Histoire guerrière et militaire, de la fronde aux armes autonomes

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Citation :Donc si tu es un seigneur pas de probleme (car je rapelle que l'épée se transmetait en héritage ) si tu es un paysan là c'était plus compliqué, pour reprendre l'exemple des gaulois les plus riche avaient des épées les autres des Scramasaxe (fauchards) et on atrouvé dans des tombes pour les moins fortuné des épée en bois cerclé d'une bande de fer afutée.

Je me permet de rectifier: les gaulois ne connaissaient pas la scramsaxe. C'est une arme germanique de la fin de l'antiquité et du début du Moyen Age (que l'on retrouve chez les vikings) inspirée probablement de la falcata romaine. Et j'ai jamais entendu parler de ces épées en bois cerclées de fer....

L'arme par excellence du gaulois c'est la lance, et l'épée, cette dernière étant, pour les raisons que tu invoques, réservée à l'élite, aux guerriers "professionnels". Les paysans (mais il n'y avait pas forcément de distinction nette entre nobles et simples hommes libres dans ces sociétés, les "nobles" étaient les plus riches et les plus influents) étaient armés avant tout d'une lance, d'un bouclier, et c'est tout (peut-être un couteau ou un poignard en plus).

Les gaulois, comme les germains, fonctionnaient avec une aristocratie guerrière à leur tête, où des puissants (des hommes libres riches et influents donc, auxquels l'assemblée des hommes libres pouvaient conférer des charges spéciales, comme des commandement militaire, à l'instar des statèges en Grèce) s'entouraient d'un groupe de fidèles: la drott chez les vikings, la druzina chez les slaves, qui donneront les mesnies médiévales. Ces hommes rejoignaient un puissant, leur étaient fidèles et constituaient une sorte d'armée privée permanente (et constituaient les toupes d'élite en temps de guerre) autour de lui. Ces groupes étaient soudés par un système de dons et de contre dons. Les puissants remerciaient leurs fidèles par des dons, notamment des armes de prix et des parures. Souvent, c'était financé par le butin de guerre, donc il fallait faire des expéditions, et pour ça il fallait des hommes et pour avoir des hommes, il fallait pouvoir les récompenser, donc le système s'entretenait de lui-même. César décrit très bien ces liens de clientélisme dans la Guerre des Gaules. C'était aussi un moteur des expéditions vikings au moment où une aristocratie scandinave (puis des lignées royales) s'imposaient de plus en plus.

L'armement fourni par un seigneur ou l'Etat c'est très tardif. En Grèce antique, les hoplites, ceux qui pouvaient se payer l'équipement hoplitique (casque, cuirasse, hophlon, le grand bouclier de bronze, et une épée ainsi qu'une lance) constituaient l'élite économique et politique de leur cité. Les plus basses classes censitaires constituaient les auxiliaires, archer, frondeur, et très important à Athènes (et qui a joué un rôle très important dans l'affirmation de la démocratie) les rameurs de la flotte. A Rome, les légionnaires devaient également payer leur équipement, ce qui implique une bien plus grande disparité dans les équipement de ce qu'on voit dans les films ou autres médias dépeignant des romains.

Citation : car le fait de replié le métal sur lui meme (ce que l'on appel vulgairement du damas) prend tres longtemps (les gaulois le pratiqué déjà).

Les épées gauloises étaient en effet d'une très grande qualité, ce qui contredit certaines sources, notamment l'auteur grec Polybe, qui raconte que les gaulois devaient redresser leurs épées tordues après avoir donné quelques coups. Toutes les épées gauloises retrouvées (et elles sont nombreuses, contrairement aux casques et autres protections) prouvent que c'était faux. De là à imaginer que Polybe a mal interprété une pratique cultuelle (les épées prises aux vaincus étaient systématiquement offertes aux dieux et avant cela mutilées, et notamment tordues de manière assez étonnantes) il n'y a qu'un pas. Il faut toujours se méfier des sources et surtout les croiser entre elles.

Les Germains et notamment les mérovingiens ont perfectionné cet art de la métallurgie à un point surprenant (les épées mérovingiennes étaient des bijoux, avec des lames en "damas" (les gaulois ne connaissaient que le corroyage) et jusqu'à l'époque viking, les lames franques étaient les plus réputées d'Europe, d'un niveau au moins égal à ce que les japonais ont pu faire avec leurs sabres 1000 ans plus tard (après, la question n'est pas de savoir qui avait la plus grosse.... c'est le cas de le dire).

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Et l'ornementation pouvait être impressionnante:

[Image: fMwucQJg.jpg]

Citation :Je n'y connais rien, mais finalement est-ce que la qualité de l'équipement ne venait pas du fait qu'il soit personnel ?

Dans ces cultures, l'arme n'est pas un simple outil. On prête aux armes des propriétés magiques, religieuses (que l'on voit dans des mythes tardifs comme celui d'Excalibur ou de Durendal). L'arme est également un symbole de liberté. Chez les Gaulois, un homme libre n'avait le droit de paraître aux assemblées qu'à partir du moment où il avait le droit de porter une arme (c'est à dire à partir du passage à l'âge adulte).

Chez les vikings, l'arme est également un symbole de liberté: un homme libre se doit d'assurer la défense de son clan, de sa communauté, sans forcément s'en remettre à un seigneur ou un roi (que l'on va rejoindre d'avantage pour agresser que pour se défendre).

C'est proche de l'idée du citoyen soldat grec. On a les droits d'un citoyen qu'à partir du moment où on contribue à la défense de la cité (oui l'Histoire de l'humanité ne passe que par des rapports de force guerriers, c'est triste, mais ça fait au moins de beaux objets).

Citation :Pour les casques et armure il y a aussi une chose à prendre en compte c'est la façon de combattre de l'époque (qui n'est pas vraiment ce que l'on voit dans les film) qui permet aussi d'expliquer pourquoi il y a tel ou tel chose en ornement, en gros quand tu est dans une phalange il y a peu de chance qu'un mec se saisisse de ton cimier pour te mettre à terre.

tout à fait, c'est ce qui m'est revenu en tapant mon précédent message.

Mais je parlais également des parures des guerriers achéens de l'âge du bronze: à cette époque, pas de phalange hoplitiques, c'est l'idéal héroique du duel entre guerriers qui prévaut (incarné par le duel Achille/Hector dans l'Illiade). Et pourtant, les mecs étaient sapés comme des sapins de noël. A l'époque du casque d'Agris, les Gaulois combattaient de façon très différente qu'à l'époque de la Guerre des Gaules. D'ailleurs, je ne saurais que vous recommander une fois encore le roman "Les Rois du Monde" de J Philippe Jaworski, roman de fantasy historique, qui est assez bluffant sur la restitution de ce qu'on connait des mentalités de ces élites guerrières de l'époque et de cette culture.

La guerre a toujours été au coeur des repères sociaux et culturels, une sorte de ciment social où se légitiment les hiérarchies et l'exercice du pouvoir. Dans l'antiquité, un roi se doit d'être un roi guerrier, qui mène ses hommes à la victoire. Elle revêt également une grande importance spirituelle et religieuse: c'est un jugement des dieux (les au-delà pour les héros tombés au combat, que ce soit les champs élyséens ou la Valholl scandinave, sont toujours les plus enviables par rapport à l'Hades qui n'est pas l'enfer chrétien, mais qui fait pas des masses envie non plus), une façon de rétablir l'équilibre entre ordre et chaos. Et cette dimension se reflète dans l'équipement, loin des considérations pragmatiques contemporains par lesquels on a tendance à interpréter les choses.

Et ça passe aussi par la parure. C'est également le cas chez des peuples "primitifs" comme les indiens des plaines: la parures distinguent ceux qui s'illustrent à la guerre, en protégeant et menant leur communauté à la victoire.

En Irlande ou chez les vikings, une défaite peut signifier l'arrêt de mort pour les chefs et les rois. Leur pouvoir n'avait rien d'absolu, ils avaient plus de responsabilités que de facilités en fait (et pas qu'à la guerre, qu'une épidémie ou une famine surviennent, et les puissants avaient du soucis à se faire, car ils étaient responsables de l'harmonie entre le monde des hommes et celui des dieux, de la concordance entre les équilibres naturels, incarnés par les dieux, et l'organisation de la société.... en cas de calamité, les roitelets de l'époque païennes en Irlande étaient systématiquement sacrifiés aux dieux).

Citation :Tu m'étonnes Big Grin , avec une armure sur le dos, une arme à la main et un bouclier, je pense qu'au bout de 10 minutes, tu sues comme bœuf, souffles comme une forge et peut à peine lever ton arme pour frapper...

Je n'imagine même pas ce que ça devait être de combattre avec un casque corinthien sur la tronche, une cuirasse en bronze, des cnémides en bronzes et un lourd bouclier sous le soleil de Grèce ou de Perse....

Ceci dit, on a également de fausses idées là dessus. Un combattant entraîné supporte tout à fait cet équipement, et les batailles de l'antiquité pouvaient durer des heures, voir des demi journées entières. Et on ne se rend pas compte, mais un équipement hoplitique n'est pas "si" lourd que ça.... ça représente autour de 20/30 kg tout compris. Ca peut paraître beaucoup, mais un soldat contemporain, avec son casque blindé, son gillet parre balle, ses flingues, ses grenades, ses munitions, son paquetage (pouvant comprendre radio et autres), peut porter jusqu'à 40 à 50 kg sur le dos.... les mecs en Irak ou Afghanistan doivent bien suer comme des boeufs aussi... mais ils sont entraînés pour ça, et manifestement, ça se fait.

Les légionnaires romains étaient entraînés à trainer tout leur bardas (y compris de quoi roupiller et faire la popotte en plus des armes et armures) jusqu'à 40 km par jour, et à monter un camp retranché pour la nuit après...
(Modification du message : 25-04-2020, 00:20 par Egill.)

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RE: Histoire guerrière et militaire, de la fronde aux armes autonomes - par Egill - 25-04-2020, 00:00