On finit par la meilleure des factions, les Veer-Myn .
Tapis dans l'ombre
En surface, le GCPS est un monument magnifique : le vibrant témoignage de ce que la loi du marché et l'innovation technologique peuvent produire en terme de vision de l'univers. Le Noyau est rempli de cités faites de gratte-ciels resplendissants, brillant à la lumière de mille soleils tandis qu'ils s'élancent triomphalement vers les cieux occupés par les engins de transport individuels et des vaisseaux de ligne aussi luxueux que colossaux.
Chaque jour, d'innombrables colons embarquent dans un périple plein de découvertes, dans leur quête de nouvelles planètes à coloniser. Partout où ils atterrissent, ils fondent de nouvelles colonies, des avant-postes et des implantations en faisant montre d'une volonté apparemment sans limite pour repousser les frontières du GCPS.
Mais si vous grattiez le séduisant vernis de cette utopie trompeuse et si vous y regardiez d'un peu plus près, vous ne tarderiez à découvrir quelque chose : une chose qui rôde dans tous les recoins les plus sombres du GCPS. Une chose qui ferait fuir en hurlant de terreur la plupart de ses citoyens. Et on ne leur donnerait pas tort.
Car sous leurs villes, dans les égouts et dans les soutes des transports spatiaux, dans les espaces étroits et dans les conduites des immenses vaisseaux spatiaux, dans tous les endroits sombres difficiles d'accès, les Veer-myn se terrent.
La majorité des implantations corporatistes et des vaisseaux de transport de gros tonnage accueille au moins un nid de Veer-myn, le plus souvent sans en avoir conscience, à tel point que les compagnons d'assurance de fret ont inclus des closes couvrant les pertes provoquées par leurs pillages dans leurs contrats. Il en est ainsi depuis pratiquement aussi longtemps que l'homme voyage parmi les étoiles.
Initialement, les vols des Veer-myn sans d'ampleur modeste : ils ne provoquent pas d'inconvénients majeurs pour leurs hôtes et on ne considérait pas la menace suffisante pour faire davantage qu'assembler occasionnellement des petits groupes de chasseurs afin de réguler leurs effectifs. Les Veer-myn étaient considérés par la plupart des gens comme des parasites bénins et. Personne n'en faisaient grand cas, surtout en comparaison aux dangers bien plus visibles et plus agressifs que contient la galaxie. Leurs migrations en apparence aussi improvisées qu'aléatoires au sein de la galaxie purent se poursuivre sans aucune opposition réelle.
Mais cette légèreté pourrait se révéler bien plus coûteuse que quiconque aurait pu l'imaginer.
La véritable force des Veer-myn, tout comme leur effectif réel dans la galaxie, a été soigneusement dissimulée, tout comme l'étendue de leurs affreuses expériences en armement radioactif et biologique. Et tandis que par le passé, leurs activités se limitaient à l'infestation occasionnel d'un vaisseau de ligne ou à de rares incursions dans les rues d'une colonie corporatiste, tout laisse penser qu'ils ne s'arrêteront pas là.
Un nombre sans cesse plus grand de vaisseaux sont perdus corps et âmes après qu'ils aient fait état de la présence ou de l'augmentation de Veer-myn à bord. Des planètes entières ont subi des attaques d'envergure soudaines de leur part. Les rapports font état de hordes de Veer-myn surgissant des égouts et des mines, détruisant et dévorant tout ce qui se trouve sur leur passages, à tel point qu'il fallut se résoudre à déployer des pelotons d'Exécuteurs, à organiser des formations défensives à l'aide des Marines locaux, voire, dans certains cas, à demander l'aide d'armées extraterrestres.
La raison présidant à ce soudain pic d'agressivité n'est qu'un des nombreux mystères qui entourent une espèce parmi les plus énigmatiques et discrètes que compte la galaxie. Leurs motivations et leurs desseins demeurent obscurs mais quelque chose semble les avoir effrayés et ils sont décidés à agir.
Premier contact, origine et histoire des Veer-myn
L'origine exacte de l'espèce Veer-myn demeure inconnue. Ils ne conservent aucune trace écrite de leur histoire et n'ont montré aucun intérêt envers les premières approches diplomatiques de la part du GCPS, si ce n'est pour dévorer les diplomates. Mais même si l'avènement des Corporation et, en particulier, la mise au point du moteur McKinley a fortement contribué à la dissémination comme à l'augmentation de la population globale de Veer-myn, d'autres civilisations étaient déjà au fait de leur menace bien avant que l'homme ne s'aventure parmi les étoiles.
Ni les Asterians ni les Pères des Forges ne tolèrent la présence des Veer-myn. Les Nains tout particulièrement les exècrent au plus haut point et la majorité de leurs vaisseaux sont équipés de système de détection sophistiqués pour prévenir toute infestation. Malgré ces précautions, la nature globale des intérêts des Pères des Forges les poussent à parcourir l'ensemble de la galaxie, leur présence au sein du GCPS et le fait que les opérations minières soient l'une de leur activité principale font que les conflits entre les deux espèces sont bien plus fréquents que les deux partis ne le souhaiteraient.
On ignore combien de Veer-myn résident dans l'espace Asterian : les Asterians sont encore plus fermés aux investigations externes que les Veer-myn eux-mêmes. Mais, alors que les armées d'Asteria font des apparitions plus fréquentes en force hors de leurs frontière, les rapports font état de conflits bien plus fréquents entre les Cypher et les Nightcrawlers.
Quant au GCPS, des les premiers temps, quand les voyages interstellaires pouvaient prendre des mois voire des années, les histoires de vieux navigateurs du vide à base de saboteurs carnivores et d'hommes-rats géants étaient souvent mises sur le compte de l'isolement extrême provoqué par un séjour dans l'espace. Mais les mentalités changèrent bien vite que l'équipage du Sitakund rentra au port avec un torse congelé d'une espèce inconnue stockée dans une de ses chambres frigorifiques.
L'équipage raconta qu'ils l'avaient récupéré à bord d'un cargo en perdition, qui avait été victime d'une décompression suite à une collision avec une météorite errante. La créature fut bien vite appelée 'Veer-myn' en raison de son apparence bestiale assez proche du type de créatures qui infestaient autrefois les bateaux sur l'Ancienne Terre et bien des marins en vinrent à considérer leur présence sur un navire comme un signe de bonne fortune. Ce fut le cas, du moins, jusqu'à la disparition du Jindal Manjula.
Forsberg
Les Veer-myn étaient rapides, plus rapide que tout ce que Forsberg avait rencontré jusqu'ici en plus d'être assurément bien plus retors que tout ce qu'il aurait pu imaginer. lls grouillaient sur les murs à la périphérie de la place comme une marée de chair, isolant les groupes de marines dans une série de petites îlots où se livraient des corps à corps désespérés.
Il y avait encore davantage de Veer-myn sur les toits, occupés à les canarder depuis les hauteurs avec leurs étranges armes chimiques. La gelée que les armes projetaient luisait d'une lueur jaunâtre malsaine et elle empestait encore plus que les créatures elles-mêmes. Elle était hautement caustique aussi. Forsberg vit un de ses camarades encaisser un tir dans le torse. Il se mit à hurler alors que son armure fumait avant de prendre feu. Le malheureux essaya d'enlever son plastron et il hurla de plus belle quand le mélange bouillonnant de céramique et fibres métalliques lui brûla les mains.
Forsberg tira sur un Veer-Myn qui le chargeait mais la créature, sans qu'il comprit comment, esquiva le tir. Elle bondit sur le côté puis pris son élan d'une patte sur un banc de pierre et enfin, elle effectua une contorsion en plein saut de manière à reprendre sa charge. Elle ne portait pas de casque mais une série de plaques de métal qui semblaient directement clouées à même son crâne, coiffant ses yeux luisants et sa gueule remplies de dents jaunes. La chose maniait de longs poignards, un dans chaque main, et elle les leva bien haut alors qu'elle fondait sur lui. A la dernière seconde, Forsberg inversa sa prise de son fusil et fit un moulinet avec comme s'il s'agissait d'une masse. La crosse entra en contact avec la mâchoire du Veer-myn à grand fracas. Il tomba comme une pierre.
Forsberg écrasa à coup de bottes la gorge exposée de la bête. Sa nuque se rompit comme une brindille sèche et il sentit les spasmes d'agonie de son adversaire alors qu'il mitraillait ses congénères qui convergeaient vers lui. Forsberg ne manquait pas de cibles. Il savait qu'il était foutu. Ce sera le dernier combat de son escouade.
Avec son tonnage de port en lourd de pratiquement 950.000 tonnes, le Manjula était un vaisseau des plus impressionnants et il transportait une énorme cargaison de produits chimiques pour le compte de la Corporation Singh. Au cours d'un de ses trajets, Corporation Central reçut plusieurs transmissions faisant état d'une panique croissante de la part de l'équipage du Manjula. Le premier message provenait du capitaine : il mentionnait des activités inhabituelles près d'un des réservoirs de proue. Le lendemain, le capitaine en second signalait la mort du capitaine : il avait donné l'ordre de déverrouiller les casiers d'armes d'urgence. Quelques heures à peine plus tard, le lieutenant en second, Chaise Jaustin, visiblement terrifié, envoya la dernière transmission du Manjula. Jaustin y expliquait que plusieurs membres d'équipage avaient disparu et que bien d'autres étaient probablement morts. Alors que la transmission se dégradait en séries de signaux statiques, Jaustin exposait son intention de se claquemurer dans ses quartiers jusqu'à ce qu'une équipe de secours vienne le chercher.
On entendit plus parler du Manjula pendant une année standard malgré les efforts d'un vaisseau de secours envoyé à leur dernière position connue et l'émission d'une alerte générale par le Central. Le vaisseau dériva finalement assez près d'une station de récupération pour qu'il soit secouru. Tous les membres de l'équipage avaient péri. En réalité, on ne trouva aucun signe de vie à bord.
Le bâtiment comportait pourtant des traces d'affrontements violents, notamment des brûlures chimiques près des entrées barricadées des différents ponts et à l'entrée des quartiers de l'équipage. Les membres de l'équipe de récupération rapportèrent que les corridors empestaient une odeur très forte, semblable à celle du lait tourné. Mais pas trace du lieutenant en second. Les trois énormes réservoirs de produits chimiques mentionnés sur le manifeste avaient également disparu.
L'histoire du vaisseau fantôme et les spéculations les plus folles sur ce qui avait bien pu s'y produire se répandirent comme une trainée de poudre dans l'espace corporatif, bien plus vite que les efforts déployés par Corporation Central pour étouffer l'affaire. En définitive, le GCPS n'eut pas d'autre choix que de confirmer que les Veer-myn pouvaient éventuellement représenter un danger mineur et que tous les vaisseaux devraient s'employer à prendre les mesures qu'ils estimaient nécessaires pour empêcher de telle perte. La plupart des vaisseaux de fort tonnage améliorèrent leur arsenal de bord et bien des compagnies de sécurité privées connurent une augmentation significative (et tout à fait bienvenue !) de leur chiffre d'affaire car les contrats de protection d'équipage fleurirent. Mais le souvenir du Manjula finit par s'estomper, d'autant que les contacts entre Veer-myn et humains restaient finalement assez rares. Les quelques épisodes d'affrontements violents furent vite étouffés par Central. Leurs interférences resta tolérées et leurs nids, invisibles et échappant à tout recensement, continuèrent de prospérer en marge du GCPS. S'il faut en croire un proverbe populaire : 'où que vous soyez dans cette galaxie, vous serez toujours à moins de dix mètres d'un Veer-myn.' En réalité, sur la plupart des mondes du GCPS, la véritable distance est bien plus courte.
La nature de la bête
Un soldat Veer-myn ou 'Nightcrawler' présente une masse et une taille similaire à celle de l'humain moyen si l'on fait abstraction de sa longue queue. Il peut soit adopter une posture bipède comme celle des humains ou se déplacer très rapidement à quatre pattes. Dans les deux cas, la queue remplit un rôle de balancier. Leur os sont d'une résistance bien supérieure à celle des humains et les scientifiques ont découvert que leurs articulations sont également bien plus laxes. Il s'agit sans aucun doute d'un atout majeur quand il leur faut se glisser dans les recoins étroits des bâtiments des autres espèces. Les Nightcrawlers sont les représentants de leur espèce que les humains croisent les plus souvent mais en réalité, les Veer-myn forment une des races extraterrestres connues du GCPS qui présente un nombre de morphotypes très divers. Leur forme conditionne souvent leur fonction car les Veer-myn, bien loin de leur image de horde indisciplinée dans l'imagerie populaire, présentent en fait une société aussi bien organisée et strictement hiérarchisée que les autres civilisations avancées.
Les Veer-myn vivent en petits groupes que l'on appelle des colonies. Une colonie réside souvent dans une base fixe ou une zone bien circonscrites qu'elle considère comme son territoire. Une colonie comporte souvent plusieurs nids. Ce sont des groupes de Veer-myn plus petits qui sont spécifiquement envoyés pour étendre le territoire de la colonie. Il peut arriver également qu'ils s'agissent de groupes dissidents, formés à la suite de conflits internes.
Les Brood Mothers sont l'autorité absolue d'une colonie. Ce sont des Veer-myn femelles, qui ont atteint une taille exceptionnelle en comparaison avec leurs congénères car elles reçoivent la meilleure nourriture afin de donner naissance à des litières entières de nouveau-nés. Une colonie modeste peut n'avoir qu'une seule Brood Mother mais une implantation plus importante peut en inclure plusieurs. Quel que soit leur nombre cependant, l'une d'entre elle sera toujours la femelle dominante.
Ni l'âge ni la taille ne joue un facteur déterminant dans l'établissement de cette hiérarchie. Comme pour bien des aspects de la vie des Veer-myn, la méchanceté pure est la qualité première dont dépend la survie et le succès d'une Brood Mother. Au moins une 'guerre civile' a été enregistrée entre deux Brood Mothers rivales occupant le même nid et le conflit ne fut pas moins sanglant que n'importe quelle autre guerre livrée par les Veer-myn à une autre espèce. Il est d'ailleurs possible que le conflit s'invite à cette occasion dans les rues de l'implantation du GCPS qui accueille le nid dans ses sous-sols.
La combinaison d'hormones précises exprimées par la Brood Mother au moment de la gestation influe sur la destinée de la litière. Aucune Brood Mother n'a jamais été capturée vivante par le GCPS : la plupart sont tuées à vue, tant le danger qu'elles présentent est grand, aussi leur degré de contrôle réel sur ce paramètre ne repose que sur des spéculations. Mais la plupart des leurs jeunes vont spontanément former des bandes issues de la même portée. Ils mèneront la totalité de leurs courtes vies dans et au service de leur nid. Ils forment les soldats de base, les groupes de 'Nightcrawlers', de 'Stalkers' et de 'Creepers'. Leur rôle consiste à fourrager, à rassembler les différents matériaux acquis par la colonie. Ils en formeront aussi sa première ligne de défense. Ils ont une dévotion aveugle pour les Brood Mothers. Elle occupe un peu une fonction comparable aux 'Reines' ou équivalents des sociétés moins évoluées.
La majorité des membres des différentes portées se destineront à des vies peu trépidantes et sans grand intérêt mais quelques rares individus deviendront des Maligni au cours d'un processus de différentiation dont on pense qu'il prend place au cours de la gestation.
Si la Brood Mother est le coeur d'une colonie, les Maligni lui tiennent lieu de cerveau. Ils remplissent les fonctions de techniciens et d'armuriers pour la colonie et quelques rares élus parmi eux deviendront même Progenitors : les 'pères' du nid. Les Maligni vivent la majeure partie du temps au plus profond de la colonie, affairés dans leurs ateliers et leurs laboratoires sous la protection des Veer-myn les plus monstrueux et contrefaits que l'on puisse imaginer. Ces zones vivent au rythme du tintamarre produit par les ronflements des machines et du vrombissement de l'équipement que les Maligni ont assemblé à partir des pièces et des matériaux que leurs serviteurs Nightcrawlers ont dérobés à la société à proximité du nid. Ce sont des ingénieurs compétents : ils peuvent concevoir des équipements d'excavation pour agrandir leur territoire, assembler de puissantes armes laser et des armures tout à fait corrects mais d'une conception sommaire.
Bien des Maligni présentent aussi des dispositions pour la microbiologie. Signalons également que les Veer-myn jouissent d'une forte résistance à bien des pathogènes parmi les plus virulents connus dans la galaxie. On les suspecte d'avoir utilisé ces pathogènes contre les citoyens des corporations à maintes reprises. La componction qui a ravagé les colons du Monde de Saren et le protozoaire infectant qui a emporté les marines à bord du CSS Gray Tranquillo ont tous les deux été attribués aux travaux de Maligni bien précis, même si les preuves manquent pour en être certain. Mais même si les Maligni trouvent une utilité indéniable aux micro-organismes, la plupart ont des projets bien plus ambitieux.
S'il dispose d'assez de temps et de ressources, un Malignus d'une colonie respectable peut bâtir les cuves de conception et les synthétiseurs biologiques nécessaires pour faire muter les rejetons les plus faibles d'une portée en d'énormes monstres : les Cauchemars. Ces bêtes énormes sont d'une stabilité génétique et psychologique discutables mais elles ont deux utilités pour la colonie : elles peuvent porter des armes lourdes en cas de combat et elles terrifient littéralement les ennemis des Veer-myn.
Les individus obtenus en cas d'échec de la procédure pour créer des Cauchemars sont peut-être pires : on les appelle les Terreurs Nocturnes. Ils furent rencontrés pour la première fois sur les plateformes d'extraction gazières du système Rzeszow : les escouades de marines furent bien surprises quand les groupes de Nightcrawlers s'écartèrent pour ménager un passage à une énorme créature quadrupède. Elle était couverte de ce qui semblait être des pales de ventilateurs prises dans les conduits de ventilation et assez aiguisées pour pouvoir découper la chair sans protection tandis que sa tête et ses membres antérieurs étaient protégées par des plaques d'armure de facture plus habituelle chez les Veer-myn. Le monstre chargea immédiatement les marines, ce qui entraîna la mort de plusieurs d'entre eux sur le coup ainsi que de nombreux blessés. Les humains durent battre en retraite vers les étages supérieurs de l'installation. La bête ou 'Terreur' comme elle fut surnommée et le soulèvement furent finalement abattus mais seulement à la suite d'un bombardement aussi méticuleux qu'onéreux qui mena à la mise hors service de plusieurs installations minières en orbite durant plusieurs mois. L'entreprise perdit également plusieurs dizaines de marines à l'occasion de furieuses contre-attaques Veer-myn.
La question de savoir si les Maligni font réellement preuve d'innovation ou s'ils sont juste des dilettantes très doués qui se contentent d'adapter à leurs besoins les technologies des autres espèces est un objet de débat chez les xénobiologistes du Noyau. On ne peut cependant leur contester une certaine efficacité. Cependant, la société Veer-myn est incontestablement matriarcale. La raison derrière cet état des choses n'est pas claire. Il s'agit juste d'un problème de représentativité entre les deux genres car très peu des enfants d'une Mother seront des femelles alors que les mâles capables de fournir leurs gamètes sont comparativement bien plus nombreux. Mais quelle qu'en soit la cause, tous les individus présents dans un nid sacrifieront sans hésiter leur vie pour sauver une Brood Mother. On ne peut pas en dire autant si un Progenitor est menacé.
La naissance d'une petite femelle est cependant fréquente par rapport à celle d'une Filandre. On a cru pendant des années que les filandres étaient juste sorties de rêves fiévreux des marins spatiaux et bien des gens les considèrent comme des croque-mitaines mais des restes de Filandre ont été découverts en plusieurs points de la galaxie. Les autopsies ont permis de découvrir que de trois à dix jeunes Veer-myn, tous de petites tailles et albinos, pouvaient former une Filandre. Ils naissent tous reliés entre eux par la queue et, pour parfaire cette vision d'horreur, il semble que tous les membres du groupe subissent une énucléation peu après leur naissance. Les scientifiques du GCPS supputent que cette mutilation est le fait des Maligni du nid, peut-être dans une tentative pour se débarrasser de cette portée anormale.
Ils ne pourraient pas être davantage dans le faux.
La Filandre est un objet de vénération pour les Maligni des nids qui ont la chance d'en accueillir une. Les castes inférieures sont en admiration devant elle. La dévotion et le respect qui leur sont témoignés est ce qui se rapproche le plus d'une religion chez les Veer-myn. La Filandre est à la fois un bon présage et un totem, le signe que des événéments aussi terribles qu'importants vont advenir. Les Maligni consacreront des efforts considérables pour la chérir et la protéger. Quand les Veer-myn découvrent qu'une Brood Mother attend une Filandre, elle sera transportée dans un lieu très calme avant la mise bas, pour assurer sa propre protection ainsi que celle de sa portée exceptionnelle. Le prestige considérable associée à la naissance d'une Filandre rejaillit sur leur mère et cela peut pousser des rivales à tenter d'attenter à sa vie.
Mais le danger ne vient pas que de l'extérieur de la colonie. La Filandre présente une sorte de pouvoir psychique encore mal compris des scientifiques de l'ETCU. Sa naissance s'accompagne d'un cri à la fois audible par les autres Veer-Myn que ressenti mentalement par ces derniers. Des nids entiers peuvent sombrer dans la folie à cause des couinements psychiques incessants et plusieurs colonies corporatistes se sont vus prises d'assaut par des meutes de Veer-myn rendus fous par ce phénomène. Un mélange dément de terreur et de colère plonge les Veer-myn dans une frénésie meurtrière et les pousse à se livrer à des accès de boulimie. Les Maligni qui pratiquent l'énucléation de tous les membres de la Filandre pensent que cela aura pour conséquence d'en augmenter les pouvoirs psychiques. Certaines filandres présentent des dons de précognition et de télépathie. La plupart d'entre elles emploient leurs dons pour influencer la croissance de leur nid d'appartenance et influer sur le cours de la bataille. Un tel pouvoir, bien qu'il ne soit pas bien compris, est naturellement d'un grand intérêt pour le Conseil des Sept. La capture d'un spécimen vivant et intact est assorti d'une prime considérable.
Les clans dominants
Une partie du problème dans l'étude des Veer-myn découle du fait que leurs mouvements comme leurs migrations sont totalement imprévisibles et souvent surprenants. Des installations et des avant-postes jugés sûrs peuvent être pris au dépourvus quand un nid émerge pour les attaquer. D'autrefois, la population entière de Veer-myn qui occupait le sous-sol d'une ville disparaît en une seule nuit. Certains nids paraissent cependant plus stables ou mieux implantés que d'autres.
Le secteur Vesperus au nord-est du GCPS inclut plus de dix planètes peuplées de manière permanente et comprenant plusieurs dizaines de mines, d'usine de traitement et d'assemblage sis sur des petites lunes, des astéroïdes et des stations spatiales en orbite autour d'une étoile. C'est un centre industriel florissant, plein de grandes villes avec des lignes de fret interplanétaires et galactiques : ces conditions idéales ont mené à la formation d'une population de Veer-myn tout aussi prospère que leurs voisins humains.
A la tête du principal nid du secteur, on trouve non pas une Brood Mother mais trois, sans qu'aucune n'ait d'ascendant sur les autres, une situation hautement inhabituelle. Cette détente s'explique par le fait que les trois Brood Mothers sont issues de la même portée et qu'elles ont grandi ensemble. Leur emprise sur le nid est totale et elle est encore renforcée par toute une coterie de Maligni à la tête d'un important réseau d'espions. Ils utilisent leurs tunneliers et les meilleurs Creepers pour obtenir des renseignements et relayer les ordres du trio. Ce 'triumvirat' a entendu son influence en envoyant plusieurs de leurs filles fonder des colonies sur les planètes à la périphérie du système : assez loin pour qu'elles ne menacent pas leur empire mais assez près pour qu'elles puissent les garder sous leur coupe.
Les Veer-Myn sont aussi capables de survivre dans les environnements les plus hostiles. Fondée dans les tout premiers temps de la Quatrième Sphère d'Expansion, Cold Harbour a été conçu afin de devenir une station de relais pour le commerce de matériel électronique et de matériaux divers. Elle était située non loin d'un point de chute reliant la bordure nord-est de l'espace Asterian avec l'intérieur du Noyau. A cette fin, plusieurs chantiers orbitaux furent bâtis. Les propriétaires des patentes d'exploitation du système s'assirent et attendirent que les crédits s'accumulent.
Des égouts à la lumière
Les nids de Veer-myn et leurs colonies sont par nature, inaccessibles aux étrangers et il a déjà été constaté que la majorité des enfants d'une Brood Mother passerait le plus clair de leurs vies près d'elle. On ne manque cependant pas de rapports faisant mention de Veer-myn qui ont réussi à s'intégrer dans différents groupes. Le 'Joueur de Flûte' en est un exemple, de même que le célèbre saboteur et pirate informatique appelé 'Mi-Queue' par les troupes corporatistes. Les deux ont été aperçus au cours de plusieurs conflits différents, pour certains distants de plusieurs milliers d'années lumières. Ce constat soulèvent deux points. Primo, les Veer-myn semblent capable d'utiliser le voyage interstellaire d'une manière bien plus planifiée qu'on ne l'aurait supposé. Secundo, il est possible que les nids soient capables de communiquer entre eux par-delà de vastes distances, un exploit que le GCPS n'est lui-même pas toujours en mesure d'accomplir facilement.
Se pose également la question de ce qui a bien pu advenir des nids d'origines de ces deux individus errants. Ont-ils été détruits suite à une purge du GCPS ? Ont-ils été bannis de leur nid pour une raison quelconque ? Et est-ce que l'existence de Veer-myn solitaires apportent la preuve finale que les équipes de Veer-myn jouant au Dreadball sont réellement ce qu'elles prétendent être, c'est-à-dire des Veer-myn qui ont décidé que leur place dans le GCPS était en pleine lumière et non en sous-sol ?
Malheureusement, le commerce entre les deux empires ne décolla jamais réellement et les relations entre les humains et les Asterians se crispèrent encore davantage suite à l'affaire des colonies établies dans l'Arc de Mort contre l'avis des Asterians. Des dizaines de stations spatiales furent laissées à l'abandon ou scellées alors que leurs équipages partaient vers d'autres cieux. Elles ne demeurèrent pas vides bien longtemps. Des corporations nomades et des bandes de trafiquants s'emparèrent bien vite des installations mais ils découvrirent tout aussi rapidement qu'ils n'y étaient pas seuls. Un grand nid de Veer-Myn, mené par une Brood Mother guidée par une Filandre qu'elle avait enfantée, avait fait de Cold Harbour son logis et elle coexistait même avec les humains restés sur place. Les raisons qui ont pu présider au choix de ce lieu pour y implanter un nid ne sont pas claires. Peut-être que les Veer-myn se sentent davantage en sécurité quand ils s'installent loin des lignes fréquentées (et des regards du GCPS) et qu'ils se satisfont tout à fait des trafics qui prennent place dans tout le secteur. Ou peut-être qu'ils sont motivés par un dessein mystérieux mais propre à leur espèce et que ce dernier requiert qu'ils soient présents à ce point précis de la galaxie.
Les Veer-myn sont assurément des opportunistes nés mais ils ne dédaignent pas manipuler d'autres espèces quand cela peut servir leurs intérêts .
Quand une guerre éclata entre les deux corporations qui se partageaient les droits d'exploitation de la planète Terrus dans le système Semarite, les deux camps furent promptes à accuser leur adversaire. ADP Power prétendit que ses centrales hydro-électriques avait été sabotées pour les forcer à renoncer à leurs patentes. Leur partenaire d'alors, Samarand Ventures Inc., accusa ADP de se servir dans ses réserves d'équipements et de lui voler des produits chimiques destinés à ses travailleurs frontaliers. La dispute dégénéra rapidement en conflit armé. Les contrats commerciaux et les accords de libre-échanges furent dénoncés par les anciens alliés devenus des ennemis mortels et chacun entreprit de prendre le contrôle de la totalité de la planète pour son propre compte. En fait, aucun des deux camps n'était responsable des déboires de l'autre. Une colonie de Veer-myn, qui avait atteint une taille impressionnante, avait décidé de s'emparer de davantage de territoire pour une raison connue de ses seuls Brood Mother et Maligni. A cette fin, des Creepers furent envoyés à la surface pendant quelques temps. Ce sont eux qui se rendirent responsables du détournement de l'énergie produite par les centrales hydro-électriques tandis que les Stalkers du nid ont patiemment et prudemment volé des pièces d'équipements destinés aux mondes frontaliers pour en équiper les ateliers des Maligni.
Quand les armées du GCPS se firent la guerre, des hordes de Veer-myn, et tout particulièrement de véritables meutes de Cauchemars et de Terreurs Nocturnes, résultats d'un programme mutagénique d'une ampleur jamais vue jusqu'ici, apparurent systématiquement à l'issue de chaque bataille pour achever le vainqueur. Pour chaque victoire remportées par les armées corporatistes, elles perdaient des dizaines voire des centaines d'hommes dans les embuscades opportunistes tendues par les Veer-myn. ADP et Samarand finirent par se déclarer en banqueroute suite aux pertes massives subies sur place et elles fuirent la planète. Le déploiement d'une grande quantité d'agents biologiques à longue durée de vie lors d'une tentative désespérée pour exterminer le nid rendit la surface de Terrus impropre à la vie humaine sans l'emploi d'équipement de protection lourd. La planète appartenait désormais à ses nouveaux maîtres.
Document confidentiel : Niveau d'autorisation Delta minimum requis
Objet : Transcription d'enregistrements vidéo envoyés via un réseau privé à l'Institut de l'ETCU sur Torstar IV par l'Analyste en Chef James van der Steen, du laboratoire d'analyse avancée des matériaux Reiss.
Sujet : Analyse d'une technologie extraterrestre récupérée par des marines sur un avant-poste corporatif avancé, 'Govin Minage 012', incident numéro 67354/1223
Ok, j'ai fini de jeter un œil au matériel amené par l'équipe qui est revenue de l'avant-poste minier. Pour être franc, la majorité est complètement foutu. Mais ce n'est pas très surprenant.
Les Veer-myn se sont vraiment déchainés là-bas. J'ai un peu regardé les vidéos et c'est pas beau à voir. Mais les gars m'ont quand même ramené quelque chose d'intéressant. Une arme veer-myn presque intact. [bruit métallique] Ce truc est conçu pour envoyer de la gelée toxique. J'ai pas trouvé mieux comme terme technique. L'arme en a encore un plein réservoir attaché. Ca pue vraiment. Je l'ai ouvert sous la hôte d'aspiration et elle a quand même trouvé le moyen de parfumer toute la pièce. Alors, la majeure partie de l'arme, le mécanisme de mise à feu, le châssis, le barillet, tout ça provient de chez nous. J'entends par là que c'est de l'équipement des corporations. Les Veer-myn l'ont juste modifié pour leur usage. J'ai même trouvé un numéro de série à moitié effacé gravé dans la valve de la chambre de compression. J'ai pu remonter sa trace jusqu'à une pièce fabriquée dans une usine de tracteurs sur Talamone. Mais la gelée, eh bien, c'est une recette connue des seuls Veer-myn. On l'a passée à l'analyse dans quelques machines du labo. C'est essentiellement de l'acide, de grade industriel : je vous ai envoyé la liste. Mais il y a deux composants que nous ne sommes pas parvenus à identifier. Quoi que ce soit, ce sont des substances très réactives. C'est ce qui permet à cette merde de brûler au-travers des équipements de protection qu'on utilise. La substance n'a eu aucun problème à attaquer celui des mineurs. En fait, j'ai la preuve visuelle que leur matériel de protection ne leur a servi à rien. Le treillage synthétique et les protections plus lourdes, comme les plaques de blindage et de céramique peuvent probablement contrer la causticité. Mais tout ce qui est de grade inférieur brûlera.
Ce n'est pas tout cependant. Et vous devez entendre ce qui va suivre. C'est la raison pour laquelle je ne veux rien avoir à faire avec ces bestioles. J'ai visionné les enregistrements des marines. Ils ont retrouvé les mineurs. Du moins ce qu'il en restait. Il y avait une chambre à la périphérie des tunnels du nid. On aurait dit un des dernières excavations pratiquées par les mineurs. Enfin, plutôt...de ce qu'il restait des mineurs. Aucun d'entre eux n'était armé et les marines pensent qu'ils ne sont pas tous morts au même moment. Ils ne pensent pas non plus que leur trépas fut rapide. Monsieur, je pense que les Veer-myn se servait de Govin comme d'un terrain d'expérimentation pour leurs armes.
<<<Fin du rapport>>>
DES ARMES TYPIQUES
Un cliché très répandu dans l'espace corporatiste veut que les Veer-myn soient à peine plus malins que des animaux. Leur apparence y contribue pour beaucoup en rendant facile le fait de croire que ce sont des descendants mutants des rats de l'Ancienne Terre, que les premiers voyageurs interstellaires ont emporté avec eux par inadvertance. Cependant, les Maligni sont des ingénieurs de talent et ils savent faire un usage particulièrement efficace des pièces de machinerie volées aux autres espèces tout comme ils savent tirer grand profit d'agents biologiques que les autres espèces préfèrent éviter d'employer.
Les Veer-myn recourent beaucoup à la dispersion d'agents chimiques, aussi bien pour marquer leur territoire que pour indiquer leurs intentions. C'est un aspect qu'on retrouve logiquement dans leur arsenal, qui comprend nombre d'armes basée sur l'épandage. Les munitions classiques pour ces armes sont une sorte de cocktail chimique conçu à partir de l'invention préférée du Progénitor en chef du nid. C'est un savant mélange d'agents toxiques et corrosifs (pour les non-Veer-myn) mêlé de phéromones indiquant l'identité du nid et du Maligni. Ce sont des armes qui 'marquent' réellement leur cible et les 'lanceurs chimiques' fonctionnent sur le même principe, en projetant des grande quantité de cette mixture, elle aussi conçue pour identifier les Maligni ou le nid auquel appartient l'arme.
La technologie laser semble également exercer une certaine fascination pour les plus brillants scientifiques du nid : on peut sans doute l'expliquer par la perception supérieure du spectre lumineux visible dont font preuve les Veer-myn ou plus simplement parce qu'ils aiment voir des choses prendre feu. Les fusils à rayon portés par les Night Crawlers recourent à un mélange de matériaux radioactifs et de gaz rares pour produire un rayonnement dangereux, quoique peu précis et bien moins concentré que la plupart des armes laser couramment employés par les humains. Il est intéressant de remarquer, en annexe que l'effet des fuites radioactives que l'usage de ces armes induits sur leurs porteurs n'a pas fait l'objet d'études approfondies. Mais il est possible, étant donné la résistance naturelle dont fait montre l'espèce Veer-myn à la plupart des agents pathogènes, qu'elle soit également immunisée aux risques radioactifs.
Une hypothèse alternative pourrait être que la courte espérance de vie du soldat Veer-myn moyen fait qu'il serait probablement décédé avant de souffrir des conséquences d'une exposition radioactive prolongée.
Les Veer-myn n'ont aucune confiance envers les autres espèces mais cette défiance ne s'étend par à leurs technologies, qu'ils s'approprient bien volontiers avant de les modifier pour qu'elles s'adaptent à leurs besoins. L'adaptabilité est une des pierres angulaires de leur espèce, après tout. Ce qui peut passer initialement pour des disparitions inexplicables ou des dysfonctionnement peut en réalité être des vols délibérés et des actes de sabotage.
Il n'en est pas d'exemple plus éclatant que les colossaux transport souterrains que les troupes désignent sous le nom de 'foreuses'. Ces immenses machines peuvent couvrir des distances considérables, utilisant leurs foreuses mécaniques pour forer de l'espace supplémentaire afin d'agrandir le territoire d'un terrier ou bien pour transporter des guerriers en plein cœur des combats.
Les analyses des foreuses récupérées après la bataille des Collines de Wreak ont révélé que bien que le châssis blindé, les commandes de conduite et d'autres composants internes proviennent d'équipements miniers du GCPS, son moteur était une création Veer-myn alimentée par un combustible personnalisé aussi toxique qu'instable. D'autres appareils similaires ont été récupérés sur des théâtres d'opération différents, parmi lesquels des engins monoplaces que les Veer-myn utilisent à la fois comme messagers et comme engins d'assaut. Une analyse poussée du carburant puant qui alimentait ces véhicules a montré un niveau de toxicité suffisant pour, à la longue, dégrader les fonctions cognitives de leurs pilotes Veer-myn.
Si cette supposition est avérée, cela n'est sans doute pas d'une grande importance pour le nid : après tout, on ne compte plus les Night Crawlers prêts à confier leurs corps aux machines des Maligni.
Deux orteils
Deux-orteils sut immédiatement qu'il allait apprécier ce monde. C'était déjà bien mieux que le vaisseau, le seul élément de comparaison qu'il connaisse. L'Arcturus était un lieu froid et humide où la nourriture était parfois rare. Ce nouveau monde était chaud et accueillant. Il sentait bon, aussi.
Il arrêta de ramper pendant un moment pour sentir attentivement son environnement. Oui, ils n'étaient pas loin. Son estomac grogna d'impatience et il se remit en mouvement, le corps bien haut et ses quatre griffes cliquetant sur la surface métallique du canal. Depuis le bâtiment dans lequel il s'était glissé, il pouvait entendre les bruits de l'affrontement à l'extérieur : les coups de feu, les hurlements, les couinements haut perchés de ses congénères. Mais seules les odeurs retenaient l'attention de Deux-Orteils. La manière dont les humains s'appropriaient leur territoire était étrange. Cet endroit, comme le vaisseau, était couvert de signes peints et il comprenait leur fonctionnement. Mais il pensait que la manière des Veer-myn était supérieure. Vous pouviez en apprendre bien plus en reniflant un musc de marquage qu'en regardant quelque chose. Qui l'avait déposé, il y a combien de temps, si l'auteur était au-dessus de vous dans la hiérarchie du nid et si vous deviez donc le craindre ou s'il était au contraire possible de le dominer. Ce genre de choses. C'était tellement mieux. Mais après tout, bien des actions des humains étaient étranges. La plupart d'entre eux avaient dormi pendant la totalité du voyage les menant vers cette nouvelle planète. Deux-orteils les avait observés alors qu'il rôdait dans les ponts où leurs lits glacés se trouvaient. Ils avaient pressé son museau contre la glace pour voir leurs visages endormis. Son souffle avait gelé au-dessus de leur reflet. Ils dormaient pendant que le terrier croissait. Ils étaient tellement bizarres.
Mais en dépit de leurs mœurs inférieures, ils avaient tout de même réussi à mener leur vaisseau à sa destination finale, vers leur nouveau foyer, leur nouvelle colonie. Une fois sur place, la Reine Mère avait ordonné à ses enfants d'embarquer dans les navettes à destination de la planète. Elle était d'ailleurs monté dans l'une d'elle. La Mère était en sûreté maintenant dans une chambre bien profonde. Mais les humains s'étaient rendu compte de la présence des passagers clandestins qu'ils avaient emmenés sur Arcturus. Ils avaient essayé de les arrêter. Grave erreur. Ses enfants ne laisseraient personne mettre en danger la Reine et ils ont riposté.
Deux-Orteils marqua une nouvelle pause. Des puits de lumière jaune venus de la pièce située sous ses pieds se reflétaient dans ses yeux. Il jeta un bref coup d'œil par une des ouvertures. L'odeur était extrêmement forte désormais et il pouvait voir du mouvement. Trois humains. Ils n'étaient pas armés. Un blessé. Il reniflait leur trace depuis leur départ de la colonie, laquelle était bien distante maintenant. Son estomac ne se calmait pas.
Deux-orteils testa discrètement la solidité des lattes qui le séparaient de ses trois proies : elles se pliaient facilement, sans opposer beaucoup de résistance. Il sourit dans la semi-obscurité de sa cachette. Il tira doucement le grand couteau qu'il portait à la hanche et se prépara à faire irruption dans la pièce en-dessous.
Les Veer-myn au combat
Le nombre constitue l'atout principal des Veer-myn en cas de conflit armé. Les grandes colonies comprennent des centaines de Night Crawlers et de Stalkers dans leurs rangs. Ils sont tout à fait capables d'infliger des pertes aux unités envoyées les affronter. La discipline et l'entrainement de ces combattants de rang inférieur laissent à désirer mais, comme ils combattent dans des escouades formées par des individus originaires de la même litière, ils présentent une bonne coordination, tout particulièrement quand ils sont encadrés par un Malignus. Une horde de Veer-myn bien commandée est redoutable.
Des vagues successives de Veer-myn surgissant en nombre de leurs terriers ou la charge de lignes de Night Terrors déchiquetant des escouades entières constituent un adversaire terrifiant pour n'importe quel ennemi et les astucieux commandants Veer-myn savent tout à fait en tirer avantage. Ces hordes, une fois lancées en pleine charge, sont en mesure de submerger sous le poids du nombre leurs ennemis si elles ne sont pas arrêtées promptement mais elles agissent aussi comme des distractions très utiles. Quand on affronte des Veer-myn, le pire danger est souvent celui qui demeure invisible.
Les excavatrices que les Maligni emploient pour agrandir les terriers peuvent aussi très bien servir à déployer des troupes derrière les lignes ennemies voire dans un bâtiment où leur adversaire se sont retranchés. Les témoignages (sans confirmation visuelles cependant) parlant de convois souterrains formé d'une excavatrice de tête tractant plusieurs compartiments blindés remplis de troupes abondent. On pense que le moment exact de l'émergence de l'engin est tout autant une surprise pour ses passagers que pour ses victimes mais les excavatrices peuvent se montrer d'une précision redoutable. Les Pères des Forges de Point Ekffrit l'ont appris à leur dépens quand les hangars de leur tanks Sturnhammer ont été infiltrés par surprise par des meutes Night Crawlers et des escadrons entiers de Tunnel Runners. Les tanks des Nains furent rapidement détruits parce que la majeure partie des Steel Warriors et des Gardes des Forges avaient été envoyés près de la ligne de front pour repousser plusieurs Nightmares en furie. Le Point est tombé peu de temps après.
Les Creepers, les spécialistes en sabotage du terrier, peuvent facilement dégrader l'équipement adverse et ses lignes de ravitaillement, provoquant l'explosion des véhicules et répandant des maladies au sein de ses effectifs. La pression psychique d'une Filandre peut rendre fou une unité ennemie ou plonger les Veer-myn proches dans une frénésie meurtrière.
Les commandants du GCPS chargés de la défense de Spree Bounty ont été horrifié par le spectacle de leur escadron d'Hornet plongeant en chute libre quelques minutes après leur sortie. Des Creepers avaient tranchés les attaches des ailes de tous les appareils la veille de la bataille. Une fois en vol, les ailes de tous les appareils se sont désolidarisées de leur châssis principal.
Les choses prennent une tournure plus sinistre encore quand plusieurs unités engagées commencent à murmurer des choses inintelligibles avant que des hommes tombent à genou en hurlant et en gémissant...quand ils ne finissent pas par retourner leurs armes contre eux ou contre leurs camarades.
Toutes les tactiques Veer-myn ne reposent cependant pas exclusivement sur des feintes et des embuscades. Ils peuvent aussi déployer une puissance de feu considérable grâce à leurs plateformes mobiles équipés d'armes chimiques et d'armes à rayon. L'affrontement frontal est aussi rendu possible par l'emploi de Nightmares presque incontrôlables. Des armes lourdes montées sur des Night Terrors très bien protégés peut aussi contribuer à cet arsenal peu subtil du moins tant que leurs dresseurs conservent le contrôle de leurs créatures.
Si une armée Veer-myn comporte bien une faiblesse, il s'agit de sa dépendance à l'égard de la Reine Mère ou ses vassaux Progenitors pour exercer le commandement et maintenir un certain ordre. Une Reine Mère sera toujours équipée des meilleurs équipements de protection de son terrier et on la rencontre rarement au plus fort des combats. Mais son élimination signerait le glas de sa colonie.
La nature profonde du commandement qu'elle exerce sur ses troupes n'est pas comparable avec celle que les commandants des autres espèces partagent avec leurs subordonnées. Si la Mère est en péril, elle appellera tous les membres de sa colonie pour la défendre, ce qui contrariera ses plans. Un phénomène similaire, quoique pour des raisons différentes, est observable quand un ennemi s'en prend à une Filandre. Un commandant avisé, s'il veut survivre à l'assaut du gros des forces Veer-myn restante ferait bien de faire de l'élimination de la Mère ainsi que du reste de ses subordonnés de haut rang un de ses objectifs prioritaires.
Le CSS Zloveshy Vassily
L'univers est un lieu rempli à part égale de merveilles et d'horreurs mais c'est un fait dont les hommes et les femmes à la tête du GCPS aimeraient bien que leurs concitoyens ne soient pas trop conscients. Du moins, dans la mesure du possible, pas avant que quelqu'un ne lance un nouveau système d'armement pour accompagner l'annonce de la découverte d'un nouveau danger.
Malgré tous leurs efforts, les rumeurs circulent. Elles se diffusent dans les bars et les bouges des stations spatiales comme dans les camps de mercenaires, un peu comme la fumée d'une pipe remplie de substance récréative finit par embaumer un bar louche. Les histoires horrifiques à base de monstres, de vaisseaux perdus dans le vide spatial et des créatures qu'il ne vaut mieux pas déranger abondent. La plupart des ces légendes ne sont que des variations de thèmes éprouvés, comme les histoires de fantômes que les jeunes hommes bravaches aiment à se raconter à la lueur de feu de camp pour se faire peur. Mais parfois, l'une de ces histoires paraît suffisamment réelle pour que ceux qui l'entendent s'abstiennent de rire à son récit. Celle du CSS Zloveshy Vassily en est une.
D'après cette histoire, donc, le Vassily était un cargo de moyen tonnage mais trop gros pour accueillir un moteur McKinley. C'était le genre de vaisseau qui transportait des matériaux brut, comme des plaques de construction préfabriquées à la fois en direction et en provenance des planètes des sphères extérieures. Le Vassily n'était pas du tout un vaisseau militaire mais pourtant, pour une raison qui s'est perdue, il avait un contingent de marines à son bord.
La raison de leur présence varie selon le conteur de l'histoire et de son degré d'ébriété. D'aucuns disent que les marines rentraient simplement chez eux, d'autres qu'ils protégeaient quelque chose...mais la nature de ce 'quelque chose' est sujet à variations. Une pile de puce de crédit contrefaites d'un moins 3 mètres de haut. Ou bien c'était une sorte de fromage radioactif. Les conteurs les plus sérieux préfèrent mentionner de matériel génétique, l'ADN d'une créature bien spéciale qu'une corporation louche avait conçue et qu'elle avait ensuite envoyée vers les sphères internes pour y poursuivre leurs expérimentations. Mais quoi que ce soit, tout le monde s'accorde sur un point : cela avait excité la convoitise des Veer-myn.
On raconte que l'affrontement fut terrible. Les Veer-myn arrosèrent les marines de composés acides, ils rongèrent les câbles d'alimentation des supports vitaux et même les câbles électriques assurant l'éclairage. Ils repoussèrent les marines toujours plus loin dans le vaisseau jusqu'à ce que...parvenu à ce point du récit, les versions divergent fortement.
Certains disent que tous les marines ont été tués puis dévorés, à moins que ce ne soit l'inverse. D'autres clament que le dernier survivant a fait exploser le vaisseau avant de s'enfuir dans une capsule de sauvetage mais il a découvert plus tard que de gros spécimen de Veer-myn l'y avait suivi. D'autres encore prétendent que le vaisseau est en perdition quelque part alors que tous les membres d'équipage sont morts depuis longtemps et que les Veer-myn, hideusement mutés par ce qu'ils ont découvert dans la cargaison du vaisseau attendent en silence que l'équipage de récupération d'un vaisseau malchanceux abordent le Vassily pour tenter de le récupérer.
L'histoire du Vassily a été raconté des milliers de fois, avec presque autant de fins différentes. Un seul homme prétend avoir été présent à bord. C'est un vieil homme désormais alors, si ce qu'il prétend est vrai, l'épopée du Vassily a eu lieu il y a très longtemps. On le trouve souvent au Pan Jar sur Pléiades, attablé dans un recoin sombre d'un tripot minable. Il dit qu'il ne laissera plus jamais personne se placer dans son dos. Il porte un vieil uniforme des marines, le temps a rendu ses insignes et ses médailles illisibles. On ne peut plus distinguer que les trois premières lettres de son nom, fixéd à son torse juste au-dessus du cœur, juste à côté d'un insigne de sergent. Ces trois lettres sont 'Cru'.
Tapis dans l'ombre
En surface, le GCPS est un monument magnifique : le vibrant témoignage de ce que la loi du marché et l'innovation technologique peuvent produire en terme de vision de l'univers. Le Noyau est rempli de cités faites de gratte-ciels resplendissants, brillant à la lumière de mille soleils tandis qu'ils s'élancent triomphalement vers les cieux occupés par les engins de transport individuels et des vaisseaux de ligne aussi luxueux que colossaux.
Chaque jour, d'innombrables colons embarquent dans un périple plein de découvertes, dans leur quête de nouvelles planètes à coloniser. Partout où ils atterrissent, ils fondent de nouvelles colonies, des avant-postes et des implantations en faisant montre d'une volonté apparemment sans limite pour repousser les frontières du GCPS.
Mais si vous grattiez le séduisant vernis de cette utopie trompeuse et si vous y regardiez d'un peu plus près, vous ne tarderiez à découvrir quelque chose : une chose qui rôde dans tous les recoins les plus sombres du GCPS. Une chose qui ferait fuir en hurlant de terreur la plupart de ses citoyens. Et on ne leur donnerait pas tort.
Car sous leurs villes, dans les égouts et dans les soutes des transports spatiaux, dans les espaces étroits et dans les conduites des immenses vaisseaux spatiaux, dans tous les endroits sombres difficiles d'accès, les Veer-myn se terrent.
La majorité des implantations corporatistes et des vaisseaux de transport de gros tonnage accueille au moins un nid de Veer-myn, le plus souvent sans en avoir conscience, à tel point que les compagnons d'assurance de fret ont inclus des closes couvrant les pertes provoquées par leurs pillages dans leurs contrats. Il en est ainsi depuis pratiquement aussi longtemps que l'homme voyage parmi les étoiles.
Initialement, les vols des Veer-myn sans d'ampleur modeste : ils ne provoquent pas d'inconvénients majeurs pour leurs hôtes et on ne considérait pas la menace suffisante pour faire davantage qu'assembler occasionnellement des petits groupes de chasseurs afin de réguler leurs effectifs. Les Veer-myn étaient considérés par la plupart des gens comme des parasites bénins et. Personne n'en faisaient grand cas, surtout en comparaison aux dangers bien plus visibles et plus agressifs que contient la galaxie. Leurs migrations en apparence aussi improvisées qu'aléatoires au sein de la galaxie purent se poursuivre sans aucune opposition réelle.
Mais cette légèreté pourrait se révéler bien plus coûteuse que quiconque aurait pu l'imaginer.
La véritable force des Veer-myn, tout comme leur effectif réel dans la galaxie, a été soigneusement dissimulée, tout comme l'étendue de leurs affreuses expériences en armement radioactif et biologique. Et tandis que par le passé, leurs activités se limitaient à l'infestation occasionnel d'un vaisseau de ligne ou à de rares incursions dans les rues d'une colonie corporatiste, tout laisse penser qu'ils ne s'arrêteront pas là.
Un nombre sans cesse plus grand de vaisseaux sont perdus corps et âmes après qu'ils aient fait état de la présence ou de l'augmentation de Veer-myn à bord. Des planètes entières ont subi des attaques d'envergure soudaines de leur part. Les rapports font état de hordes de Veer-myn surgissant des égouts et des mines, détruisant et dévorant tout ce qui se trouve sur leur passages, à tel point qu'il fallut se résoudre à déployer des pelotons d'Exécuteurs, à organiser des formations défensives à l'aide des Marines locaux, voire, dans certains cas, à demander l'aide d'armées extraterrestres.
La raison présidant à ce soudain pic d'agressivité n'est qu'un des nombreux mystères qui entourent une espèce parmi les plus énigmatiques et discrètes que compte la galaxie. Leurs motivations et leurs desseins demeurent obscurs mais quelque chose semble les avoir effrayés et ils sont décidés à agir.
Premier contact, origine et histoire des Veer-myn
L'origine exacte de l'espèce Veer-myn demeure inconnue. Ils ne conservent aucune trace écrite de leur histoire et n'ont montré aucun intérêt envers les premières approches diplomatiques de la part du GCPS, si ce n'est pour dévorer les diplomates. Mais même si l'avènement des Corporation et, en particulier, la mise au point du moteur McKinley a fortement contribué à la dissémination comme à l'augmentation de la population globale de Veer-myn, d'autres civilisations étaient déjà au fait de leur menace bien avant que l'homme ne s'aventure parmi les étoiles.
Ni les Asterians ni les Pères des Forges ne tolèrent la présence des Veer-myn. Les Nains tout particulièrement les exècrent au plus haut point et la majorité de leurs vaisseaux sont équipés de système de détection sophistiqués pour prévenir toute infestation. Malgré ces précautions, la nature globale des intérêts des Pères des Forges les poussent à parcourir l'ensemble de la galaxie, leur présence au sein du GCPS et le fait que les opérations minières soient l'une de leur activité principale font que les conflits entre les deux espèces sont bien plus fréquents que les deux partis ne le souhaiteraient.
On ignore combien de Veer-myn résident dans l'espace Asterian : les Asterians sont encore plus fermés aux investigations externes que les Veer-myn eux-mêmes. Mais, alors que les armées d'Asteria font des apparitions plus fréquentes en force hors de leurs frontière, les rapports font état de conflits bien plus fréquents entre les Cypher et les Nightcrawlers.
Quant au GCPS, des les premiers temps, quand les voyages interstellaires pouvaient prendre des mois voire des années, les histoires de vieux navigateurs du vide à base de saboteurs carnivores et d'hommes-rats géants étaient souvent mises sur le compte de l'isolement extrême provoqué par un séjour dans l'espace. Mais les mentalités changèrent bien vite que l'équipage du Sitakund rentra au port avec un torse congelé d'une espèce inconnue stockée dans une de ses chambres frigorifiques.
L'équipage raconta qu'ils l'avaient récupéré à bord d'un cargo en perdition, qui avait été victime d'une décompression suite à une collision avec une météorite errante. La créature fut bien vite appelée 'Veer-myn' en raison de son apparence bestiale assez proche du type de créatures qui infestaient autrefois les bateaux sur l'Ancienne Terre et bien des marins en vinrent à considérer leur présence sur un navire comme un signe de bonne fortune. Ce fut le cas, du moins, jusqu'à la disparition du Jindal Manjula.
Forsberg
Les Veer-myn étaient rapides, plus rapide que tout ce que Forsberg avait rencontré jusqu'ici en plus d'être assurément bien plus retors que tout ce qu'il aurait pu imaginer. lls grouillaient sur les murs à la périphérie de la place comme une marée de chair, isolant les groupes de marines dans une série de petites îlots où se livraient des corps à corps désespérés.
Il y avait encore davantage de Veer-myn sur les toits, occupés à les canarder depuis les hauteurs avec leurs étranges armes chimiques. La gelée que les armes projetaient luisait d'une lueur jaunâtre malsaine et elle empestait encore plus que les créatures elles-mêmes. Elle était hautement caustique aussi. Forsberg vit un de ses camarades encaisser un tir dans le torse. Il se mit à hurler alors que son armure fumait avant de prendre feu. Le malheureux essaya d'enlever son plastron et il hurla de plus belle quand le mélange bouillonnant de céramique et fibres métalliques lui brûla les mains.
Forsberg tira sur un Veer-Myn qui le chargeait mais la créature, sans qu'il comprit comment, esquiva le tir. Elle bondit sur le côté puis pris son élan d'une patte sur un banc de pierre et enfin, elle effectua une contorsion en plein saut de manière à reprendre sa charge. Elle ne portait pas de casque mais une série de plaques de métal qui semblaient directement clouées à même son crâne, coiffant ses yeux luisants et sa gueule remplies de dents jaunes. La chose maniait de longs poignards, un dans chaque main, et elle les leva bien haut alors qu'elle fondait sur lui. A la dernière seconde, Forsberg inversa sa prise de son fusil et fit un moulinet avec comme s'il s'agissait d'une masse. La crosse entra en contact avec la mâchoire du Veer-myn à grand fracas. Il tomba comme une pierre.
Forsberg écrasa à coup de bottes la gorge exposée de la bête. Sa nuque se rompit comme une brindille sèche et il sentit les spasmes d'agonie de son adversaire alors qu'il mitraillait ses congénères qui convergeaient vers lui. Forsberg ne manquait pas de cibles. Il savait qu'il était foutu. Ce sera le dernier combat de son escouade.
Avec son tonnage de port en lourd de pratiquement 950.000 tonnes, le Manjula était un vaisseau des plus impressionnants et il transportait une énorme cargaison de produits chimiques pour le compte de la Corporation Singh. Au cours d'un de ses trajets, Corporation Central reçut plusieurs transmissions faisant état d'une panique croissante de la part de l'équipage du Manjula. Le premier message provenait du capitaine : il mentionnait des activités inhabituelles près d'un des réservoirs de proue. Le lendemain, le capitaine en second signalait la mort du capitaine : il avait donné l'ordre de déverrouiller les casiers d'armes d'urgence. Quelques heures à peine plus tard, le lieutenant en second, Chaise Jaustin, visiblement terrifié, envoya la dernière transmission du Manjula. Jaustin y expliquait que plusieurs membres d'équipage avaient disparu et que bien d'autres étaient probablement morts. Alors que la transmission se dégradait en séries de signaux statiques, Jaustin exposait son intention de se claquemurer dans ses quartiers jusqu'à ce qu'une équipe de secours vienne le chercher.
On entendit plus parler du Manjula pendant une année standard malgré les efforts d'un vaisseau de secours envoyé à leur dernière position connue et l'émission d'une alerte générale par le Central. Le vaisseau dériva finalement assez près d'une station de récupération pour qu'il soit secouru. Tous les membres de l'équipage avaient péri. En réalité, on ne trouva aucun signe de vie à bord.
Le bâtiment comportait pourtant des traces d'affrontements violents, notamment des brûlures chimiques près des entrées barricadées des différents ponts et à l'entrée des quartiers de l'équipage. Les membres de l'équipe de récupération rapportèrent que les corridors empestaient une odeur très forte, semblable à celle du lait tourné. Mais pas trace du lieutenant en second. Les trois énormes réservoirs de produits chimiques mentionnés sur le manifeste avaient également disparu.
L'histoire du vaisseau fantôme et les spéculations les plus folles sur ce qui avait bien pu s'y produire se répandirent comme une trainée de poudre dans l'espace corporatif, bien plus vite que les efforts déployés par Corporation Central pour étouffer l'affaire. En définitive, le GCPS n'eut pas d'autre choix que de confirmer que les Veer-myn pouvaient éventuellement représenter un danger mineur et que tous les vaisseaux devraient s'employer à prendre les mesures qu'ils estimaient nécessaires pour empêcher de telle perte. La plupart des vaisseaux de fort tonnage améliorèrent leur arsenal de bord et bien des compagnies de sécurité privées connurent une augmentation significative (et tout à fait bienvenue !) de leur chiffre d'affaire car les contrats de protection d'équipage fleurirent. Mais le souvenir du Manjula finit par s'estomper, d'autant que les contacts entre Veer-myn et humains restaient finalement assez rares. Les quelques épisodes d'affrontements violents furent vite étouffés par Central. Leurs interférences resta tolérées et leurs nids, invisibles et échappant à tout recensement, continuèrent de prospérer en marge du GCPS. S'il faut en croire un proverbe populaire : 'où que vous soyez dans cette galaxie, vous serez toujours à moins de dix mètres d'un Veer-myn.' En réalité, sur la plupart des mondes du GCPS, la véritable distance est bien plus courte.
La nature de la bête
Un soldat Veer-myn ou 'Nightcrawler' présente une masse et une taille similaire à celle de l'humain moyen si l'on fait abstraction de sa longue queue. Il peut soit adopter une posture bipède comme celle des humains ou se déplacer très rapidement à quatre pattes. Dans les deux cas, la queue remplit un rôle de balancier. Leur os sont d'une résistance bien supérieure à celle des humains et les scientifiques ont découvert que leurs articulations sont également bien plus laxes. Il s'agit sans aucun doute d'un atout majeur quand il leur faut se glisser dans les recoins étroits des bâtiments des autres espèces. Les Nightcrawlers sont les représentants de leur espèce que les humains croisent les plus souvent mais en réalité, les Veer-myn forment une des races extraterrestres connues du GCPS qui présente un nombre de morphotypes très divers. Leur forme conditionne souvent leur fonction car les Veer-myn, bien loin de leur image de horde indisciplinée dans l'imagerie populaire, présentent en fait une société aussi bien organisée et strictement hiérarchisée que les autres civilisations avancées.
Les Veer-myn vivent en petits groupes que l'on appelle des colonies. Une colonie réside souvent dans une base fixe ou une zone bien circonscrites qu'elle considère comme son territoire. Une colonie comporte souvent plusieurs nids. Ce sont des groupes de Veer-myn plus petits qui sont spécifiquement envoyés pour étendre le territoire de la colonie. Il peut arriver également qu'ils s'agissent de groupes dissidents, formés à la suite de conflits internes.
Les Brood Mothers sont l'autorité absolue d'une colonie. Ce sont des Veer-myn femelles, qui ont atteint une taille exceptionnelle en comparaison avec leurs congénères car elles reçoivent la meilleure nourriture afin de donner naissance à des litières entières de nouveau-nés. Une colonie modeste peut n'avoir qu'une seule Brood Mother mais une implantation plus importante peut en inclure plusieurs. Quel que soit leur nombre cependant, l'une d'entre elle sera toujours la femelle dominante.
Ni l'âge ni la taille ne joue un facteur déterminant dans l'établissement de cette hiérarchie. Comme pour bien des aspects de la vie des Veer-myn, la méchanceté pure est la qualité première dont dépend la survie et le succès d'une Brood Mother. Au moins une 'guerre civile' a été enregistrée entre deux Brood Mothers rivales occupant le même nid et le conflit ne fut pas moins sanglant que n'importe quelle autre guerre livrée par les Veer-myn à une autre espèce. Il est d'ailleurs possible que le conflit s'invite à cette occasion dans les rues de l'implantation du GCPS qui accueille le nid dans ses sous-sols.
La combinaison d'hormones précises exprimées par la Brood Mother au moment de la gestation influe sur la destinée de la litière. Aucune Brood Mother n'a jamais été capturée vivante par le GCPS : la plupart sont tuées à vue, tant le danger qu'elles présentent est grand, aussi leur degré de contrôle réel sur ce paramètre ne repose que sur des spéculations. Mais la plupart des leurs jeunes vont spontanément former des bandes issues de la même portée. Ils mèneront la totalité de leurs courtes vies dans et au service de leur nid. Ils forment les soldats de base, les groupes de 'Nightcrawlers', de 'Stalkers' et de 'Creepers'. Leur rôle consiste à fourrager, à rassembler les différents matériaux acquis par la colonie. Ils en formeront aussi sa première ligne de défense. Ils ont une dévotion aveugle pour les Brood Mothers. Elle occupe un peu une fonction comparable aux 'Reines' ou équivalents des sociétés moins évoluées.
La majorité des membres des différentes portées se destineront à des vies peu trépidantes et sans grand intérêt mais quelques rares individus deviendront des Maligni au cours d'un processus de différentiation dont on pense qu'il prend place au cours de la gestation.
Si la Brood Mother est le coeur d'une colonie, les Maligni lui tiennent lieu de cerveau. Ils remplissent les fonctions de techniciens et d'armuriers pour la colonie et quelques rares élus parmi eux deviendront même Progenitors : les 'pères' du nid. Les Maligni vivent la majeure partie du temps au plus profond de la colonie, affairés dans leurs ateliers et leurs laboratoires sous la protection des Veer-myn les plus monstrueux et contrefaits que l'on puisse imaginer. Ces zones vivent au rythme du tintamarre produit par les ronflements des machines et du vrombissement de l'équipement que les Maligni ont assemblé à partir des pièces et des matériaux que leurs serviteurs Nightcrawlers ont dérobés à la société à proximité du nid. Ce sont des ingénieurs compétents : ils peuvent concevoir des équipements d'excavation pour agrandir leur territoire, assembler de puissantes armes laser et des armures tout à fait corrects mais d'une conception sommaire.
Bien des Maligni présentent aussi des dispositions pour la microbiologie. Signalons également que les Veer-myn jouissent d'une forte résistance à bien des pathogènes parmi les plus virulents connus dans la galaxie. On les suspecte d'avoir utilisé ces pathogènes contre les citoyens des corporations à maintes reprises. La componction qui a ravagé les colons du Monde de Saren et le protozoaire infectant qui a emporté les marines à bord du CSS Gray Tranquillo ont tous les deux été attribués aux travaux de Maligni bien précis, même si les preuves manquent pour en être certain. Mais même si les Maligni trouvent une utilité indéniable aux micro-organismes, la plupart ont des projets bien plus ambitieux.
S'il dispose d'assez de temps et de ressources, un Malignus d'une colonie respectable peut bâtir les cuves de conception et les synthétiseurs biologiques nécessaires pour faire muter les rejetons les plus faibles d'une portée en d'énormes monstres : les Cauchemars. Ces bêtes énormes sont d'une stabilité génétique et psychologique discutables mais elles ont deux utilités pour la colonie : elles peuvent porter des armes lourdes en cas de combat et elles terrifient littéralement les ennemis des Veer-myn.
Les individus obtenus en cas d'échec de la procédure pour créer des Cauchemars sont peut-être pires : on les appelle les Terreurs Nocturnes. Ils furent rencontrés pour la première fois sur les plateformes d'extraction gazières du système Rzeszow : les escouades de marines furent bien surprises quand les groupes de Nightcrawlers s'écartèrent pour ménager un passage à une énorme créature quadrupède. Elle était couverte de ce qui semblait être des pales de ventilateurs prises dans les conduits de ventilation et assez aiguisées pour pouvoir découper la chair sans protection tandis que sa tête et ses membres antérieurs étaient protégées par des plaques d'armure de facture plus habituelle chez les Veer-myn. Le monstre chargea immédiatement les marines, ce qui entraîna la mort de plusieurs d'entre eux sur le coup ainsi que de nombreux blessés. Les humains durent battre en retraite vers les étages supérieurs de l'installation. La bête ou 'Terreur' comme elle fut surnommée et le soulèvement furent finalement abattus mais seulement à la suite d'un bombardement aussi méticuleux qu'onéreux qui mena à la mise hors service de plusieurs installations minières en orbite durant plusieurs mois. L'entreprise perdit également plusieurs dizaines de marines à l'occasion de furieuses contre-attaques Veer-myn.
La question de savoir si les Maligni font réellement preuve d'innovation ou s'ils sont juste des dilettantes très doués qui se contentent d'adapter à leurs besoins les technologies des autres espèces est un objet de débat chez les xénobiologistes du Noyau. On ne peut cependant leur contester une certaine efficacité. Cependant, la société Veer-myn est incontestablement matriarcale. La raison derrière cet état des choses n'est pas claire. Il s'agit juste d'un problème de représentativité entre les deux genres car très peu des enfants d'une Mother seront des femelles alors que les mâles capables de fournir leurs gamètes sont comparativement bien plus nombreux. Mais quelle qu'en soit la cause, tous les individus présents dans un nid sacrifieront sans hésiter leur vie pour sauver une Brood Mother. On ne peut pas en dire autant si un Progenitor est menacé.
La naissance d'une petite femelle est cependant fréquente par rapport à celle d'une Filandre. On a cru pendant des années que les filandres étaient juste sorties de rêves fiévreux des marins spatiaux et bien des gens les considèrent comme des croque-mitaines mais des restes de Filandre ont été découverts en plusieurs points de la galaxie. Les autopsies ont permis de découvrir que de trois à dix jeunes Veer-myn, tous de petites tailles et albinos, pouvaient former une Filandre. Ils naissent tous reliés entre eux par la queue et, pour parfaire cette vision d'horreur, il semble que tous les membres du groupe subissent une énucléation peu après leur naissance. Les scientifiques du GCPS supputent que cette mutilation est le fait des Maligni du nid, peut-être dans une tentative pour se débarrasser de cette portée anormale.
Ils ne pourraient pas être davantage dans le faux.
La Filandre est un objet de vénération pour les Maligni des nids qui ont la chance d'en accueillir une. Les castes inférieures sont en admiration devant elle. La dévotion et le respect qui leur sont témoignés est ce qui se rapproche le plus d'une religion chez les Veer-myn. La Filandre est à la fois un bon présage et un totem, le signe que des événéments aussi terribles qu'importants vont advenir. Les Maligni consacreront des efforts considérables pour la chérir et la protéger. Quand les Veer-myn découvrent qu'une Brood Mother attend une Filandre, elle sera transportée dans un lieu très calme avant la mise bas, pour assurer sa propre protection ainsi que celle de sa portée exceptionnelle. Le prestige considérable associée à la naissance d'une Filandre rejaillit sur leur mère et cela peut pousser des rivales à tenter d'attenter à sa vie.
Mais le danger ne vient pas que de l'extérieur de la colonie. La Filandre présente une sorte de pouvoir psychique encore mal compris des scientifiques de l'ETCU. Sa naissance s'accompagne d'un cri à la fois audible par les autres Veer-Myn que ressenti mentalement par ces derniers. Des nids entiers peuvent sombrer dans la folie à cause des couinements psychiques incessants et plusieurs colonies corporatistes se sont vus prises d'assaut par des meutes de Veer-myn rendus fous par ce phénomène. Un mélange dément de terreur et de colère plonge les Veer-myn dans une frénésie meurtrière et les pousse à se livrer à des accès de boulimie. Les Maligni qui pratiquent l'énucléation de tous les membres de la Filandre pensent que cela aura pour conséquence d'en augmenter les pouvoirs psychiques. Certaines filandres présentent des dons de précognition et de télépathie. La plupart d'entre elles emploient leurs dons pour influencer la croissance de leur nid d'appartenance et influer sur le cours de la bataille. Un tel pouvoir, bien qu'il ne soit pas bien compris, est naturellement d'un grand intérêt pour le Conseil des Sept. La capture d'un spécimen vivant et intact est assorti d'une prime considérable.
Les clans dominants
Une partie du problème dans l'étude des Veer-myn découle du fait que leurs mouvements comme leurs migrations sont totalement imprévisibles et souvent surprenants. Des installations et des avant-postes jugés sûrs peuvent être pris au dépourvus quand un nid émerge pour les attaquer. D'autrefois, la population entière de Veer-myn qui occupait le sous-sol d'une ville disparaît en une seule nuit. Certains nids paraissent cependant plus stables ou mieux implantés que d'autres.
Le secteur Vesperus au nord-est du GCPS inclut plus de dix planètes peuplées de manière permanente et comprenant plusieurs dizaines de mines, d'usine de traitement et d'assemblage sis sur des petites lunes, des astéroïdes et des stations spatiales en orbite autour d'une étoile. C'est un centre industriel florissant, plein de grandes villes avec des lignes de fret interplanétaires et galactiques : ces conditions idéales ont mené à la formation d'une population de Veer-myn tout aussi prospère que leurs voisins humains.
A la tête du principal nid du secteur, on trouve non pas une Brood Mother mais trois, sans qu'aucune n'ait d'ascendant sur les autres, une situation hautement inhabituelle. Cette détente s'explique par le fait que les trois Brood Mothers sont issues de la même portée et qu'elles ont grandi ensemble. Leur emprise sur le nid est totale et elle est encore renforcée par toute une coterie de Maligni à la tête d'un important réseau d'espions. Ils utilisent leurs tunneliers et les meilleurs Creepers pour obtenir des renseignements et relayer les ordres du trio. Ce 'triumvirat' a entendu son influence en envoyant plusieurs de leurs filles fonder des colonies sur les planètes à la périphérie du système : assez loin pour qu'elles ne menacent pas leur empire mais assez près pour qu'elles puissent les garder sous leur coupe.
Les Veer-Myn sont aussi capables de survivre dans les environnements les plus hostiles. Fondée dans les tout premiers temps de la Quatrième Sphère d'Expansion, Cold Harbour a été conçu afin de devenir une station de relais pour le commerce de matériel électronique et de matériaux divers. Elle était située non loin d'un point de chute reliant la bordure nord-est de l'espace Asterian avec l'intérieur du Noyau. A cette fin, plusieurs chantiers orbitaux furent bâtis. Les propriétaires des patentes d'exploitation du système s'assirent et attendirent que les crédits s'accumulent.
Des égouts à la lumière
Les nids de Veer-myn et leurs colonies sont par nature, inaccessibles aux étrangers et il a déjà été constaté que la majorité des enfants d'une Brood Mother passerait le plus clair de leurs vies près d'elle. On ne manque cependant pas de rapports faisant mention de Veer-myn qui ont réussi à s'intégrer dans différents groupes. Le 'Joueur de Flûte' en est un exemple, de même que le célèbre saboteur et pirate informatique appelé 'Mi-Queue' par les troupes corporatistes. Les deux ont été aperçus au cours de plusieurs conflits différents, pour certains distants de plusieurs milliers d'années lumières. Ce constat soulèvent deux points. Primo, les Veer-myn semblent capable d'utiliser le voyage interstellaire d'une manière bien plus planifiée qu'on ne l'aurait supposé. Secundo, il est possible que les nids soient capables de communiquer entre eux par-delà de vastes distances, un exploit que le GCPS n'est lui-même pas toujours en mesure d'accomplir facilement.
Se pose également la question de ce qui a bien pu advenir des nids d'origines de ces deux individus errants. Ont-ils été détruits suite à une purge du GCPS ? Ont-ils été bannis de leur nid pour une raison quelconque ? Et est-ce que l'existence de Veer-myn solitaires apportent la preuve finale que les équipes de Veer-myn jouant au Dreadball sont réellement ce qu'elles prétendent être, c'est-à-dire des Veer-myn qui ont décidé que leur place dans le GCPS était en pleine lumière et non en sous-sol ?
Malheureusement, le commerce entre les deux empires ne décolla jamais réellement et les relations entre les humains et les Asterians se crispèrent encore davantage suite à l'affaire des colonies établies dans l'Arc de Mort contre l'avis des Asterians. Des dizaines de stations spatiales furent laissées à l'abandon ou scellées alors que leurs équipages partaient vers d'autres cieux. Elles ne demeurèrent pas vides bien longtemps. Des corporations nomades et des bandes de trafiquants s'emparèrent bien vite des installations mais ils découvrirent tout aussi rapidement qu'ils n'y étaient pas seuls. Un grand nid de Veer-Myn, mené par une Brood Mother guidée par une Filandre qu'elle avait enfantée, avait fait de Cold Harbour son logis et elle coexistait même avec les humains restés sur place. Les raisons qui ont pu présider au choix de ce lieu pour y implanter un nid ne sont pas claires. Peut-être que les Veer-myn se sentent davantage en sécurité quand ils s'installent loin des lignes fréquentées (et des regards du GCPS) et qu'ils se satisfont tout à fait des trafics qui prennent place dans tout le secteur. Ou peut-être qu'ils sont motivés par un dessein mystérieux mais propre à leur espèce et que ce dernier requiert qu'ils soient présents à ce point précis de la galaxie.
Les Veer-myn sont assurément des opportunistes nés mais ils ne dédaignent pas manipuler d'autres espèces quand cela peut servir leurs intérêts .
Quand une guerre éclata entre les deux corporations qui se partageaient les droits d'exploitation de la planète Terrus dans le système Semarite, les deux camps furent promptes à accuser leur adversaire. ADP Power prétendit que ses centrales hydro-électriques avait été sabotées pour les forcer à renoncer à leurs patentes. Leur partenaire d'alors, Samarand Ventures Inc., accusa ADP de se servir dans ses réserves d'équipements et de lui voler des produits chimiques destinés à ses travailleurs frontaliers. La dispute dégénéra rapidement en conflit armé. Les contrats commerciaux et les accords de libre-échanges furent dénoncés par les anciens alliés devenus des ennemis mortels et chacun entreprit de prendre le contrôle de la totalité de la planète pour son propre compte. En fait, aucun des deux camps n'était responsable des déboires de l'autre. Une colonie de Veer-myn, qui avait atteint une taille impressionnante, avait décidé de s'emparer de davantage de territoire pour une raison connue de ses seuls Brood Mother et Maligni. A cette fin, des Creepers furent envoyés à la surface pendant quelques temps. Ce sont eux qui se rendirent responsables du détournement de l'énergie produite par les centrales hydro-électriques tandis que les Stalkers du nid ont patiemment et prudemment volé des pièces d'équipements destinés aux mondes frontaliers pour en équiper les ateliers des Maligni.
Quand les armées du GCPS se firent la guerre, des hordes de Veer-myn, et tout particulièrement de véritables meutes de Cauchemars et de Terreurs Nocturnes, résultats d'un programme mutagénique d'une ampleur jamais vue jusqu'ici, apparurent systématiquement à l'issue de chaque bataille pour achever le vainqueur. Pour chaque victoire remportées par les armées corporatistes, elles perdaient des dizaines voire des centaines d'hommes dans les embuscades opportunistes tendues par les Veer-myn. ADP et Samarand finirent par se déclarer en banqueroute suite aux pertes massives subies sur place et elles fuirent la planète. Le déploiement d'une grande quantité d'agents biologiques à longue durée de vie lors d'une tentative désespérée pour exterminer le nid rendit la surface de Terrus impropre à la vie humaine sans l'emploi d'équipement de protection lourd. La planète appartenait désormais à ses nouveaux maîtres.
Document confidentiel : Niveau d'autorisation Delta minimum requis
Objet : Transcription d'enregistrements vidéo envoyés via un réseau privé à l'Institut de l'ETCU sur Torstar IV par l'Analyste en Chef James van der Steen, du laboratoire d'analyse avancée des matériaux Reiss.
Sujet : Analyse d'une technologie extraterrestre récupérée par des marines sur un avant-poste corporatif avancé, 'Govin Minage 012', incident numéro 67354/1223
Ok, j'ai fini de jeter un œil au matériel amené par l'équipe qui est revenue de l'avant-poste minier. Pour être franc, la majorité est complètement foutu. Mais ce n'est pas très surprenant.
Les Veer-myn se sont vraiment déchainés là-bas. J'ai un peu regardé les vidéos et c'est pas beau à voir. Mais les gars m'ont quand même ramené quelque chose d'intéressant. Une arme veer-myn presque intact. [bruit métallique] Ce truc est conçu pour envoyer de la gelée toxique. J'ai pas trouvé mieux comme terme technique. L'arme en a encore un plein réservoir attaché. Ca pue vraiment. Je l'ai ouvert sous la hôte d'aspiration et elle a quand même trouvé le moyen de parfumer toute la pièce. Alors, la majeure partie de l'arme, le mécanisme de mise à feu, le châssis, le barillet, tout ça provient de chez nous. J'entends par là que c'est de l'équipement des corporations. Les Veer-myn l'ont juste modifié pour leur usage. J'ai même trouvé un numéro de série à moitié effacé gravé dans la valve de la chambre de compression. J'ai pu remonter sa trace jusqu'à une pièce fabriquée dans une usine de tracteurs sur Talamone. Mais la gelée, eh bien, c'est une recette connue des seuls Veer-myn. On l'a passée à l'analyse dans quelques machines du labo. C'est essentiellement de l'acide, de grade industriel : je vous ai envoyé la liste. Mais il y a deux composants que nous ne sommes pas parvenus à identifier. Quoi que ce soit, ce sont des substances très réactives. C'est ce qui permet à cette merde de brûler au-travers des équipements de protection qu'on utilise. La substance n'a eu aucun problème à attaquer celui des mineurs. En fait, j'ai la preuve visuelle que leur matériel de protection ne leur a servi à rien. Le treillage synthétique et les protections plus lourdes, comme les plaques de blindage et de céramique peuvent probablement contrer la causticité. Mais tout ce qui est de grade inférieur brûlera.
Ce n'est pas tout cependant. Et vous devez entendre ce qui va suivre. C'est la raison pour laquelle je ne veux rien avoir à faire avec ces bestioles. J'ai visionné les enregistrements des marines. Ils ont retrouvé les mineurs. Du moins ce qu'il en restait. Il y avait une chambre à la périphérie des tunnels du nid. On aurait dit un des dernières excavations pratiquées par les mineurs. Enfin, plutôt...de ce qu'il restait des mineurs. Aucun d'entre eux n'était armé et les marines pensent qu'ils ne sont pas tous morts au même moment. Ils ne pensent pas non plus que leur trépas fut rapide. Monsieur, je pense que les Veer-myn se servait de Govin comme d'un terrain d'expérimentation pour leurs armes.
<<<Fin du rapport>>>
DES ARMES TYPIQUES
Un cliché très répandu dans l'espace corporatiste veut que les Veer-myn soient à peine plus malins que des animaux. Leur apparence y contribue pour beaucoup en rendant facile le fait de croire que ce sont des descendants mutants des rats de l'Ancienne Terre, que les premiers voyageurs interstellaires ont emporté avec eux par inadvertance. Cependant, les Maligni sont des ingénieurs de talent et ils savent faire un usage particulièrement efficace des pièces de machinerie volées aux autres espèces tout comme ils savent tirer grand profit d'agents biologiques que les autres espèces préfèrent éviter d'employer.
Les Veer-myn recourent beaucoup à la dispersion d'agents chimiques, aussi bien pour marquer leur territoire que pour indiquer leurs intentions. C'est un aspect qu'on retrouve logiquement dans leur arsenal, qui comprend nombre d'armes basée sur l'épandage. Les munitions classiques pour ces armes sont une sorte de cocktail chimique conçu à partir de l'invention préférée du Progénitor en chef du nid. C'est un savant mélange d'agents toxiques et corrosifs (pour les non-Veer-myn) mêlé de phéromones indiquant l'identité du nid et du Maligni. Ce sont des armes qui 'marquent' réellement leur cible et les 'lanceurs chimiques' fonctionnent sur le même principe, en projetant des grande quantité de cette mixture, elle aussi conçue pour identifier les Maligni ou le nid auquel appartient l'arme.
La technologie laser semble également exercer une certaine fascination pour les plus brillants scientifiques du nid : on peut sans doute l'expliquer par la perception supérieure du spectre lumineux visible dont font preuve les Veer-myn ou plus simplement parce qu'ils aiment voir des choses prendre feu. Les fusils à rayon portés par les Night Crawlers recourent à un mélange de matériaux radioactifs et de gaz rares pour produire un rayonnement dangereux, quoique peu précis et bien moins concentré que la plupart des armes laser couramment employés par les humains. Il est intéressant de remarquer, en annexe que l'effet des fuites radioactives que l'usage de ces armes induits sur leurs porteurs n'a pas fait l'objet d'études approfondies. Mais il est possible, étant donné la résistance naturelle dont fait montre l'espèce Veer-myn à la plupart des agents pathogènes, qu'elle soit également immunisée aux risques radioactifs.
Une hypothèse alternative pourrait être que la courte espérance de vie du soldat Veer-myn moyen fait qu'il serait probablement décédé avant de souffrir des conséquences d'une exposition radioactive prolongée.
Les Veer-myn n'ont aucune confiance envers les autres espèces mais cette défiance ne s'étend par à leurs technologies, qu'ils s'approprient bien volontiers avant de les modifier pour qu'elles s'adaptent à leurs besoins. L'adaptabilité est une des pierres angulaires de leur espèce, après tout. Ce qui peut passer initialement pour des disparitions inexplicables ou des dysfonctionnement peut en réalité être des vols délibérés et des actes de sabotage.
Il n'en est pas d'exemple plus éclatant que les colossaux transport souterrains que les troupes désignent sous le nom de 'foreuses'. Ces immenses machines peuvent couvrir des distances considérables, utilisant leurs foreuses mécaniques pour forer de l'espace supplémentaire afin d'agrandir le territoire d'un terrier ou bien pour transporter des guerriers en plein cœur des combats.
Les analyses des foreuses récupérées après la bataille des Collines de Wreak ont révélé que bien que le châssis blindé, les commandes de conduite et d'autres composants internes proviennent d'équipements miniers du GCPS, son moteur était une création Veer-myn alimentée par un combustible personnalisé aussi toxique qu'instable. D'autres appareils similaires ont été récupérés sur des théâtres d'opération différents, parmi lesquels des engins monoplaces que les Veer-myn utilisent à la fois comme messagers et comme engins d'assaut. Une analyse poussée du carburant puant qui alimentait ces véhicules a montré un niveau de toxicité suffisant pour, à la longue, dégrader les fonctions cognitives de leurs pilotes Veer-myn.
Si cette supposition est avérée, cela n'est sans doute pas d'une grande importance pour le nid : après tout, on ne compte plus les Night Crawlers prêts à confier leurs corps aux machines des Maligni.
Deux orteils
Deux-orteils sut immédiatement qu'il allait apprécier ce monde. C'était déjà bien mieux que le vaisseau, le seul élément de comparaison qu'il connaisse. L'Arcturus était un lieu froid et humide où la nourriture était parfois rare. Ce nouveau monde était chaud et accueillant. Il sentait bon, aussi.
Il arrêta de ramper pendant un moment pour sentir attentivement son environnement. Oui, ils n'étaient pas loin. Son estomac grogna d'impatience et il se remit en mouvement, le corps bien haut et ses quatre griffes cliquetant sur la surface métallique du canal. Depuis le bâtiment dans lequel il s'était glissé, il pouvait entendre les bruits de l'affrontement à l'extérieur : les coups de feu, les hurlements, les couinements haut perchés de ses congénères. Mais seules les odeurs retenaient l'attention de Deux-Orteils. La manière dont les humains s'appropriaient leur territoire était étrange. Cet endroit, comme le vaisseau, était couvert de signes peints et il comprenait leur fonctionnement. Mais il pensait que la manière des Veer-myn était supérieure. Vous pouviez en apprendre bien plus en reniflant un musc de marquage qu'en regardant quelque chose. Qui l'avait déposé, il y a combien de temps, si l'auteur était au-dessus de vous dans la hiérarchie du nid et si vous deviez donc le craindre ou s'il était au contraire possible de le dominer. Ce genre de choses. C'était tellement mieux. Mais après tout, bien des actions des humains étaient étranges. La plupart d'entre eux avaient dormi pendant la totalité du voyage les menant vers cette nouvelle planète. Deux-orteils les avait observés alors qu'il rôdait dans les ponts où leurs lits glacés se trouvaient. Ils avaient pressé son museau contre la glace pour voir leurs visages endormis. Son souffle avait gelé au-dessus de leur reflet. Ils dormaient pendant que le terrier croissait. Ils étaient tellement bizarres.
Mais en dépit de leurs mœurs inférieures, ils avaient tout de même réussi à mener leur vaisseau à sa destination finale, vers leur nouveau foyer, leur nouvelle colonie. Une fois sur place, la Reine Mère avait ordonné à ses enfants d'embarquer dans les navettes à destination de la planète. Elle était d'ailleurs monté dans l'une d'elle. La Mère était en sûreté maintenant dans une chambre bien profonde. Mais les humains s'étaient rendu compte de la présence des passagers clandestins qu'ils avaient emmenés sur Arcturus. Ils avaient essayé de les arrêter. Grave erreur. Ses enfants ne laisseraient personne mettre en danger la Reine et ils ont riposté.
Deux-Orteils marqua une nouvelle pause. Des puits de lumière jaune venus de la pièce située sous ses pieds se reflétaient dans ses yeux. Il jeta un bref coup d'œil par une des ouvertures. L'odeur était extrêmement forte désormais et il pouvait voir du mouvement. Trois humains. Ils n'étaient pas armés. Un blessé. Il reniflait leur trace depuis leur départ de la colonie, laquelle était bien distante maintenant. Son estomac ne se calmait pas.
Deux-orteils testa discrètement la solidité des lattes qui le séparaient de ses trois proies : elles se pliaient facilement, sans opposer beaucoup de résistance. Il sourit dans la semi-obscurité de sa cachette. Il tira doucement le grand couteau qu'il portait à la hanche et se prépara à faire irruption dans la pièce en-dessous.
Les Veer-myn au combat
Le nombre constitue l'atout principal des Veer-myn en cas de conflit armé. Les grandes colonies comprennent des centaines de Night Crawlers et de Stalkers dans leurs rangs. Ils sont tout à fait capables d'infliger des pertes aux unités envoyées les affronter. La discipline et l'entrainement de ces combattants de rang inférieur laissent à désirer mais, comme ils combattent dans des escouades formées par des individus originaires de la même litière, ils présentent une bonne coordination, tout particulièrement quand ils sont encadrés par un Malignus. Une horde de Veer-myn bien commandée est redoutable.
Des vagues successives de Veer-myn surgissant en nombre de leurs terriers ou la charge de lignes de Night Terrors déchiquetant des escouades entières constituent un adversaire terrifiant pour n'importe quel ennemi et les astucieux commandants Veer-myn savent tout à fait en tirer avantage. Ces hordes, une fois lancées en pleine charge, sont en mesure de submerger sous le poids du nombre leurs ennemis si elles ne sont pas arrêtées promptement mais elles agissent aussi comme des distractions très utiles. Quand on affronte des Veer-myn, le pire danger est souvent celui qui demeure invisible.
Les excavatrices que les Maligni emploient pour agrandir les terriers peuvent aussi très bien servir à déployer des troupes derrière les lignes ennemies voire dans un bâtiment où leur adversaire se sont retranchés. Les témoignages (sans confirmation visuelles cependant) parlant de convois souterrains formé d'une excavatrice de tête tractant plusieurs compartiments blindés remplis de troupes abondent. On pense que le moment exact de l'émergence de l'engin est tout autant une surprise pour ses passagers que pour ses victimes mais les excavatrices peuvent se montrer d'une précision redoutable. Les Pères des Forges de Point Ekffrit l'ont appris à leur dépens quand les hangars de leur tanks Sturnhammer ont été infiltrés par surprise par des meutes Night Crawlers et des escadrons entiers de Tunnel Runners. Les tanks des Nains furent rapidement détruits parce que la majeure partie des Steel Warriors et des Gardes des Forges avaient été envoyés près de la ligne de front pour repousser plusieurs Nightmares en furie. Le Point est tombé peu de temps après.
Les Creepers, les spécialistes en sabotage du terrier, peuvent facilement dégrader l'équipement adverse et ses lignes de ravitaillement, provoquant l'explosion des véhicules et répandant des maladies au sein de ses effectifs. La pression psychique d'une Filandre peut rendre fou une unité ennemie ou plonger les Veer-myn proches dans une frénésie meurtrière.
Les commandants du GCPS chargés de la défense de Spree Bounty ont été horrifié par le spectacle de leur escadron d'Hornet plongeant en chute libre quelques minutes après leur sortie. Des Creepers avaient tranchés les attaches des ailes de tous les appareils la veille de la bataille. Une fois en vol, les ailes de tous les appareils se sont désolidarisées de leur châssis principal.
Les choses prennent une tournure plus sinistre encore quand plusieurs unités engagées commencent à murmurer des choses inintelligibles avant que des hommes tombent à genou en hurlant et en gémissant...quand ils ne finissent pas par retourner leurs armes contre eux ou contre leurs camarades.
Toutes les tactiques Veer-myn ne reposent cependant pas exclusivement sur des feintes et des embuscades. Ils peuvent aussi déployer une puissance de feu considérable grâce à leurs plateformes mobiles équipés d'armes chimiques et d'armes à rayon. L'affrontement frontal est aussi rendu possible par l'emploi de Nightmares presque incontrôlables. Des armes lourdes montées sur des Night Terrors très bien protégés peut aussi contribuer à cet arsenal peu subtil du moins tant que leurs dresseurs conservent le contrôle de leurs créatures.
Si une armée Veer-myn comporte bien une faiblesse, il s'agit de sa dépendance à l'égard de la Reine Mère ou ses vassaux Progenitors pour exercer le commandement et maintenir un certain ordre. Une Reine Mère sera toujours équipée des meilleurs équipements de protection de son terrier et on la rencontre rarement au plus fort des combats. Mais son élimination signerait le glas de sa colonie.
La nature profonde du commandement qu'elle exerce sur ses troupes n'est pas comparable avec celle que les commandants des autres espèces partagent avec leurs subordonnées. Si la Mère est en péril, elle appellera tous les membres de sa colonie pour la défendre, ce qui contrariera ses plans. Un phénomène similaire, quoique pour des raisons différentes, est observable quand un ennemi s'en prend à une Filandre. Un commandant avisé, s'il veut survivre à l'assaut du gros des forces Veer-myn restante ferait bien de faire de l'élimination de la Mère ainsi que du reste de ses subordonnés de haut rang un de ses objectifs prioritaires.
Le CSS Zloveshy Vassily
L'univers est un lieu rempli à part égale de merveilles et d'horreurs mais c'est un fait dont les hommes et les femmes à la tête du GCPS aimeraient bien que leurs concitoyens ne soient pas trop conscients. Du moins, dans la mesure du possible, pas avant que quelqu'un ne lance un nouveau système d'armement pour accompagner l'annonce de la découverte d'un nouveau danger.
Malgré tous leurs efforts, les rumeurs circulent. Elles se diffusent dans les bars et les bouges des stations spatiales comme dans les camps de mercenaires, un peu comme la fumée d'une pipe remplie de substance récréative finit par embaumer un bar louche. Les histoires horrifiques à base de monstres, de vaisseaux perdus dans le vide spatial et des créatures qu'il ne vaut mieux pas déranger abondent. La plupart des ces légendes ne sont que des variations de thèmes éprouvés, comme les histoires de fantômes que les jeunes hommes bravaches aiment à se raconter à la lueur de feu de camp pour se faire peur. Mais parfois, l'une de ces histoires paraît suffisamment réelle pour que ceux qui l'entendent s'abstiennent de rire à son récit. Celle du CSS Zloveshy Vassily en est une.
D'après cette histoire, donc, le Vassily était un cargo de moyen tonnage mais trop gros pour accueillir un moteur McKinley. C'était le genre de vaisseau qui transportait des matériaux brut, comme des plaques de construction préfabriquées à la fois en direction et en provenance des planètes des sphères extérieures. Le Vassily n'était pas du tout un vaisseau militaire mais pourtant, pour une raison qui s'est perdue, il avait un contingent de marines à son bord.
La raison de leur présence varie selon le conteur de l'histoire et de son degré d'ébriété. D'aucuns disent que les marines rentraient simplement chez eux, d'autres qu'ils protégeaient quelque chose...mais la nature de ce 'quelque chose' est sujet à variations. Une pile de puce de crédit contrefaites d'un moins 3 mètres de haut. Ou bien c'était une sorte de fromage radioactif. Les conteurs les plus sérieux préfèrent mentionner de matériel génétique, l'ADN d'une créature bien spéciale qu'une corporation louche avait conçue et qu'elle avait ensuite envoyée vers les sphères internes pour y poursuivre leurs expérimentations. Mais quoi que ce soit, tout le monde s'accorde sur un point : cela avait excité la convoitise des Veer-myn.
On raconte que l'affrontement fut terrible. Les Veer-myn arrosèrent les marines de composés acides, ils rongèrent les câbles d'alimentation des supports vitaux et même les câbles électriques assurant l'éclairage. Ils repoussèrent les marines toujours plus loin dans le vaisseau jusqu'à ce que...parvenu à ce point du récit, les versions divergent fortement.
Certains disent que tous les marines ont été tués puis dévorés, à moins que ce ne soit l'inverse. D'autres clament que le dernier survivant a fait exploser le vaisseau avant de s'enfuir dans une capsule de sauvetage mais il a découvert plus tard que de gros spécimen de Veer-myn l'y avait suivi. D'autres encore prétendent que le vaisseau est en perdition quelque part alors que tous les membres d'équipage sont morts depuis longtemps et que les Veer-myn, hideusement mutés par ce qu'ils ont découvert dans la cargaison du vaisseau attendent en silence que l'équipage de récupération d'un vaisseau malchanceux abordent le Vassily pour tenter de le récupérer.
L'histoire du Vassily a été raconté des milliers de fois, avec presque autant de fins différentes. Un seul homme prétend avoir été présent à bord. C'est un vieil homme désormais alors, si ce qu'il prétend est vrai, l'épopée du Vassily a eu lieu il y a très longtemps. On le trouve souvent au Pan Jar sur Pléiades, attablé dans un recoin sombre d'un tripot minable. Il dit qu'il ne laissera plus jamais personne se placer dans son dos. Il porte un vieil uniforme des marines, le temps a rendu ses insignes et ses médailles illisibles. On ne peut plus distinguer que les trois premières lettres de son nom, fixéd à son torse juste au-dessus du cœur, juste à côté d'un insigne de sergent. Ces trois lettres sont 'Cru'.