur vous décourage, faites un rapide copier/coller sur Word et imprimez le. Ca se lit plus vite sur le papier.
Le Retour de l'Ombre
CHAPITRE 1
« Allez, debout là-dedans ! »
Un grognement sourd s’éleva de la masse informe enfouie sous les couvertures.
« Allez Karl, dépêche-toi, ton père est prêt à partir. Si tu veux vraiment aller avec lui à la ville il faut te bouger maintenant ! »
Le jeune garçon au cheveux blond allongé dans le lit souleva une paupière et aperçut sa mère qui poussait les contrevents de sa fenêtre, laissant ainsi rentrer dans la chambre la lumière grisâtre d’un matin automnal. Enfin, il se leva, l’esprit encore embrumé par le réveil brusqué.
Sa mère sortit de la chambre, il s’habilla rapidement, prit une vasque d'eau fraîche sur une commode et s'en aspergea la figure, l’eau glaciale acheva de la réveiller.
Karl se rendit alors compte que le Soleil était déjà levé. Et son père qui voulait partir à Marienburg avant l’aube! Ca allait être sa fête…Il sortit de la chambre et descendit l’escalier en bois quatre à quatre, il déboucha dans la cuisine, prit au passage le repas que sa mère lui avait préparé pour le voyage, lança un
« Au’evoir m’man ! » la bouche pleine de pain au miel et sortit de la maison.
Son père l’attendait assis dans la charrette, les rênes à la main. Le père de Karl était un grand homme, à la peau rougit par le soleil et aux cheveux bruns tirant maintenant sur le gris. Il arborait une barbe fournie qui était sa fierté et avait les yeux bleu-gris comme son fils. Karl sauta dans la charrette avant que son père ne lui fasse la moindre remarque à propos de son retard et enfila une cape de voyage d’un noir délavé par les intempéries qu’il prit à l’arrière.
« Désolé pour le retard, papa. »
« Désolé ? Ca oui, tu peux l’être ! Mais c’est auprès de ta mère ce soir que tu pourras être désolé, quand on lui annoncera qu’on est arrivé trop tard et que tout les bœufs étaient déjà vendus! Allez, on y va, sinon on aura même pas le temps d’aller boire un coup au « Bouclier Fendu ». Karl sourit, il aimait bien aller dans cette auberge : On pouvait y entendre des légendes, des histoires de marins, et pleins d’autres contes, même si il y avait parfois des bagarres, et elles étaient rares, l’atmosphère y était à la fête et la bière y était bonne.
Une petite visite au « Bouclier Fendu » était la raison principale pour laquelle Karl accompagnait son père au marché.
La charrette, tirée par le plus beau cheval de la famille, sortit enfin du petit bourg de Kerchenstern. Le village était situé tout près de la côte, à environ quinze lieues au Nord-ouest de Marienburg, entre l’estuaire au fond duquel se trouvait la ville et les montagnes grises. La route sortit d’un petit vallon entre deux collines et la charrette arriva dans la plaine qui s’étendait au bord de la mer. Celle-ci se trouvait à cent mètres à peine et un parfum iodé emplit bientôt les narines de Karl. Le temps était gris ce matin, froid et venteux. L’horizon au Nord était bouchée par des nuages noirs.
« Et bien, tu vois mon bonhomme, je serais pas étonné si on avait une bonne tempête ce soir, vu le ciel. Par Sigmar, faudra pas trop traîner ! Et ta mère qui est seule avec ta petite sœur…J’espère que Jonas les aidera à rentrer les bêtes… »
Karl ferma les yeux, entendant à moitié les grommellements de son père. Il s’assoupit bientôt, le vent sifflant toujours à ses oreilles.
« Karl ! On va arriver. »
« Hein ? Quoi ? »
« Réveilles toi, mon bonhomme, on arrive en ville ! »
Le père de Karl pointait le doigt vers le Sud. Karl regarda dans cette direction, et alors, scintillante sous le soleil, avec ses tours, ses remparts, il la vit. A chaque fois, cela lui faisait le même effet. La ville était toujours aussi impressionnante.
Karl entendit son père murmurer dans un soupir:
« Ah...Marienburg… »
Karl était déjà venu quelques fois dans la ville, mais jamais le jour du Grand Marché.
Pendant les jours précédents, un nombre incroyable de navires marchands étaient venu pour vendre leurs précieuses marchandises, il y en avait de partout, de Tilée, d’Estalie, de Bretonnie, de Barak-Varr, de Norsca et même un grand et beau voilier elfique d’Ulthuan.
Le port de Marienburg n’était plus qu’une forêt de toiles de toutes les couleurs.
A côté du port, se trouvait une grande place où une multitude d’étalages avaient été installés.
Tandis que son père s’adressait à un soldat pour demander son chemin, Karl dévorait des yeux ce spectacle impressionnant, se mettant à rêver de voyage et de terres lointaines, de trésors et de gloire…
La charrette se remit en mouvement, le père de Karl semblait préoccupé. Manifestement, la foule nombreuse n’était pas pour lui plaire, plus il y avait de monde, plus longtemps il mettrait avant de rentrer chez lui.
La vente était enfin terminée, Karl avait crû que cela ne finirait jamais, un marchand Tiléen avait fait des siennes et son père avait discuté du prix de légumes pendant une heure !
Il n’arrivait vraiment pas à comprendre comment son père pouvait supporter ça...Pendant toute la journée il n’avait eu qu’une envie, partir se balader dans la foule.
« Alors, papa ? Je peux y aller maintenant ? » La question avait été posée environ cinquante fois depuis le matin.
Le père de Karl soupira et s’assit sur une caisse de choux.
« Oui, vas-y, vas vadrouiller bonhomme ! On se retrouve au Bouclier Fendu dans une heure. Je m’occuperai de ranger ça tout seul. »
Il désigna la dizaine de cageots à ses pieds, mais Karl ne l’écoutait déjà plus.
Il s’engageât dans une rue perpendiculaire au port et commença à examiner les échoppes,
La rue large dans laquelle il se trouvait était certainement celle des forgerons. Une fumée dense sortait de plusieurs cheminées emplissant l’air d’une fine brume piquante et le bruit des marteaux agressait les oreilles des passants. Karl se dépêcha d’avancer, arrivant à une intersection, il prit à gauche dans une petite ruelle conduisant à une autre grande rue, puis il tourna à droite, puis à gauche…au bout d’une heure de promenade, Karl était arrivé dans une partie de la ville qu’il ne reconnaissait pas. Le soleil était tombé depuis peu de temps et seul une faible lumière bleuâtre éclairait maintenant les rues vides.
Soudain, Karl vit la taverne, il entra sans hésitation, s’installa à une table en attendant son père. Mais l’aspect de la taverne ne lui revenait pas. Il courut jusqu’à l’entrée…et s’aperçut que ce n’était pas le Bouclier Fendu, il avait mal vu l’enseigne dans la pénombre et s’était trompé. Karl gémit de dépit, la panique commençant à l’envahir.
Il fallait se rendre à l’évidence : il était bel et bien perdu.
« Vous allez bien, jeune homme ? »
Karl se retourna, un homme en cape noir et en bas bleus lui faisait face.
« Euh, oui,oui, merci, ça va. Euh, pourriez vous m’indiquer la direction du Bouclier Fendu, s’il vous plait ? »
L’homme sourit, dévoilant ses dents jaunâtres.
« Je vais vous y conduire si vous voulez, c’est ma direction. »
« Merci beaucoup, monsieur. Je ne connais pas très bien la ville et je crois m’être égaré, vôtre aide est la bienvenue. »
L’homme se dirigea vers une rue, Karl le suivit.
« …Vous semblez bien instruit, jeune homme, d’après votre langage. »
« Et bien, en fait mon père m’a éduqué lui même, il était sergent dans l’armée autrefois. »
Karl laissa là la discussion, l’homme ne lui plaisait pas, son aspect, son ton amical n’étaient pas naturels.
L’homme le conduisit dans une partie de la ville que Karl connaissait et il ne tarda pas à retrouver ses repères. Il réalisa soudain que l’homme ne le conduisait pas à la taverne, il semblait même s’en éloigner. L’homme s’engageât alors dans une ruelle, le jeune garçon le suivit sur quelques pas, puis s’arrêta.
« Monsieur, ce n’est pas le chemin du Boucl, Humpff ! »
L’homme venait de le bâillonné de sa large main. Karl jeta des regards frénétiques de tous les côtés mais il n’y avait personne. L'homme le tenait d'une poigne de fer.
« Tais-toi, morveux ! Alors le prince, t'a failli nous échapper, hein? Mais je t'ai reconnu moi! Tu pensais vraiment qu'on aller te laisser nous filer sous le nez comme ça? Avance maintenant, Cadavo nous attend.»
L'homme ne sembla pas remarquer l'expression de stupéfaction de Karl, qui continuait à se débattre. Il ne comprenait plus rien, pour qui l'homme en cape noir l'avait il pris? Il ne savait pas. Et qui était ce Cadavo dont il parlait? Toutes ces questions se bousculaient dans l'esprit du jeune homme et l'empêchaient.
« Mais tu va arrêter de bouger, oui ?»L’homme sortit une rapière de dessous sa cape et en menaça le garçon. Karl sentit ses jambes défaillir à la vue de la lame. La tête lui tournait. L'homme lui banda les yeux et Karl ne vit plus rien.
Karl avançait à tâtons, sentant la pointe de l’épée de l’homme dans son dos, il était terrifié…L’homme lui prit le bras pour le faire s’arrêter.
« Tu bouge, tu crie, t’es mort. Compris ? »
Il approuva de la tête et écouta, l’homme frappa à une porte, celle-ci s’ouvrit en grinçant et l’homme à la cape noire s’adressa à quelqu’un.
« ! Je l’ai trouvé ! Regardez! »
Une voix grave et autoritaire lui répondit :
« Voyons voir...hein? Mais qu’est ce que tu raconte, bougre de crétin d’abruti ! Ce n’est pas lui !! Tu t’es trompé ! »
Le kidnappeur de Karl sembla suffoquer.
« Qu…quoi ? Comment m’a tu appelé ? C’est moi qui sors dehors pour chercher le gamin, c’est moi qui fait le sale boulot ! Toi tu reste bien au chaud à l’intérieur à boire et à t’amuser, et tout ce que tu trouve à me dire, c’est ça ?? »
« Mais, par Sigmar, Antoine, arrête de hurler ! Ca va pas ? Tu veux qu’on nous repère, c’est ça ? Ce n’est pas ma faute si tu n’est pas capable de retrouver le petit morveux ! »
« Bon, de toute façon, on ne peut plus attendre maintenant, la Dame avait dit que l'on devait se faire discrets cette nuit...Alors finissons en, tuons ce gamin et partons... "
Karl n'arrivait plus à penser, le monde réel lui apparaissait plus distant comme si ce qui lui arrivait était le destin d'un autre, les mots de l'homme raisonnaient dans sa tête et venaient se superposer à une succession d'images et de souvenirs: des visages tendres, des rires, la douceur du foyer, le vent marin sur sa figure...La voix de l'homme à la rapière parvint aux oreilles de Karl...
"Adieu, gam...Surgl!".
Antoine avait rapproché son épée de la gorge du garçon, mais Karl sentit alors la pression de la main de l’homme sur ses épaules se relâcher, puis il entendit l’homme tomber à terre;dans le même temps, Cadavo avait poussé un autre juron et avait sorti son épée. Quelqu’un ramena Karl en arrière, le jeune garçon trébucha et tomba lourdement sur le dos, un sifflement aigu lui indiqua qu’un coup d’épée venait de le frôler. Karl retrouva dès lors tous ses moyens. Il s’attendait à recevoir une autre attaque, mais le bruit du choc des armes retentit alors, tandis que l'espoir renaissait dans son cœur. Il n'était pas mort. Le garçon venait de réaliser que quelqu’un était venu l’aider, et apparemment, il ne s’en sortait pas mal. Maintenant libre de ses mains, Karl retira le chiffon qui était devant ses yeux, juste à temps pour voir Cadavo se faire perforer le ventre par son mystérieux sauveteur. Cadavo poussa un cri étranglé et se raidit, son épée tomba à terre dans un grand bruit métallique.
Karl se laissa aller contre le mur derrière lui : il était épuisé…la sueur, malgré le froid naissant, coulait à grosse gouttes sur son front. Tout était aller si vite...
L’homme qui venait de tuer Cadavo, approcha du garçon tout en essuyant son épée à un pan de sa cape.
Karl pu alors observer ses traits. L’homme était grand, les épaules larges. Il portait une chemise blanche en lin fin sous une veste de cuir souple teinte en noir, ainsi qu’un tricorne sombre. L’homme se baissa vers Karl en lui tendant la main, passant un instant à la lumière d’une lune encore basse, dévoilant ainsi un visage barbu, est une peau ridé.
Le jeune garçon saisit la main de l’homme et le remis sur pieds.
« Ca va, petit ? Je sais pas si tu sais, mais c’est deux gaillards ne sont pas vraiment des gens fréquentables pour quelqu’un comme toi... Où sont tes parents ? Tu vis ici ? »
« Je, euh, mon père m’attends au Bouclier Fendu, je connais le chemin…mais en fait on est venu en ville pour le Grand Marché. »
L’homme barbu fit un signe de tête affirmatif, tout en regardant le garçon avec intérêt de derrière ses petits yeux plissés.
« Dis moi, comment s’appelle ton père, mon bonhomme ? »
« Johann ».
« Allons bon ! Johann Baker ? » Karl fit oui de la tête. « Ca alors ! Ce bon vieux Johann ! Il ne t’a jamais parlé d’un certain Resk Finrar ? Non ? Bah, finalement, ça ne m’étonne pas tant que ça. Ton père, c’est quelqu’un de franchement honnête, alors que moi… Bon, et bien je suppose que je vais t’accompagner pour expliquer à ton père, ce qui c’est passé, non ? En tout cas, on ferait mieux de filer maintenant, si une patrouille trouve ses deux là et moi à côté, …enfin, tu vois le tableau d’ici ! »
Karl sourit, la voix grave de Resk et son ton chaleureux lui redonnait confiance, et en plus il connaissait son père. Tout allait bien se passait…
Le gros barbu se redressa et se dirigea vers la sortie de la ruelle, Karl le rattrapa et tout deux s’en allèrent vers l’auberge.
La taverne apparaissait dans la nuit comme un havre de lumière et de gaieté dans l’obscurité de la rue. On entendait d’ici, les chants et les rires des marins en escale pour le Grand Marché et venus noyer une bonne partie de leur paye dans la bière et les jeux. Ce soir là, une troupe de nains de Barak-Varr particulièrement éméchée avait improvisé un petit orchestre s’accordant parfaitement avec les chansons à boire reprises en cœur par toute l’assemblée.
Lorsqu’il entrèrent, le père de Karl se leva et accouru vers son fils, pestant de colère, ses jurons furent heureusement couverts par le bruit ambiant.
« Mais nom de nom, où était tu passé ? Voilà une heure que je t’attends, et la nuit qui est tombé, j’étais mort d’inquiétude ! Tu n’as pas idée des dangers qui rôdent dans les rues la nuit. »
« Oh si, il a idée , et même plus qu’il ne lui en faut, à mon avis. » Resk venait de passer la porte et vint se placer à côté de Karl. Johann porta son regard vers lui.
« Resk !? Toi, ici !? »
« Oui, et ton fils peut remercier Sigmar que je me sois trouver dans les parages ! Mais posons nous d’abord quelque part, une retrouvaille d’anciens camarades, ça se fête ! » Resk héla le tenancier : « Barman, j’offre une tournée générale ! » La déclaration fut suivie d’une multitude de cris d’approbation et les chants et les rires reprirent de plus belle.
Resk, Johann et Karl allèrent s’asseoir un peu à l’écart de l’assemblée de façon à pouvoir parler sans crier. Une fois qu’ils furent installés et qu’une serveuse de forte corpulence leur ait servi trois bières bien fraîches, Johann prit la parole, ses yeux fixant tour à tour les deux autres.
« Bon, et maintenant, j’aimerais avoir quelques explications. »
Resk toussota.
« Hum. Eh bien, voilà :tu sais, Johann aujourd’hui, y a eu le Grand Marché, alors les dockers, ils avaient du boulot pour moi. Donc j’ai bossé jusqu’au soir, j’ai pris ma paye et j’suis parti vers la vieille ville pour trouver une taverne digne de ce nom, tu sais, pas comme celles qu’on trouve dans le quartier marchand où on te sert de la pisse de porc, pire que l’eau du port si tu veux mon avis, mais je connais une bo… » Johann fronçait les sourcils et le jeu de mot ne semblait pas le dérider. Resk reprit :« Euh, d’accord, j’fais court. Bref, je me dirigeais vers le « Vers des Mers » quand j’ai vu une vieille connaissance au coin d’une ruelle, ouais, j’te dis, ni plus ni moins que ce rat de Cadavo ! Je l’avais déjà vu à plusieurs reprises et la dernière fois, on était sur la même caravelle et il avait voulu me faire les poches et me faire passer par dessus bord. Forcé, je m’étais défendu mais j’avais quand même dû rentrer vers la côte à la nage, sans mon épée et sans ma paye !
Alors, bon voilà, je vois Cadavo au coin de la ruelle avec un autre gars qui tient un gamin avec la pointe de son rasoir.
Tu me corriges si j’me trompe, mon petit, mais j’suis sûr qu’ils te voulaient pas forcément du bien, non ? » Karl approuva. « Ouais, alors donc mon sang fait qu’un tour, je sors mon épée et j’me précipite sur eux. Je tue Cadavo et son pote, je relève le petit et, oh surprise ! C’est le fils de mon ancien camarade Johann ! Alors, j’me suis dit que c’était l’occasion de voir comment allait le sergent. J’ai conduit ton fiston ici et me voilà… Mais au fait, petit, comment ca se fait que t’étais avec ces deux fils de…enfin ces deux pirates ?»
Karl mis un petit moment à se rendre compte que l’on s’adressait à lui. La transition entre le danger et la gaieté de la taverne avait été si brusque qu’il n’arrivait pas à croire qu’il avait failli mourir et que deux hommes étaient mort sous ses yeux. Il avait le regard dans le vague et observait distraitement l’orchestre des Nains.
« Eh oh, bonhomme, réponds voyons ! »
« Hein ? Euh oui, oui. Eh bien, je me suis trompé de rue sur le chemin de l’auberge. J’étais perdu, j’ai demandé mon chemin… » Karl ne voulait pas avouer qu’il s’était laissé aborder par un inconnu ; hormis ce détail, il raconta tout ce qui s’était passé de son point de vue. Johann et Resk l’écoutaient avec attention.
Après son récit, Resk et Johann échangèrent des souvenirs du « bon vieux temps », c’est à dire, du point de vue de Resk, avant le mariage de Johann. Ils discutèrent de leur vie de tous les jours, que le monde est petit, que le temps passe vite, que la bière n’est plus aussi bonne qu’autrefois, etc.
Karl était épuisé et commençait à somnoler, l’assemblée s’était un peu calmée et les chansons avaient laissé place à des ronflements épars et aux beuglements de quelques marins qui se trouvaient dans un état d’ébriété avancé.
Johann se leva :
« Bon, et bien Resk, j’ai été ravi de te voir ce soir, même plus que tu ne le pense d’ailleurs ! »
« Ouais, allez, je vois que ton bonhomme est fatigué…Je dois rentrer au navire avant la deuxième heure de la nuit. Salut ! Et tu diras bonjour de ma part à ta femme ! A plus, petiot !
J’espère que tu seras plus frais la prochaine fois que je te rencontrerai ! »
« Adieu, Resk ! »
Resk sortit de la taverne.
Johann alla payer le barman avec les sous que Resk lui avait laissés et sortit à son tour en compagnie de Karl.
Au dehors, le temps avait changé pendant leur conversation. Surpris par le froid, Karl frissonna et rentra sa tête dans ces épaules, il sentit un contact froid sur sa figure : La pluie tombait dru, le vent soufflait fort et tourbillonnait dans la rue étroite, hurlant aux oreilles des passants.
« Alors bonhomme, j’te l’avais pas dit ce matin qu’on aller prendre une saucée ? Ta mère doit être morte d’inquiétude."
Karl et son père furent trempés avant d’atteindre la charrette. Johann paya le pauvre garçon au vêtement mouillés qui devait garder un œil sur les chevaux, monta et saisit les rênes, Karl s’installa à côté de lui, s’emmitouflant comme il pouvait sous les capes de voyage pour se protéger de la pluie.
Un garde les escorta jusqu’à la porte Nord de la ville. Johann connaissait le capitaine en faction et il avait accepté de lui fournir une petite escorte pour le retour: Avoir été sergent avait ses utilités.
En effet, le capitaine Schlimpffen les attendait à la porte avec quatre cavaliers armés de lance et portant tous une arbalète sur le côté de leurs monture. Vu le temps qu’il faisait ce soir, des pistolets auraient été inutiles. Ils étaient habillés de capes sombres les enveloppant de la tête au pied et portaient des torches allumées qui menaçaient de s’éteindre à chaque rafale de vent et jetaient des ombres mouvantes sur les murs du corps de garde.
« Heureux de vous voir, mon sergent. Comment vous portait vous ? » s’enquit le capitaine.
« Bonsoir, capitaine ! Eh bien, pour vous répondre franchement, je me porterai mieux quand je serai de retour chez moi au chaud…et au sec ! Et je pense que vous et vos hommes ne doivent pas en penser moins, n’est ce pas ? »
Schlimpffen sourit. « Alors, allons y, pendant que nos torches peuvent nous éclairer un peu. »
Le petit convoie se mit en marche et passa les portes de l’énorme corps de garde.
Au début du voyage, Johann et le capitaine discutaient un peu de la récente recrue d’activité des gobelins dans le Pays Perdu, mais la puissance du vent les découragea bientôt de poursuivre un dialogue sans crier pour se faire entendre. Au bout d’une heure de voyage, plus personne ne parlait, chacun se contentant de se protéger de la tempête et du froid mordant qui s’était installé depuis la tombée de la nuit. La pluie ne faiblissait pas et fouettait la moindre parcelle de peau découverte. Bientôt, les chevaux montrèrent des signes de faiblesse, leurs pattes ruisselantes tremblaient sous la pluie glaciale.
Karl ne voyait plus la route sous lui, il ne voyait plus rien en dehors de la lampe-tempête accrochée à la charrette à côté de son père. Il était trempé jusqu’aux os et tremblait de tous ses membres. Une forte envie de dormir s’empara alors de lui et il se laissa sombrer dans le doux réconfort du sommeil.
Karl rêve…Ce soir là, l’air est chaud et sec dans la cité, un vent fort souffle du désert tout proche, recouvrant toute chose d'une fine couche de sable. Karl marche sur une allée pavée de pierre lisse aux teintes chaudes. La nuit tombe, il est seul. Devant lui, se dresse un temple majestueux, soutenu de hautes colonnes gravées de glyphes sacrés. Karl les connaît par cœur. Les portes d’ébène et d’ivoire richement sculptées sont gardées par deux imposantes statues, de grands guerriers à têtes de chacals, armés de grandes lames courbes aux reflets dorés, menaçants et inoffensifs protecteurs de la demeure des dieux…Karl se dirige vers le temple, il tient dans ses mains un long sceptre noir, tel un serpent dressé, prêt à l'attaque. Karl se rapproche des portes. Le temple devient flou, sa vue s’obscurcit…
Un cri de terreur réveille Karl en sursaut. Il s’agite mais la main de son père le retient et l’empêche de tomber de la charrette, Karl se tourne vers son père, son visage exprime la crainte et la peur. Le jeune homme lui murmure dans un souffle :« Q’est ce que c’était ? »
« Je ne sais pas, Karl…Reste là, surtout ne bouge pas… »
La charrette était arrêtée. Karl s’aperçut alors que la pluie ne tombait plus, la tempête avait passée. Pourtant, au loin, des lueurs soudaines indiquaient la violence des orages. Ils étaient comme dans une sorte de bulle, où le temps n’avait plus court. La perception des choses lui semblait plus nette, Karl pouvaient maintenant entendre des cris étouffés, le souffle des chevaux, les battements de son cœur et au loin, dans le lointain, des voix dures, cassantes, dont l’accent agressait ses oreilles.
Karl ne voyait plus les cavaliers, ils étaient partis…
« Où est Schlimpffen, papa ? »
« Il est parti voir ce qu’il se passe, là-bas…Il devrait bientôt revenir. »
Quelques instants plus tard, un des cavaliers revint au galop.
« Des pirates, mon sergent. Des corsaires elfes ! Ils sont près de la plage, Schlimpffen croît qu’il vont attaqué le village. Un de nos cavaliers y est parti, mais il devrait déjà être de retour, on doit déjà se battre là-bas… »
Le cœur de Karl s’arrêta de battre pendant une seconde. La vision de son foyer brûlé, sa famille tuée…Le jeune homme se retint au bord de la charrette de peur de s’évanouir, il se tourna vers son père. Johann était resté de marbre, comme si la nouvelle ne l’avait pas heurté, mais on fond de ses yeux, Karl pouvait lire une détresse et une rage qu’aucun homme ne pourrait arrêtait. Son père prit la parole.
« Rappelle le capitaine, soldat. Dis lui de foncer au village, je viens avec vous. Quant à toi, Karl, tu vas me promettre de rester ici jusqu’à ce que…jusqu’à ce que je revienne…d’accord ? …Si nous ne revenons pas, prends un des chevaux, Gaer est le meilleur, et fonce vers Marienburg pour avertir l’armée. Demande à parler au capitaine Vannerhand, et dis bien que tu viens de ma part. D’accord ? Tu as compris Karl? Allez, soit fort, mon fils ! » Karl sentait ses jambes trembloter, il acquiesça de la tête, tentant d’assimiler toutes les choses que lui disait son père, il n’arrivait pas à parler, sa gorge était nouée. Son père prit le cheval de rechange de la charrette et partit avec le cavalier plus en amont sur la route, ils contournèrent l’épaulement d’une colline et Karl les perdit de vue dans l’obscurité.
Peu après, Karl vit des flammes s’élever de derrière une colline, c’était le village, des cris de douleur et de peur retentirent…Le jeune homme n’arrivait pas à se concentrer sur autre chose que sur les cris. Il n’y tint plus. Il prit les rênes de la charrette et se mit en marche vers le village, il allait sauver les habitants des griffes des pirates…
Peu à peu, le chariot prit de la vitesse, Karl ne voyait pas la route, mais il connaissait ses courbures par cœur et il arriva bientôt à l’entrée du village. Un groupe de guerriers aux armures noires et portant d’étranges capes se tenaient à une dizaine de mètres de lui, Karl fouetta les chevaux et chargea dans le tas. Les elfes tentèrent de s’écarter, mais ils se génèrent entre-eux: une demi-douzaine de corsaires furent piétinés et renversés. Les chevaux hennirent de peur, la charrette continua sa folle avancée. Karl ne voyait plus que des formes mouvantes tuant et se faisant tuées, les flammes des maisons jetant sur ce sinistre spectacle une lumière infernale. Soudain, un chevalier sur un étrange monstre reptilien, entra dans le champ de vision de Karl, les chevaux prirent peur et se cabrèrent, le cavalier tenta de s’arrêter mais il ne pu éviter le choc, il fut renversé. Les chevaux s’écroulèrent et Karl tomba de la charrette face contre terre. Quelques secondes plus tard, une gantelet de métal le saisit par la nuque et le releva. Le chevalier lui faisait face et éleva Karl au dessus de lui, le tenant à la gorge d’une seule main. . Karl ouvrit les yeux et son regard plongea dans celui de l'elfe, dont les yeux semblaient flamboyer à la lueur des flammes. Le jeune homme comprit alors deux choses, d'abord que l'être qui se trouvait en face de lui tuait pour le plaisir d'ôter la vie et ensuite que c'était de ses mains qu'il allait mourir. L’elfe s’adressa à lui dans la langue de l’Empire.
« Insensé ! Comment as tu osé t’en prendre à moi? Comment as tu pu ? » Karl essaya de s’échapper, mais l’elfe le tenait d’une poigne effroyable. Il ricana. Le ton de sa voix fit frissonner le jeune homme.
« Oh non, ne t’en fais pas mortel, tu ne vas pas mourir aujourd’hui, tu vas venir avec nous et je m’arrangerai pour que ta mort soit la plus lente possible. Jusqu’à ce que tu me supplie de mettre fin à ta pitoyable existence. Alors tu connai… »
Le chevalier interrompit sa phrase et repoussa Karl à terre, l’elfe sorti sa lame effilée en un éclair et contra juste à temps une attaque dirigeait contre lui par un soldat. Tout en tentant de parer la riposte du chevalier, l’homme cria à Karl.
« Fuis, Karl ! Le village est perdu ! Va à Marienburg ! Alerte l’armée ! Ton père et ta famille ont été capturés ! Fuis tant que tu le peux! »
Une série d’attaques vicieuses forcèrent l’homme à s’éloigner de Karl.
Le jeune homme perdit de vue le soldat et le chevalier et commenca à courir vers la forêt bordant le village, dans l’espoir d’échapper à l’attention des corsaires.
Alors qu'il passait sous l'ombre des premières branches, un carreau vint se ficher dans le tronc d'un arbre, juste à côté de Karl. Le garçon s'enfonçait dans les bois, courrant et trébuchant dans l'obscurité totale des sous-bois.
..........................
Le chevalier décapita le soldat, puis porta son regard vers le garçon.
"Il se dirige vers la forêt...stupide mortel...Toi, vite ton arbalète!" L'elfe s'était tourné vers un des pirates, le guerrier lui tendit l'arbalète. Le chevalier la prit et visa le jeune garçon; l'elfe retint son souffle et pressa la détente, le carreau parti mais le tir sembla dévier au dernier moment.
Le chevalier poussa un cri de rage et se tourna vers le guerrier à ses côtés: "Raaahh! Lancez les ombres à ses trousses! Je le veux vivant! Il ne dois pas s'échapper!"
"Que fait-on des autres prisonniers, Monseigneur?"
"Laissez en échapper un sur vingt, des blessées et des enfants...J'ai mes ordres. Emmenez les autres au navire, tuez les autres infirmes inutiles...
Karl avançait aussi vite que le lui permettait ses jambes et le terrain. Des racines noueuses et des ronces surgissaient à l’improviste sous ses pieds, le faisant trébucher souvent. Ses membres étaient douloureux, il était à bout de souffle, mais poussé par la peur d’être rattrapé et de mourir, il avançait toujours, jusqu’à ce qu’il tomba et que son corps refusa de se relever… Le jeune homme, épuisé, risqua un coup d’œil en arrière. L’obscurité était totale. Karl tenta de calmer son pouls résonnant dans ses oreilles et écouta. Il n’y avait pas un bruit, pas un frôlement, pas une branche ne craquait, pas une feuille ne bruissait…A ce moment, la lumière pale d’une demi-lune perça l’épais manteau de feuillage et Karl distingua alors des formes plus sombres à quelques distances qui se mouvaient avec rapidité et discrétion. Une vague de panique l’envahit. Il était découvert ! Ils l’avaient suivi! Karl se sentit comme paralysé, il voulait bouger, mais son corps semblait refuser l'effort.
A cet instant, Le jeune homme entendit une voix s’adresser à lui :
« Court Karl, vers la gauche, allez petit, court ! »
Karl obéit, se sentant envahie d’une énergie nouvelle. Les ombres derrière lui accélérèrent leur course. La voix continua de le guider:
« Bien, à droite maintenant. Oui... attention ! La branche ! Baisse toi ! Le jeune homme n'y voyait rien, son corps le faisait souffrir atrocement, mais il ne s'en souciait pas, autour de lui, il entendait des bruits de course, le sifflement de carreaux qui passaient au-dessus de sa tête et allaient se ficher dans les troncs des serrés de la forêt.
Attention, saute maintenant, vas y ! »
Karl sauta, il ne sentit pas le sol sous ses pieds mais son corps s’enfonça dans quelque chose de glacial. De l’eau ! il était dans une mare qui s’était formée dans une petite dépression.
« Avance à gauche, Karl ! A gauche ! …Stop ! Ne bouge plus ! Ton souffle ! Vite, sous l’eau !»
Karl n’hésita pas. Il ne savait pas d’où venait cette voix, mais quelque chose en elle, peut-être son ton ferme et serein, comme celle d’un vieux professeur à son élève, l’avait poussé à la suivre. Le jeune homme essaya de retenir sa respiration le plus longtemps possible.
Au dessus de lui, les ombres passèrent mais ne le virent pas, l’une d’elle s’approcha de la mare, puis enfin, s’éloigna …
« C’est bon, tu peux sortir de l’eau maintenant…Avance, la rive est tout droit. Il y a une branche pour te hisser. »
Karl ne pensait plus, il n’était plus que le jouet de la voix, mais il en valait bien mieux ainsi, car elle l’empêchait de céder à la panique. Le jeune homme se hissa sur la berge, il s’allongea dans l’herbe molle et, insouciant des dangers qui l’environnaient, sombra dans un sommeil profond, mais serein, permettant à son corps meurtri et à son âme troublée de récupérer.
Quand Karl ouvrit les yeux, un plafond de poutres de bois lui fit face. Le jour semblait levé et une lumière claire et fraîche baignait son visage ensommeillé. Karl s’attendit à entendre le son des cris de sa sœur au rez-de-chaussée, puis la voix de sa mère l’appelant pour le petit déjeuner, le son de ses pas dans l’escalier de bois…Mais le jeune homme jeta un coup d’œil autour de lui, une vague de désespoir l’emplit alors, tandis que les événements de la nuit passée lui revenaient en mémoire avec une horrible précision. Pendant un moment, Karl pleura en silence, maudissant le destin qui était le sien. Une envie d’oublier, de se délester de sa peine s’emparant de lui. Le jeune homme se souvint alors des paroles de son père. « Soit fort, mon fils… » Il fallait qu’il soit fort, qu’il cesse de pleurer, mais Karl ne pouvait pas, il n’y arrivait pas…La voix revint alors en lui et l’apaisa.
« Dors et oublies, Karl…Ne pense plus, tu es en sécurité…Dors jusqu’à mon retour…et oublies tes sombres pensées… »
Karl senti sa peine s’estomper. Il ferma les yeux et le sommeil l’envahit de nouveau. Il se laissa porté alors par le lent cours d’un fleuve de songes, se noyant doucement dans ses rêves bienheureux…
……………..
Karl avance vers le temple. Au dedans, il sait que la mort l’attend peut-être. Hekemre l’a prévenu, le temple est bien gardé. Karl n’est plus qu’à une quinzaine de mètre des portes.
Soudain, les statues de pierre bougent, quittent leur socle et viennent se placer entre lui et les portes. Karl brandit le sceptre, les statues semblent hésiter…Le temple, à nouveau, devient flou.
« Karl, revient à moi, quitte tes songes, laisse les, revient à moi…Je suis revenu…»
Karl ouvrit les yeux, il sentait encore le vent chaud du désert sur sa figure une seconde auparavant. Le passage brusque du rêve à la réalité le déstabilisa, il resta quelques secondes à réfléchir, tentant de mettre de l’ordre dans son esprit. Enfin, il regarda à sa gauche, un mur de bois avec une fenêtre, puis à sa droite, un tabouret avec une tasse fumante posée dessus, plus loin dans la petite chambre, un feu de bois dans une cheminée de pierre grise. Une table en bois brute, deux chaises de même aspect. Puis son regard vint au vieil homme qui se tenait assit aux pieds du lit. La lumière du Soleil de la fin de matinée tombait sur son visage et le faisait ressortir sur le reste de la pièce, plus sombre. La première chose que Karl remarqua fut son regard. Les yeux du vieil homme, derrière ses paupières un peu bridées, en disaient plus long sur lui qu’une vie passé en sa compagnie. Ils reflétaient la bienveillance mais aussi la sagesse et le savoir qu’apporte les années. L’homme avait le teint halé et la peau ridée, ses cheveux ,longs et d’un gris de cendres, descendaient en cascade sur ses épaules, il portait une robe gris bleu à laquelle le soleil donnait des reflets argentés. Le col de la robe se dissimulant sous une barbe mi-longue que le vieillard lissait machinalement.
Karl, après avoir examiné le personnage, lui dit enfin :
« Qui êtes-vous ? »
«L’homme sourit, plissant les yeux.
« Je me nomme Ulghuran, bienvenue dans mon humble demeure, Karl de Kerchenstern. »
Si vous voulez que je psotes des passages plus longs ou plus courts...DItes le moi. ; )