Citation :
il y a 4 minutes, Antares a dit :
Holà je suis pas fan de livre de guerre mais je prends bonne note de "le soldat oublié" et de Stalingrad.
A nouveau, dans ce cas je recommande fortement "Le Grand Cirque" de Pierre Clostermann.
Je l'ai lu alors que j'étais en 4e ou 3e, pour un devoir de vacances où l'on devait lire un livre de guerre, justement. Je ne savais pas quoi lire, mon père m'a dit de prendre ce bouquin, sans m'en dire plus.
J'ai pris une grosse claque...
Le fait que Clostermann ait été pilote plutôt que grouillot élève (sans mauvais jeu de mot, quoique...) la lecture de son expérience. Là-haut, on est dans un autre monde, loin des difficultés et des épreuves liées aux combats au sol, mais où l'homme, le pilote, est transcendé par sa machine. Où un monde de paix et de liberté se transforme d'un coup, d'un seul, en un ballet virevoltant où la moindre erreur garantit une mort quasi-certaine. Où le monde commence avec son flight wing, puis se réduit à son ailier, avant que le cockpit de son appareil ne devienne son univers tout entier, une extension de soi, dans tous les sens du terme (un avion sur lequel on a volé pendant longtemps, qui nous a ramené à la base dans des conditions atroces est autant pleuré qu'un camarade lorsqu'il finit à la casse).
Pour moi, à la lecture Clostermann dépasse le soi ; ce qui est très étrange puisqu'il décrit toujours ses sentiments, ses impressions, mais la perception de l'ennemi est totalement autre chose. L'emplacement, si inhabituel, en un sens, de leurs combats, l'impossibilité de venir à la rescousse d'un ami blessé lors du retour, ou l'impuissance ressentie en escortant des bombardiers qui se font descendre par la flak... tout cela place les aviateurs dans un autre monde, où l'on oublie presque ce qui se passe au sol et où les cieux sont le théâtre d'un affrontement presque, presque chevaleresque, mais tellement impitoyable à la fois. Le pilote d'en face n'est plus que le salaud qui est dans votre viseur ou celui qui vous tient dans le sien, c'est un "frère égaré". La mort de certains pilotes ennemis est accueillie avec plus de tristesse que de joie car ils faisaient partie de leur quotidien, de leur jeu du chat et de la souris, et que ça leur rappelle que demain, ce peut être eux.
Et si les pertes sont traitées de façon très "numériques" dans le livre, on sent que c'est le seul moyen de se faire à la situation. Que plus la guerre avance, plus les risques sont grands de ne pas revenir, ou de revenir seul, et qu'au-delà de la simple énumération, c'est toute l'ampleur des pertes, irremplaçables, des vétérans comme des novices, que l'on ressent au fond de soi.
J'idéalise probablement le bouquin et d'autres n'auront pas la même lecture que moi, j'en suis sûr, mais en-dehors de cela, le livre fournit un point de vue inestimable sur le fonctionnement interne de la RAF et des FAFL, de l'impression des pilotes qui touchent leur "monture" pour la première ou la dernière fois et leur quotidien.