Coronavirus

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C'est pas croyable : réussir à lire, résumer et traduire une telle quantité d'information ? Et seulement 4 ?
Et le niveau de lecture les rend tous ça accessible ...
Et en plus ils bossent à côté ...
C'est complétement fou.
Ils font au plus rapide : lecture, traduction/adaptation du resume de l'article et synthèse de la conclusion. Avec des bons outils, une personne sérieuse et concentrée, c'est faisable...mais en plus des 12 heures par jour bien harassante, pas facile du tout.

Sinon je vois fleurir un peu partout aujourd'hui des articles sur le thème 'une patiente coréenne guérie du covid-19 et testée positive de nouveau'.

Précisions importante :

Déjà sur le testing :
- Il y a deux manière de faire un test viral pour un virus se logeant des les voies aériennes supérieures : un test PCR ou un test sérologique.
Les coréens testent en masse via test PCR qui implique d'aller chercher avec un long coton-tige souple (écouvillon) bien au fond des deux narines d'une personne. Ce test n'est pas hyper fiable, seulement à 70-80% ce qui veut dire que vous aurez environ un quart de faux négatif (la personne est déclarée saine alors qu'en fait elle est infectée). D'autre part il semble que dans son cycle de vie, le covid-19 descend vers les poumons pour aller s'y loger. C'est généralement là que les emmerdes commencent. Il est possible qu'une fois bien installé dans les bronches, on en trouve plus grande trace dans la cavité nasale ou le pharynx.
C'est un test de dépistage de la présence du virus.

- La sérologie implique soit une prise de sang mais son rôle est un peu différent : elle permet de savoir si la personne a déjà rencontré (contracté) le virus ou non. Si vous l'avez eu, vous aurez des anticorps réagissant à la présence du virus. Sinon, que pouic. Très utile pour savoir qui est à risque d'infection et ceux qui a priori sont à peu près tranquille, du moins temporairement.

Il y a aussi d'autres types de test en cours d'élaboration (test à la salive notamment).

- Ensuite sur la notion d'infection et de charge virale.
La charge virale, c'est la quantité de virus décelable que la personne a dans le corps à un moment T (typiquement dans le sang). Elle va évoluer au fil de la maladie. Assez souvent, elle suit un peu une courbe de Gauss (quand la maladie est curable ) mais pas toujours, en réalité cela va dépendre fortement du virus, du métabolisme de la personne contaminée, de l'exposition au virus, etc...
Dans certaines infections virales, plus la charge virale est importante, plus le patient sera malade et aura des symptômes costauds (ex pour le VIH : plus la charge virale est haute, plus la personne a un système immunitaire déficient...pas glop). Dans d'autres, non. On peut très bien avoir une personne avec une très haute charge virale mais qui n'est pas du tout, pas encore ou plus du tout malade.
Vous pouvez aussi avoir une haute charge virale alors que la majorité du virus que vous excrétez est mort (trace d'ARN du virus).
Pour contre plus on a de charge virale, plus la contagiosité augmente généralement.
La dose infectieuse correspond à la quantité de charge virale moyenne chez un individu moyen dans des conditions normales qui doit arriver pour que le virus infecte son hôte. Là aussi variable selon les virus.

Le souci, c'est que pour le covid-19 :
- on n'a aucune idée de la dose infectieuse même s'il ne doit pas en falloir beaucoup vu le taux de reproduction (R0) i.e le nombre de personnes moyen qu'un infecté va contaminer.
- on ne comprend pas encore bien le cycle de vie du virus (évolution de la charge virale). Il semble y avoir des bizarreries par exemple des gens qui 'relarguent' un max tout en étant asymptomatiques, d'autres qui n'en ont que très peu dans le poumons mais sont dans des états critiques Huh .

On n'a pas assez de recul pour avoir une idée précise de l'immunologie.

La plupart du temps quand une personne attrape un virus, si elle en guérie, elle acquiert une immunité spécifique contre cette souche de virus. L'immunité peut être temporaire (baisse des anticorps ciblant ce virus au fil du temps) ou définitive (exemple : la rougeole). Le souci c'est que 1) cette protection est hyper spécifique (la plupart du temps) et 2) les virus à ARN comme le covid-19 'mute' facilement, du coup votre système immunitaire ne réagira pas à ce nouveau venu et vous risquez de retomber malade.

Il peut arriver qu'un virus reste dormant dans le corps puis se réactive à l'occasion de condition physiologiques particulières. Dans ce cas les symptômes du virus changeront par rapport à la primo-infection (la première fois où ce virus vous a rendu malade). Les zonas sont dus à une réémergence du virus de rougeole. Quelques virus de la rougeole ont échappé à l'extermination générale, ils ont piqué un petit somme dans vos ganglions nerveux et à l'occasion d'un gros stress enflamme la zone concernée.
[D'ailleurs, le liquide qui se trouve dans les vésicules du zona est bourré de virus de la variole, vous êtes contaminant quand vous en avez un...).
Je ne poste pas souvent mais je lis ce forum avec assiduité depuis des années, et je tenais à te remercier Jalikoud pour tout tes postes. Ils sont explicatifs sans être anxiogènes, et ça fait du bien. Merci à toi et bon courage pour la suite.
(Modification du message : 11-04-2020, 13:13 par grog.)
Dernières nouvelles du front scientifique :

Il existe une forte suspicion de symbiose entre le virus SRAS-Covid19 et des bactéries, notamment issues du microbiote intestinal qui provoqueraient des infections opportunistes.

[Le microbiote désigne l'immense 'petit peuple :rolleyes: ' bactérien présent à peu près partout dans notre corps. Chaque personne en abrite plusieurs milliards. Leur composition (type d'espèce, quantité, variété génétique, etc...) varie fortement d'un individu à l'autre (même s'il y a des constantes dans une même ethnie). Certaines bactéries ont un effet indispensable en nous permettant de digérer certaines protéines ou micro-nutriments, pour d'autres on ignore leur rôle. La plupart des bactéries aiment bien se loger dans une partie précise du corps où elles ont une action bénéfique/neutre/mal comprise mais peuvent s'avérer néfaste ou dangereuse si d'aventure elles se retrouvent dans un autre organe).
Cette variabilité pourrait expliquer les différences de symptômes parfois radicaux selon l'individu voire selon les pays.

Apparemment le déroulé de la maladie se passerait comme suit (attention, ça reste du domaine du conjecturel) :

1) phase respiratoire :
Le SRAS-2 passe dans les voies aériennes supérieures puis inférieures avant d'aller se loger tranquillou dans les poumons. Les symptômes sont généralement modérés : syndrome grippal avec notamment une toux sèche ou un petit rhume qui passe inaperçu. Les atteintes pulmonaires sont très rares à ce stade. Stade qui durerait une semaine au plus.
Chez les personnes asymptomatiques, ils sembleraient que ça n'aille pas plus loin.
Pendante cette phase vous êtes contagieux en excrétant le virus via les micro-gouttelettes présentes dans l'expiration.

2) phase microbiotique :
Pendant la phase 1, la personne inhale (avale) de la salive comprenant de ses micro-gouttelettes. Le Covid-19 pénètre dans les cellules formant l'épithélium oesophagien (paroi superficielle de la muqueuse de l'oesophage, le tuyau qui mène à l'estomac). Il est également présent dans la cavité buccale (lavez-vous les dents !).
Il n'est pas impossible qu'il descende alors tout le long du trajet digestif en interagissant avec le microbiote du cru au passage. [Détail : on a trouvé de l'ARN viral dans les selles des patients infectés]. Là qu'est-ce qui se passe ? Quelles sont les interactions avec certaines bactéries du microbiotes ?
Grand mystère pour l'instant.
Mais cela doit provoquer les troubles gastro-intestinaux décrits par pas mal de gens (diarrhées notamment).

3) Phase agressive :
Les symptômes s'aggravent brutalement (généralement 7 à 10 jours après les premiers ) avec apparition de dyspnée (difficulté respiratoire). Certains pensent que la dégradation ne serait pas dû directement au virus du covid-19 mais à une ou des bactéries qui profiteraient de la situation en déclenchant des infections pulmonaires opportunistes. La mécanique est assez classique.
De là, dans les cas sévère = orage cytokinique = inflammation généralisée et atteintes graves multisystémiques = décès Sleepy .

La principale suspecte actuellement semble être prevotella (une bactérie présente dans l'intestin, le vagin et la bouche) qui se ferait infester par le virus. Elle est déjà bien connue (de base) pour provoquer des infections pulmonaires. Et des gingivites chez les femmes enceintes.
Les enfants ont peu de provotela dans leur microbiote. Cela expliquerait leurs symptômes faibles la plupart du temps.
Les hommes en ont une population plus importante que les femmes. On ne sait pas très bien pourquoi mais les femmes semblent mieux réguler leur microbiote que les hommes (hypothèse perso : peut-être parce que leur système hormonale est beaucoup plus complexe ?).
Si cette bactérie joue un rôle actif dans l'aggravation de la maladie, ce serait cohérent avec la prévalence des cas sévères chez les hommes par rapport aux dames (2,7 fois plus).
La provotela adore les carbohydrates (les sucres !), elle est d'ailleurs très présente dans le microbiote des personnes obèses* (pour être honnête : il y en a significativement plus chez les patients pléthoriques en moyenne]. Ceci pourrait expliquer que l'obésité soit un facteur aggravant...mais pas que, la graisse viscérale et la graisse superficielle du bide crée une limitation mécanique de la respiration.

Avantage : si le covid-19 est par lui-même bénin mais qu'il pousse une bactérie à avoir une action néfaste, on peut contrer la maladie avec la bonne antibiothérapie ainsi qu'avec les bons probiotiques en complément.
Mais pour cela il faut appliquer l'antibiothérapie avant l'aggravation des symptômes respiratoires débouchant sur le plausible orage cytokinique fatal.
Car quand ce dernier se déclenche, c'est malheureusement beaucoup trop tard : on ne peut plus qu'assister la respiration de la personne et croiser les doigts pour qu'elle s'en sorte. Si elle le fait, elle aura probablement des séquelles assez lourdes.

[Je digresse mais il existe un certain nombre de maladies qui lorsqu'elles se déclenchent demeurent souvent fatales encore de nos jours. Par exemple : la rage. Une fois que la crise rabique est là, on ne peut plus que croiser les doigts...il n'y a pas de traitement curatif pour cette maladie. D'où l'importance de se faire vacciner !]

Le truc amusant (mais un brin flippant) : selon sa composition, le microbiote intestinal influence les choix alimentaires d'un individu.
Par exemple si vous mangez beaucoup de protéines animales ou végétales, les bactéries qui aiment le sucre vont progressivement céder du terrain au profit de celles qui se nourrissent de protéines, par sélection naturelle. Et vous aurez un peu plus envie de manger de la viande, des légumineuses ou des oléagineux (noix, etc...)
Même mécanisme pour les carbo-hydrates et les lipides.
[Il y a d'ailleurs des traitements probiotiques sérieux existant, notamment pour les patients présentant une addiction aux sucres : on fait le nettoyage par le vide dans leur intestin via un bon gros laxatif (ou une antiobiothérapie agressive mais c'est dangereux) puis on leur fait absorber quelques gélules contenant des probiotiques présents chez des personnes ayant une alimentation plus équilibrée (en clair et en outrancier LOL : on lui fait bouffer des gélules contenant un peu de caca de vegan fanatique). L'appétence pour les hydrocarbonates diminuent alors fortement, c'est le moment propice pour revoir ses habitudes alimentaires et aussi pour mener une thérapie portant sur cette addiction.

* en médecine, on emploie plein d’appellations codées. Dans ce cas, on parlera de patient/sujet 'pléthorique' Smile . Vous verrez rarement écrit dans un compte-rendu médical ou des notes de transmissions infirmier le terme 'obèse'. Il arrive assez souvent que l'IMC soit noté également sans commentaire.
(Modification du message : 13-04-2020, 00:50 par Jalikoud.)
Merci Jalikoud, c'est "rassurant" d'en savoir plus sur le virus.
Texte écrit par une collègue, qui résume très bien la situation :

[Attention le texte est très dur mais ça reflète malheureusement la réalité de beaucoup de services covid-19, notamment dans l'Est].

"J'entends tous les soirs les gens applaudir pour soutenir le personnel soignant et les personnes qui permettent de faire tourner le pays malgré le confinement. Je vais m'attarder sur les soignants. Savez-vous ce qui se passe dans un service covid-19 ?

Je vais vous raconter ce pour quoi vous applaudissez. Peut-être que vous arrêterez, du coup.

Dans un service covid on accueille des patients qui ne répondent pas aux critères pour aller en réanimation. Soit ils sont trop vieux, soit ont des antécédents trop lourds. Imaginez l'état d'esprit des médecins qui doivent nous envoyer les patients... Moi je n'y arrive pas.

Bref. Ah oui, une précision.
Tous les patients que nous avons sont covid positifs. Nous n'avons que des masques chirurgicaux, évidemment pas de FFP2, des surblouses non étanches quand ce ne sont pas des sacs poubelle de 100 litres découpés à la hâte, une charlotte par poste. Pour le masque c'est pareil. Un masque chirurgical par poste sachant qu'il faudrait le changer toutes les 4h mais on n'en a pas assez. On les compte chaque nuit histoire de voir si on n'en consomme pas trop. Heureusement nous avons les dons des entreprises et des particuliers. L'hôpital ne nous en donne pas. Il n'y en a plus.

Donc. On accueille les patients. On ne peut pas aller les voir autant de fois qu'ils le voudraient. Ça demanderait trop de surblouses sinon. Leur famille non plus ne peut pas venir les voir.

Quand la détresse respiratoire arrive. On met de l'oxygène dont on augmente le débit au fur et à mesure. On sait ce qui va arriver dans peu de temps. Les patients angoissent, s'agitent, sonnent parce que oui ils étouffent. Quand ils commencent à chercher trop l'air qui leur manque le médecin met en route le protocole de sédation profonde. On connaît l'issue. Les patients aussi. Mais c'est vrai qu'ils ne souffrent plus. Du moins en surface. Je ne sais pas si les gens ressentent la douleur, la peine, l'angoisse. Vu leur visage à la fin ils ont l'air serein.
La famille est prévenue de la mise en place du protocole mais ne peut pas venir voir le patient.

Une fois décédé, seul, on appelle le médecin pour confirmer le décès. On fait une toilette succincte, quand même on est humain. On le coiffe, on le bichonne un peu. On met des bracelets d'identification.
Et là vient le pire pour moi en tout cas.
On met le corps dans une housse en plastique. Oui oui comme celle qu'on voit dans les films policiers. C'est pour protéger les agents des pompes funèbres qui viendront chercher le corps.

Imaginez. Vous avez vécu des choses plus ou moins incroyables, vous avez encore qui sait des dizaines d'années à vivre mais voilà, vous chopez cette merde et vous n'avez pas les bons critères pour être en réanimation. Et vous finissez votre vie tout seul, sans votre famille autour de vous. Sans un soignant pour vous tenir la main parce qu'on n'a pas assez de matériel. Et on vous enferme dans un sac.
Un sac poubelle. Vous finissez comme un déchet qu'on brûlera ou enterrera.
Voilà ce que vous êtes pour nos dirigeants.
Des gens qui ne sont rien.
Des déchets.
Voilà ce pour quoi entre autres vous applaudissez le soir !

Et je ne parle pas de la peur au ventre que les soignants ont quand ils vont bosser. Peur d'attraper, de contaminer des patients, des collègues, la famille en rentrant, éreinté.
L'horreur d'un geste qui résume tout.
Celui de fermer cette putain de fermeture éclair au-dessus d'un visage livide.
Ce bruit de zip.
Je l'aurai en tête toute ma vie.

Je ne sais pas si vous aurez eu la force de lire ce message jusqu'au bout. Mais..... Non je n'ai rien à ajouter. Ah si.

On n'oubliera pas.
Ne les oubliez pas.
N'oubliez pas ceux à cause de qui on en est arrivé là.
"
(Modification du message : 13-04-2020, 15:59 par Jalikoud.)
On peut aussi relire "la Peste" qui (au delà des vertus "prémonitoires" que certains lui prête faussement actuellement) parle assez bien des détresses qu'engendre une épidémie...
Je me demande si on aura des chiffre / stats ou même une idée du nombre de personnes qui ne sont pas aller en réanimation par faute de moyens a la fin de tout ça.

Après chacun de fera son idée sur si c'était possible d'avoir assez de matos pour faire face a tous les cas.
Très dur ce texte mais malheureusement à quoi pouvait-on s'attendre vu le traitement dont fait l'objet l'hôpital (et de manière générale les services publics) depuis plus de 20 ans ? Si seulement cela pouvait faire réfléchir les gens la prochaine fois qu'ils iront glisser un bulletin dans l'urne...
Oui, c'est à lire jusqu'au bout. Parce que les patients et les soignants le méritent.
Et ça mérite effectivement les applaudissements pour ceux qui y vont, et qui y retournent jour après jour en sachant bien ce qu'ils vont retrouver là bas.