@KDJE : je lis ta critique et ensuite je réponds.
Edit : J'ai lu, j'ai vu, et ma foi, ça me fais plaisir de voir une telle critique pour changer. (Les baffes après, je vous prie. chacun son tour.) On va faire dans l'ordre.
Citation :C'est du au mélange sexe et mobilité sociale. Damas n'aimait pas qu'une femme, il aimait une héritière sertie dans un palais normalement inaccessible.
Exact. Même s'il ne le sait pas encore, Damas est "amoureux" autant pour la fille que pour ce qu'elle représente. Il n'y a qu'une fille de gouverneur. denrée rare, chère, et prestigieuse. Sa romance, secret de polichinel, est d'autant plus un apport pour lui, qu'il est certain d'un amour en retour. Quel crétin.
Citation :Damas est un nigaud, avec les femmes. Tu l'écris ainsi, donc rien à dire
Tellement évident.
Citation :Pour ma part, le flash-back m'est apparu un tantinet baclé, transition trop brutale entre le bouge pénitenciaire et l'apparent boudoir au luxe inimaginable, même pour un officier au statut envié dans une société hyper-militarisée. Défaillance de description, mais également choix du vocabulaire : "sang-bleu" vaut dans l'univers carcéral, le terme distingue bien Damas des autres légionnaires d'extraction moins originale et résume à loisir le point de vue que doit prendre le lecteur, cadre le décor avec cet anachronique guindé au centre, fume-cigarette parmi les gitanes maïs ; Sang-bleu heurte dans le boudoir.
Alicia est aussi une sang-bleue. La différenciation alors ne s'applique plus et c'est l'auteur qui prête le flanc de sa scène. Penses-y lors d'éventuels prochains flash-backs. Même en tendant comme tu le fais vers une écriture cinématographique, surtout même, ce qui est esquissé doit être ciselé, participatif. Si tu dis sang-bleu plutôt que port altier, le lecteur fait du comparatif (et cherche la bonne).
L'aspect de transition violente était recherché. Passer du camp au boudoir avait pour but de choquer, de réveiller l'attention du lecteur. On ne s'attend pas à ça, ce qui est généralement le but du flsh back, dont je me servirai à longueur de ce texte comme élément narratif servant à dévoiler petit à petit un fil rouge pas toujours évident.
En revanche, tu fais mouche sur la terminologie utilisée. Après relecture, j'ai effectivement une terminologie inadaptée. J'écris un passage qui se veut intime, lointain et privilégié en réutilisant certaines bribes qui auraient du rester cantonner au camp de la légion. Il va falloir que je reprenne sérieusement cela.
Citation :Réflexion plus personnelle, sans doute plus empreinte de mon expérience avec les femmes de l'Imperium (l'épopée contre-impériale changerait n'importe quel homme),
De quelle épopée contre-impériale parles-tu?
Citation :l'approche psychologique d'Alicia cadre relativement mal avec son rang et ses sentiments : même si Damas n'est pas pour elle qu'un plan-baise, même si sa décision romantique va à l'encontre des principes de sauvegarde, et de contrôle, de la classe nobilière de Nocturnus (ici très bien vus et amenés par l'auteur, replaçant habilement la hiérarchie qui sépare le guerrier de la politique), une expression si spontanée, de la part d'une noble conditionnée dès l'enfance à contrôler son affect, témoigne mal de ce conditionnement donc de sa condition et de ce qu'elle éprouve véritablement.
Se lacher ainsi, même dans le cadre privé, le pubis encore humide, est une déclaration de guerre, de la part d'une des personnes les plus puissantes de Nocturnus envers un coeur tendre "qui a cru à la vierge" (comme on dit dans ch'Nord).
Là en revanche, je ne suis pas d'accord avec toi. Le personnage d'Alicia est tiré de... comment dire... d'une personne tout ce qu'il y a de plus réel, hélas. Un modèle de cuillère en argent placée dans la bouche d'une personne capricieuse, hargneuse, un brin manipulatrice avec un pointe d'arrogance et une grosse louchée de mépris.
La couleur a d'ailleurs été annoncée dans le prologue :
"alors que ses pairs la voyait comme une enfant capricieuse, changeant d’amants au gré de ses caprices."
Des caprices, à la limite de l'hystérie, quand l'imprévu trouble ses habitudes altières (Je vais reprendre ton terme que je trouve particulièrement bien adapté.)
Il est ainsi tout à fait plausible qu'elle laisse sa fureur éclater. Après tout, qu'est ce que ce petit con de militaire peut bien comprendre de sa grandeur, à son titre! Ce n'est qu'un jouet, et un jouet n'a pas le droit de nuire à quelqu'un de son rang. Hop, direction poubelle! A moins qu'il y ait encore un moyen de s'amuser avec...
Citation :Ou Damas est très c..., ou véritablement l'amour le rend aveugle
Les deux.
Citation :mais dans les deux cas tu te dois de contre-balancer ça par quelque chose, car le lecteur peine, remarque ça dépend visiblement de son age mais, à s'incarner dans un officier véritable (il témoigne de qualités indépendantes de sa naissance) ainsi c... ou aveuglé par une fille à papa dont tu n'as même pas pris le soin de décrire précisément les formes, les habitudes, les fantaisies.
Oui, c'est vrai que je n'ais pas pris la peine de la décrire. D'ailleurs ce n'était même pas volontaire. Mhhhh... Il va falloir y remédier dans un prochain flash back.
Citation :Bref, c'est écrit convenablement, c'est fluide, mais cette pétasse (puisque tu en confirmes la relation avec le corps du récit) ne vaut toujours pas le prix d'une telle relégation (ie, un mec prêt à déserter la GI ne devrait penser qu'à s'évader de la LP).
Merci. Pour la pétasse, il faut aussi se mettre à la place de notre cher Damas. tout est question de point de vue, mais la guerre forge souvent un caractère différent de celui que l'on croyait posséder. Je n'en ai pas fini, ni avec l'un, ni avec" l'autre."
* * *
Il craquait. Damas craquait. Les sentiments de terreur et d’épuisements se disputaient le noble déchu, dont les larmes roulaient le long de son visage. Rien ne subsistait de l’arrogance et de la suffisance dont le sang-bleu s’enorgueillait lorsqu’il dirigeait ses hommes sur Nocturnus ; non, rien ne subsistait de sa splendeur inutile face à la guerre totale, celle qui avalait hommes et machines sans distinction aucune, celle qui se nourrissait du sang versé et des vies arrachées.
Damas craquait. Ses cris de terreur se perdaient dans le vacarme des explosions qui annihilait tout courage et toute volonté. Jamais le jeune homme n’avait cru pouvoir ressentir un tel moment de pure terreur. Envolés, la gloire et les honneurs ! Envolés, la confiance et l’arrogance ! Perdu au milieu du déluge de fer et de feu, le nocturnien était seul face à l’immensité de son impuissance.
Le bâtiment était secoué par les explosions, toujours plus proches, toujours plus violentes. Les hurlements de terreur de Damas ne parvenaient pas à crever le vacarme des obus déchirant le sol. Le sang bleu avait l’impression que la terre elle-même allait s’embraser sous cette pluie de feu. Sa voix se brisa, son corps se recroquevilla, il pria la mort de venir le prendre.
Puis l’enfer cessa. Quelques secondes à peine. Juste le temps nécessaire pour qu’une vague d’hurlements sinistres ne recouvre de nouveau l’âme du soldat. Ils arrivaient. Il le savait, mais ne pouvait rien faire. Son corps, tétanisé par la peur, refusait de bouger. Mais peu importait ; le noble se contentait de pleurer tel un enfant face à ses peurs nocturnes.
Un coup de pied le cueillit à l’estomac, propulsant le jeune homme contre le mur proche. La douleur qu’il ressentit lui coupa le souffle. Damas tenta de reprendre sa respiration, mais un autre coup de botte le cloua au sol. Debout, le dominant de toute sa taille, Wael posait un regard lourd de haine et de mépris sur la loque humaine qu’était devenu le noble jadis si fier.
Un regard si lourd, si terrible ! Les lèvres du sergent bougeaient, sans que Damas n’entende le moindre son, mais il comprenait parfaitement les insultes qui étaient proférées. Malgré sa terreur, malgré sa honte et sa douleur, Damas savait que les hommes du sergent autour de lui avaient surmonté leur propre peur. Chaque homme, chaque fusil était à son poste, prêt à accomplir leur devoir. Mais lui, fils de la haute bourgeoisie, capitaine déchu du XVI° Voltigeur de Nocturnus, était là, au sol, à pleurer tel un enfant apeuré.
Les guerriers supportent beaucoup de choses. Mais pas la lâcheté de leurs semblables.
Wael se pencha sur le nocturnien, le visage déformé par la colère. Il saisit le jeune homme de ses mains puissantes, et le plaça de force à son poste de tir, son fusil laser calé dans ses mains tremblantes. Le légionnaire ne pouvait s’empêcher de pleurer, et sa vue brouillée distinguait à peine les formes mouvantes qui s’approchaient du bâtiment.
Non, pas quelques formes : une nouvelle vague de terreur submergea le nocturnien à la vue de la marée verte qui accourait vers lui. Pour lui. Une horde innombrable avançait à la lueur des explosions, tirant de toutes leurs armes et hurlant mille imprécations. Rien ne pouvait arrêter cette déferlante, rien.
Sauf ce n’était la foi. Si tant est que Damas l’eût encore.
Un mur de tirs sembla embraser les positions de la légion, alors que ses pairs ouvraient le feu de concert dans une vaine tentative de résistance. Perdu, terrorisé, vaincu avant même d’avoir combattu, Damas ne put qu’appuyer sans relâche sur la gâchette de son arme. Il ventait de passer dans un état second, là où la raison laisse la place à un vide abyssal, où le corps agis seul, sans ordre, dans un pathétique acte de survie. Wael restait derrière lui, vidant chargeur après chargeur de son pistolet laser. Mais le mur de monstre semblait inarrêtable, chaque créature s’effondrant laissant la place à une autre, et encore une autre.
L’esprit de Damas se détacha de son corps, laissant son inconscient agir pour lui.
* * *
Une aube sale. Une aube souillée par la fumée et l’odeur de la mort. Damas était assis, à côté du cadavre criblé de balle d’un des chiens de Wael. Le visage crispé par la douleur, il avait cessé de souffrir depuis quelques heures. Comme la moitié de la section du sergent. Leurs corps gisaient au milieu de ce des orks qui avaient franchi le tir de leur artillerie. Magnifique riposte de leurs amis de la garde. Plus de la moitié des légionnaires tombés cette nuit là avaient péri grâce aux obus égarés. De la chair à canon. Voilà ce qu’ils étaient. Il n’était même pas sûr que des têtes tomberaient pour les légionnaires abattus par leurs propres camarades. Après tout, n’ayant nul part où fuir, la légion pénale avait ainsi tenu ses positions. Magnifique succès, à mettre au crédit de l’arbitrator Khalfon. Hourra ! Longue vie aux armées de l’imperium ! Et que crèvent Wael, tous les sergents et autres gradés de ces armées !
Hélas pour Damas, Wael semblait increvable. Malgré le sang qui s’écoulait le long de son bras, là où une balle perdue l’avait atteint, le sergent s’affairait à contacter l’état major à l’aide de sa radio. Seul l’empereur faisait que cette antiquité criblée par les balles fonctionne encore.
Même le toubib avait survécu à cette nuit infernale. Joie intense. La mauvaise herbe ne crevait jamais. Seul Poubelle manquait à l’appel depuis la veille. Mais Damas ne doutait pas que l’Omphalien avait survécu, caché quelques part sous un cadavre en attendant la fin des combats.
Le sang bleu avait soif, mais la force et la volonté lui faisaient défaut ; il renonça à se lever pour attraper une gourde proche. De toutes façons, son estomac aurait revomi tout ce qu’il aurait tenté d’ingérer.
Sa tête lui faisait mal. Sa gorge lui faisait mal. Son ventre lui faisait mal. L’absence de son aimée lui faisait mal. Il voulait se réveiller, sortir de ce mauvais rêve pour se retrouver à côté du corps chaud et nu de celle qu’il aimait. Il voulait sentir son souffle chaud caresser la moindre parcelle de son corps. Il voulait sentir sa bouche tiède collée contre son torse.
Mais tout ce qu’il eut, c’est le visage d’un Poubelle ricanant apparaître dans son champ de vision.
Maudit soit-il.