Citation :J'ai l'impression qu'ils cherchent encore des business model. Mais ça ne doit pas être simple pour eux.
Ce n'est jamais pas simple quelle que soit la stratégie adoptée pour un jeux de figurines sur table.
Déjà, globalement, on est sur un marché de niche dans la niche. Marché qui s'est considérablement tendu depuis plusieurs années : le choix est pléthorique pour les anglophones. Je n'ai pas fait de recensement mais on doit bien dénombrer plusieurs centaines de jeux de figurines différents. Ce qui implique qu'une entreprise ne dégagera jamais des centaines de milliers d'euros en vendant de la fig (sauf GW mais cette boîte a un statut tant historique que structurel vraiment très particulier, leur situation est totalement unique
).
Ensuite, toutes les stratégies ont de gros inconvénients :
- Si on table sur le jeu de figurine sans gamme (miniature agnostic), tu ne peux vendre que des fichiers de règles, que tes clients n'achèteront qu'une fois. Voire pas du tout si ce sont des vils piratins. L'auteur a vraiment intérêt à en sortir très régulièrement de nouveaux. Sans en faire son activité principale (et à supposer qu'on ne veille pas produire du contenu pour du contenu), ce sera très chronophage pour un complément de revenu minime par rapport à temps investi.
Il est possible d'adosser son jeu dès le départ à une gamme STL (mais bon, à moins d'être sculpteur soi-même, ce sera difficile sans injecter des fonds). Un peu comme ce que fait l'auteur de One Page Rule. Avec un Patreon derrière et une bonne présence sur les réseaux sociaux, ça semble lui réussir.
Le numérique permet de dégager un peu plus de marge que l'imprimé car le papier et les coûts d'impression (encres notamment) ont pris une très méchante claque. Ceci sans compter l'augmentation des coûts de l'énergie (faut les faire tourner les rotatives même si c'est pas encore ce qu'il y a de plus énergivores).
Je ne saurais pas dire si le prix d'hébergement/prestation dans une boutique numérique a augmenté. Probablement que oui mais sans doute moins que l'imprimerie.
S'il y a de trop de suppléments trop rapprochés, la base risque de décrocher, surtout si l'entreprise enchaîne les suppléments médiocres. La chute se produira d'autant plus vite si les techniques de vente sont limites (obsolescence programmée) voire prédatrice/foutage de gueule. Sans base de joueurs très larges et pour peu que la population ne se renouvelle pas, ce sera pas pérenne. Il faut aussi avoir conscience que quoi qu'on fasse, ce sera le fichier des règles de base qui se vendra le plus.
De ce qu'on m'a dit, un jeu de figs de ce type qui marche le fait sur la durée, un phénomène comparable à certains jeux indépendants. Tu n'en veux pas une blinde à la sortie mais de manière perlée au fils des mois.
Le mieux étant quand on a la possibilité d'adosser le jeu à une gamme existante voire d'avoir les contacts chez un fabricant de figs pour le faire (cas Frostgrave/North Star même si l'histoire est plus compliqué).
Soit l'entreprise fait de la fig sans règle/univers propres, donc destiner. Là, plusieurs stratégies possibles :
- la production est destinée à servir de proxy pour d'autres systèmes de jeu de figurines. Tu ne peux dès lors pas trop te permettre de faire des kits très originaux, sous peine de ne pas les vendre. Selon ton volume de ventes visées (elle dépend du type de production, c'est plus facile de rentabiliser une production de figs résines artisanales moulées à la maison que la conception d'un moule + injection de grappes HIPS ou du kiloplastic en Chine), le volume à viser avant rentabilisation ne sera pas du tout le même). Cela nécessite de bien connaître les processus de production et pas se planter car l'erreur coûte cher. De plus, la production va rentrer en concurrence avec toutes les boîtes qui font la même chose.
- production de des choses très originales, de grande qualité et très chères (des bustes à peindre par exemple) mais là on oublie totalement la production de masse. Il y a une petite clientèle.
- production sous licence (grosse ou pas, peu importe). Si l'IP est connue, ça se vendra au moins un peu (énormément si on a une grosse IP derrière). C'est pas mal pour se faire connaître ou élargir sa base.
- Tu es un sculpteur (ou un studio/coopératives d'artistes) et vous ouvrez un Patreon en proposant des gammes tous les mois, le tout adossé à une boutique sur MyMiniFactory.
Soit l'entreprise fait tout elle-même (production de jeux de figurines avec un univers dédié) :
- Il faut avoir d'emblée un produit d'une qualité professionnelle + excellente empreinte sur les réseaux sociaux + contacts dans la distribution traditionnelle + la structure pour produire (ou les contacts auprès de quelqu'un qui peut). Certains aspects sont devenus plus facile au fil du temps (disons que produire des grappes plastiques maintenant, c'est plus facile à envisager maintenant que dans les années 2000 ou 2010 si on a l'apport pour bien entendu), d'autres sont devenus beaucoup plus durs (la plupart des revendeurs ne voudront pas d'un nouveau jeu de figurines sans IP, ça se vend pas).
Pendant un moment le recours au financement participatif a paru une bonne solution pour lancer un jeu de figurines... Bilan plusieurs années après : rares sont les projets à avoir su en tirer parti (on note que Deadzone est du nombre, la première édition a été lancée sur Kickstarter).
Mantic a aussi le problème de l'infrastructure : ils ne sont pas nombreux mais ils ont des dépenses fixes qui filent tous les mois (locaux + employés + frais fixes), ce qui leur donne moins de flexibilité qu'une équipe plus petite parce qu'il faut assurer les ventes derrière. Mantic c'est un (désolé pour l'image) 'gros petit' studio de figurines, un peu à l'instar de Corvus Belli.
Mantic est aussi fortement gênée par sa situation géographique : ils sont installés en Angleterre. Avant, je pense que l'entreprise générait un certain revenu chaque mois via les ventes sur sa boutique en ligne (les marges sont les meilleures pour eux dans le cas de ce type de vente car il n'y a pas d'intermédiaire) mais depuis le Brexit, ç'a pris un méchant coup dans l'aile. Et sans compter les graves sociaux en Angleterre actuellement. La main d’œuvre y est aussi plus cher que dans pas mal d'autres pays européen.
Cet emplacement a aussi un impact sur leur développement : les derniers kickstarters maisons étaient très peu intéressants par rapport à ceux de jadis par exemple (le dernier terrain crate affichait des tarifs très élevés pour un Européen).
Il est possible aussi que l'entreprise ait trop de gammes et cherchent à courir trop de lièvres à la fois pour son propre bien.
Car si on brosse un inventaire, nous avons :
Fantasy : Kings of War (leur jeu qui marche le mieux), Vanguard (pas trop soutenu mais y a pas mal de références, presque toujours communes avec Kings of war), Armada, Dungeon Saga (reboot en cours), League of Infamy (a apparemment bidé).
Sci-Fi : Warpath (jeu mort), Firefight (qui remplace Warpath), Deadzone (en cours de réfection), Dreadball (j'ai crû comprendre que ça allait être relancé), Overdrive, Star Saga (a fait un bide).
Et encore, je ne mentionne pas les projets sur lesquels ils bossent actuellement, qui ont été +/- évoqués (jeu de vaisseau dans l'univers de Warpath, Vanguard, reboot dungeon Saga).
Décors : Terrain Crates (beaucoup de références).
Modules de scénarios pour D&D5.
Jeu de platal : on nous a annoncé plusieurs futurs jeux sous licence.
Annexe pas si annexe que ça : Mantic est distributeur des produits River Horse (je ne comprend pas trop vu que River Horse est aussi basé aux UK mais passons...), propose du Vallejo, Army Painter à la vente dans la boutique en ligne maison, etc...
En plus : application Mantic Companion + boutique en ligne (un peu bordélique dans certaines sections) + site à tenir.
Mantic a également une boutique physique à Bulwell aux UK.
Ça fait vraiment
beaucoup de choses à gérer pour une petite structure
.
De mon point de vue (qui vaut ce qu'il vaut, i.e pas grand chose), j'ai l'impression d'une entreprise qui cherche à mener plein de projets tout en devant faire vivre ses gammes mais sans nécessairement en avoir les moyens humains. Sur le plan financier, je ne saurais pas dire. On n'aura pas accès aux données de toute façon. Et qui présente une légère tendance à la dispersion. Tendance qui pourrait s'avérer dangereuse si elle est mal jugulée.
La stratégie ne me paraît pas hyper-limpide même après les derniers stream : elle disait surtout 'on va faire du jeu de plateau familial et accessible.' (OK mais c'est un domaine où la concurrence est des plus féroces
), 'on va développer Firefight avec une variante Apocalypse (je traduis avec mes mots, ce n'est pas ce qui a été dit textuellement) pour que les gens puissent pouvoir jouer plein de blindés (ce n'est pas vraiment ce que j'attends de Firefight mais passons...) et il va y avoir de nouvelles figurines pour KoW ainsi que de nouvelles factions (cool mais il y a déjà pas loin de 30 factions jouables...c'est déjà bien, non ?).